Confidences auvergnates de Jean Anglade

Confidences auvergnates de Jean Anglade

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par CC.RIDER, le 17 janvier 2013 (Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 295ème position).
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Une Auvergne disparue

Né en 1915 à Thiers, capitale de la coutellerie auvergnate, Jean Anglade s'est retrouvé orphelin à l'âge de un an, son père ayant été tué sur le front de la Somme. Issu d'un milieu très modeste (sa mère était femme de ménage et son beau-père charretier), il est bon élève et devient d'abord instituteur après une formation classique à l'école normale. Il fait son service militaire dans un corps de météorologie et est mobilisé en 1939 lors de la drôle de guerre. Sa seule blessure sera un arrachage de dent un peu pénible. Son unité s'étant retrouvée en Bigorre au moment de l'armistice, il est démobilisé sans problème. Il n'a plus qu'à rentrer chez lui, à rejoindre sa femme et sa fille et à reprendre son métier d'enseignant. Il poursuivra encore des études afin de devenir professeur d'italien d'abord à Tunis puis à Clermont-Ferrand avant d'entamer la longue et prolifique carrière littéraire que l'on sait.
Ces confidences sont un long témoignage plein de vie et de tendresse pour la longue galerie de personnages qu'Anglade nous fait découvrir : le père prématurément disparu et qu'il recherche toujours, l'oncle coutelier dans son petit atelier, la grand-mère gâteau et tant d'autres. Des pages vivantes, captivantes, des périodes troublées, de la Première guerre mondiale aux évènements de Mai 68 en passant par l'entre-deux guerres, la Seconde guerre mondiale et l'Epuration. Le principal intérêt réside peut-être dans l'évocation de cette Auvergne d'autrefois avec ses coutumes, son patois, son mode de vie si particulier et ses mille activités de petites gens pauvres et besogneux. Tout un monde disparu et recrée par ces souvenirs vécus. Bien sûr, cet ouvrage très intimiste n'est certainement pas le meilleur du grand écrivain, mais il permet de mieux connaître le parcours de l'auteur.

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Poignantes et truculentes confidences

10 étoiles

Critique de Alceste (Liège, Inscrit le 20 février 2015, 63 ans) - 29 janvier 2018

Jean Anglade a désormais achevé en douceur sa vie longue de 102 ans. C’est l’occasion de se replonger dans ces passionnantes confidences auvergnates, tantôt poignantes, tantôt truculentes, et qui montrent combien, au début du XX e siècle, la vie rustique était dure, mais peut-être plus simple qu’aujourd’hui. Ainsi, c’est en entendant quelqu’un lui crier de loin « Eh Jean, ta grand–mère est morte », que l’enfant de 10 ans apprend le décès de celle qui l’a élevé en tant qu’orphelin de guerre. De même, lorsqu’à 13 ans, on lui fait porter des sacs de gravats « plus lourds que lui », s’il demande des gants, on les lui refuse en lui affirmant que « c’est le métier qui entre ». Et pourtant, tout cela est narré sans la moindre rancœur, sans une once de victimisation, sans mendier des séances de psychothérapie ou des antidépresseurs.

C’est un témoignage riche d’enseignements sur un certain art de vivre. On est étonné d’apprendre à quel point les dialectes étaient encore vivaces dans les campagnes jusqu’entre les deux guerres. Et on s’amuse à la description des premières séances de cinéma dans les villages, où le public se manifeste bruyamment comme à Guignol, jusqu’à l’arrivée du parlant, où il devra apprendre à se taire.

Même si la vie particulière de ce coin d’Auvergne est miraculeusement ressuscitée par le souvenir, je dois récuser l’étiquette d’écrivain régionaliste, commodément accolée à Jean Anglade comme à son père spirituel Henri Pourrat. Sur la base de leur expérience, ils ont construit une œuvre aux dimensions universelles, grâce à leur maîtrise de la langue et des images.

De son milieu paysan, il garde la bonhomie, le bon sens, mais aussi la finesse, comme le montrent les réflexions roboratives dont il pimente ses souvenirs des années 30 ou de la drôle de guerre, pendant laquelle un « ministère du Bourrage-de-Crâne fut institué, confié à l’écrivain Jean Giraudoux, ce rêveur creusois qui avait voulu nous faire croire que la guerre de Troie n’aurait pas lieu ». Il en est ainsi de la Résistance, de la collaboration ou de la Libération.

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