La petite marchande de souvenirs de François Lelord

La petite marchande de souvenirs de François Lelord

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par TRIEB, le 17 février 2013 (BOULOGNE-BILLANCOURT, Inscrit le 18 avril 2012, 72 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (26 852ème position).
Visites : 4 783 

UNE MARCHANDE AU BORD DU LAC

Le titre de ce roman peut paraître anodin et annoncer un récit très ordinaire. Il n’en est rien. Nous sommes en 1995 à Hanoi. Le Vietnam commence très timidement une période d’ouverture. Julien est médecin auprès de l’ambassade de France ; il se trouve à ce titre en contact avec des expatriés, des diplomates, des médecins, des membres d’organisations internationales telles que l’OMS. Julien fréquente le docteur Dàng, qui dirige un service dans un hôpital de Hanoi. Il est en relation régulière avec Fleur, étudiante vietnamienne qui lui donne des cours pour améliorer sa connaissance de la langue vietnamienne qu’il regrette de ne pouvoir maîtriser complètement. Il rencontre également Clea, médecin britannique membre de l’OMS. Elle est amoureuse de lui, mais Julien, sans être indifférent à sa personne, n’ose aller jusqu’au bout de ses sentiments. Il se censure, se réfrène. D’autres personnages sont attachants : ainsi Wallace et Margaret, son épouse. Wallace est un ancien du Vietnam, il a été prisonnier de guerre et interné à ce titre plusieurs années, est revenu dans ce pays. Il lui est lié viscéralement.

Il rencontre , au cours d’une promenade faite sur l’un des nombreux lacs de Hanoi, une jeune marchande de souvenirs , Lumière d’Automne , Minh Thu , en vietnamien , et s’en éprend, insensiblement , en l’observant se débattre avec les touristes et surtout avec les policiers , toujours à l’affût pour maintenir les bonnes pratiques révolutionnaires , c’est-à-dire la surveillance systématique de la population , et la délation .

Peu avant Noël une épidémie se déclare dans le service du professeur Dàng ; le quotidien de la ville est bouleversé, des gens sont mis en quarantaine. Julien part en expédition dans des régions reculées du Vietnam tandis que Lumière d’Automne est arrêtée en raison de ses activités de vente, tolérées par les autorités mais officiellement toujours illicites. Par amour pour elle, Julien la fait libérer du camp de rééducation, en s’appuyant sur les relations du docteur Dàng avec les dignitaires de l’armée populaire.

La force de ce roman est de ne pas être un hommage a posteriori au colonialisme, à la présence française en Indochine. Il n’y a aucune nostalgie de ce type. On n’y trouvera pas davantage un hommage à la « juste lutte du peuple vietnamien contre l’impérialisme américain, selon le vocable connu de la propagande officielle. Tout au contraire, François Lelord fait se poser les bonnes questions à ses personnages : ainsi, le Docteur Dàng s’interroge sur le sort que son pays aurait pu connaître si la diplomatie internationale avait évoluée autrement. Fleur, cette étudiante au service du régime, est bouleversée par la lecture du Chagrin de la guerre de Bao Ninh, ouvrage qui remet en cause bien des clichés entretenus par le régime sur le pouvoir d’unification de la guerre chez le peuple vietnamien. Il y a aussi toute une série d’observations sur le mode de relation des Vietnamiens, sur l’art de ne pas dire l’essentiel dans les conversations.

Autre constat : l’auteur souligne à maintes reprises dans le roman l’influence qu’a exercée le christianisme sur le Vietnam. Ces rappels ne procèdent pas d’une volonté de réévaluer le bilan de l’histoire, ils sont factuels et nous convainquent de la nécessité de considérer les actions humaines dans leur globalité, sans s’attarder en vain sur leur caractère positif, ou négatif …
Julien a aimé Lumière d’Automne en raison de l’éloignement de cette jeune femme de son propre univers : « Dès leur première rencontre, il avait senti une délicatesse, un souci de ne pas s’imposer, mais sans timidité non plus (…) En voyant la dureté du monde d’où elle venait, ses douces qualités l’émerveillaient. » Un roman qui emporte l’adhésion par la vérité de ses personnages, leurs interrogations, leur fragilité. Tout cela nous les rend proches, humains.

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1 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 12 décembre 2014

Je n'ai pas été convaincu par ce livre.
Une histoire un peu facile à mon goût et un texte terne.
J'ai eu l'impression qu'il s'agissait d'un livre de kiosque qu'on lit entre deux gares et qu'on abandonne sur la banquette du train.
Ce n'est que mon avis bien-sûr et je m'en excuse auprès de ceux qui ont aimé.

un bon moment

6 étoiles

Critique de Clacla44 (, Inscrite le 4 mars 2011, 35 ans) - 19 mai 2014

Je viens de découvrir cet auteur et ce roman. Il est bien construit, rythmé et se lit facilement. Pour ceux qui ne connaissent pas la culture vietnamienne, ce livre peut être une première approche. J'ai bien aimé cette lecture mais j'aurais apprécié des descriptions un peu plus détaillées sur les paysages et les coutumes de ce pays.
Bonne lecture

Un beau voyage

10 étoiles

Critique de Pierre Ier de Serbie (, Inscrit le 9 janvier 2014, 49 ans) - 9 janvier 2014

Je connais et apprécie la série Hector de cet auteur qui raconte comme un conte la vision du monde et du bonheur par un psychiatre. J’étais donc à la fois curieux et sceptique sur ce passage à la fiction romanesque. Un peu comme quand un acteur qu’on aime se met à vouloir être chanteur. C’est le thème Vietnam qui m’a décidé à entamer la lecture de la Petite Marchande et je dois reconnaître ne pas avoir lâché le bouquin du week-end.

Nous sommes à Hanoï dans le milieu expatrié. Julien est un médecin qui va se retrouver confronté à une terrifiante et mystérieuse épidémie. Une course contre la montre s’engage alors entre le virus mortel et les scientifiques. Grâce à la petite marchande, Julien va découvrir un autre Vietnam à la fois dur, policier et terriblement attachant. L’auteur nous fait voyager dans les rues débordantes de vie, dans la gadoue des villages du Nord. Les personnages comme l’amante anglaise Cléa, le professeur Deng, la jeune professeure de vietnamien, Pierre le manager de grand hôtel ou ce diplomate amateur d’amours tarifés prennent forme devant nous et sont presque physiquement présents. Le style simple et efficace d’Hector se retrouve dans une écriture fluide et aboutie à laquelle il est difficile de rester insensible. La description d’une grande poésie de la nuit dans la montagne et de certains ciels nuageux sont de grands moments. J’ai aussi beaucoup aimé la vision pleine d’humour du milieu expatrié qui parlera à tous ceux qui ont connu cette vie d’expat.

La Petite marchande est un billet aller-simple pour le Vietnam sans les grèves ni le décalage horaire. Dès la première page, vous vous envolez avec la belle « Lumière d’automne » assise vos côtés, la menthe des rouleaux de printemps est fraîchement cueillie du matin et l’Airbus de la Vietnam Airlines survole les rizières et est en train d’amorcer sa descente vers Hanoï.

Un beau voyage commence…

Finesse et délicatesse

10 étoiles

Critique de Pascale Ew. (, Inscrite le 8 septembre 2006, 56 ans) - 2 août 2013

Trieb a très bien décrit ce roman qui est un petit bijou. Je rajouterais seulement que cette histoire est écrite toute en finesse et délicatesse, empreinte d’une réelle connaissance du Vietnam, de ses habitants et de ses mentalités et coutumes. Cela fait plaisir ! On sent très bien que l’auteur sait de quoi il parle car il est lui-même médecin et a vécu au Vietnam. Il aborde la politique communiste et le drame de la guerre américaine à de nombreuses reprises en offrant son point de vue : les Américains n’en voulaient pas aux richesses du pays, mais voulaient éviter le communisme, qui laisse encore quantité de traces dans les comportements de l’administration et du pouvoir.
J’aime aussi les réflexions de l’auteur sur la foi, et à vrai dire, toutes ses réflexions sur les relations interpersonnelles, car elles sont pléthore dans ce livre.
L’histoire est très bien construite. C’est un vrai bonheur et un petit bijou !

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