Une saison ardente de Richard Ford
( Wildlife)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Sous le regard du fils
Dans une petite ville du Montana, Joe, 16 ans, assiste à la séparation de ses parents. Son père, un professionnel de club de golf, a perdu son emploi et s’est engagé comme pompier pour combattre les feux de forêt tout proches. Pendant ce temps, sa mère entreprend une liaison avec un homme plus âgé, cherchant à obtenir l'approbation de son fils. Joe, qui est le narrateur témoin de cette histoire, se contente de rapporter les allées et venues de sa mère, continuant de l’aimer (comme il aime son père d’ailleurs), sans la juger, essayant de la comprendre sans y parvenir vraiment, souhaitant qu’elle retourne vers son père quand celui-ci reviendra. Comportement assez étrange pour un jeune de presque dix-sept ans dont la propre vie ressemble à un désert et qui semble accroché solidement aux jupes de sa mère.
Tout l’intérêt de cette histoire vient de la façon dont elle est racontée. Le fils agit comme un narrateur qui ne comprend pas très bien ce qui se joue sous ses yeux. Il y a donc beaucoup de non-dit. Le ton est neutre, distancié, et le style plutôt minimaliste, comme celui de Raymond Carver.
Une tristesse se dégage de cette histoire : les parents sont rendus à la croisée des chemins et ils ont eu beau courir après le mirage américain, déménageant d'une ville à l'autre, ils sont toujours devant rien. Voilà sans doute qui amène la mère à quitter son mari (qu’elle aime toujours) et à tenter quelque chose avant qu'il ne soit trop tard. Je ne vous révèle pas la fin de l'histoire.
Traduit pas Marie-Odile Fortier-Masek
Les éditions
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Une saison ardente [Texte imprimé], roman Richard Ford trad. de l'américain par Marie-Odile Fortier-Masek
de Ford, Richard Fortier-Masek, Marie-Odile (Traducteur)
Seuil / Roman
ISBN : 9782020145916 ; 0,91 € ; 20/01/1993 ; 219 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (6)
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Des mots qui voudraient réparer quelque chose de brisé
Critique de Romur (Viroflay, Inscrit le 9 février 2008, 51 ans) - 3 juillet 2016
Ce bref roman décrit la dislocation de la famille en quelques jours après la perte de son emploi par le père, sa quête de légitimité dans la lutte contre l’incendie qui ravage les Rocheuses, l’infidélité conjugale subite de la mère. Narrateur témoin et otage, Joe souffre en silence et s’efforce de maintenir le lien avec des parents qu’il aime malgré tout. Mais la destruction progresse inexorablement, parfois par bonds imprévisibles, comme le brasier poussé par le vent à quelques dizaines de kilomètres de là.
Un livre sur les difficultés de la vie, les faiblesses et la complexité des individus, les espoirs déçus, l’absence d’échappatoire dans nos existences. L’écriture est puissante et pleine de retenue, le livre terriblement humain.
Sous le feu, la cendre
Critique de Jlc (, Inscrit le 6 décembre 2004, 81 ans) - 9 avril 2012
Peut-être est-ce parce que ce passage brutal de l’enfance à l’adolescence, moment qui aurait du être un feu de bonheur absolu, se consume ici en découvertes de petites lâchetés, incompréhension de l’attitude de ses parents, fragilité des êtres qui veulent vivre mais sont incapables de se dire non à eux mêmes, silences et non-dits qui se trahissent en questionnements. « J’éprouvais ce sentiment… qui accompagne les désastres, le sentiment de voir les choses de très loin…alors qu’elles sont là, juste sous votre nez, et que vous êtes là, paralysé, impuissant. » Ici le feu n’est pas purificateur et sous l’embrasement de la forêt se cachent médiocrités et trahisons.
« Une saison ardente » est un roman de l’ambiguïté avec un père qui se fait virer sans qu’on comprenne pourquoi et Joe non plus ne comprend pas pourquoi. Ambiguë la relation de ses parents qui s’aiment encore alors que la fêlure de cet amour est pourtant inéluctable ; ambiguë la fuite du père qui part, en amateur irresponsable, combattre un incendie inexorable ; ambiguë cette mère qui s’affiche avec son amant comme pour défier ce fils qui ne choisit pas entre ses parents. « Parfois on se trompe, rien que pour se prouver qu’on est bien en vie. »
Du rêve américain, inlassablement poursuivi, ne reste au fond que cet ultime conseil donné à Joe par son père : « On peut sombrer dans le regret du passé au lieu de penser à ce qu’on peut faire pour améliorer le présent. Evite ça. » C’est pourtant le même qui lui avait dit : « J’aimerais revoir le monde comme avant. Et que tout s’arrange ».
De ce monde qui tourne à l’envers et de plus en plus vite, Joe gardera de cet incendie une fragilité qui annonce les personnages des romans de Richard Ford qui ont suivi celui-ci, écrit il y a plus d’une vingtaine d’années.
J’ai aimé ce livre pour sa sincérité, son humanité et sa tendresse. Un beau roman dont on porte longtemps, j’en atteste, le souvenir de personnages perdus dans un feu qui ne s’éteint pas.
Sobre et pénétrant
Critique de Christw (LIEGE, Inscrit le 2 février 2011, 73 ans) - 3 décembre 2011
J'ai aimé ce roman dépouillé, net, exhalant le mal-être d'un tableau d' Eward Hopper.
Par une technique très visuelle, faite de deux gestes et deux répliques pour donner une présence aux personnages, l'auteur, tout en retenue, livre un texte attachant.
On dit que la gestation d'un roman de Richard Ford est si minutieuse qu'il n'écrirait (pendant plusieurs années) qu'après notes et réflexions mûries une année durant. Savoir cela évite de penser qu'il s'agit d'un récit anecdotique.
Rien n'est simple pour les personnages tentés de renoncer à ceux qui les entourent pour ce qu'ils voudraient d'autre, ailleurs, autrement. Jerry a perdu son emploi et quitte sa famille pour trouver consistance en combattant les incendies qui ravagent le pays à l'ouest de Great Falls. Son épouse frustrée a une liaison avec un autre homme au vu et su de son fils. Celui-ci devine la fin de son enfance à travers la discorde de ses parents et s'accroche à ce qu'il peut. Cette scène où Joe parcourt seul les rues de la ville, sans but et espérant partir vers autre chose - mais quoi ? - est poignante.
Joe acquiert progressivement une lucidité, amère et résignée, pour comprendre que même ses parents font partie des autres:
« Et la leçon à tirer de presque toute expérience humaine c'est que, lorsque d'autres sont concernés, même des gens qui vous aiment, votre intérêt ne passe généralement pas en premier, et c'est très bien ainsi. »
Pas de mélodrame dans tout cela: c'est comme ça, voilà. Il y a quand même de bons moments.
Et on est sensible, jusqu'aux dernières pages, au devenir de cette famille.
La technique utilisée par l'auteur fait que les personnages semblent subir leur destinée. Ils agissent comme sous l'effet d'une soumission à un ordre des choses, parce que l'auteur laisse peu de place à l'analyse des sentiments sinon pour souligner le regard, le mot, le geste qui suscite la perplexité implicite de Joe.
Cette position en retrait de l'écrivain, qui n'entre pas dans les têtes, fait dire à Jean Wagner (Quinzaine littéraire) dans la présentation, que Ford ne se prend pas pour Dieu mais se contente d'être un romancier.
On s'explique mal pourquoi on prend goût à un récit: sans doute y-a-t-il une part de soi qui y est disposée ou préparée. Le constat pessimiste (rien n'oblige de le partager) sur les relations humaines que cet ouvrage distille insensiblement ne ternira pas mon sentiment à propos d'Une Saison Ardente. Et le découvrir à travers cette écriture sobre et pénétrante est une agréable surprise.
Eveil à la réalité adulte
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 1 mai 2009
Joe n’est pas encore émancipé. Il n’est plus tout à fait un enfant mais il ne le sait pas encore. Il va le découvrir en quelques jours et cette découverte lui sera amère, bien entendu.
« A l’automne de 1960, alors que j’avais seize ans et que mon père était momentanément sans emploi, ma mère rencontra un homme du nom de Warren Miller et tomba amoureuse de lui. C’était à Great Falls, Montana, à la grande époque du gisement pétrolifère de Gipsy. Mon père nous avait amenés de Lewinston, dans l’Idaho, au printemps de cette année-là, persuadé que dans le Montana tout le monde – des petites gens comme lui – se faisait ou allait se faire beaucoup d’argent. Il voulait saisir sa chance au vol avant que le vent ne l’emporte. »
Sur fond de drame écologique, puisque la montagne brûle, non loin, et que peu à peu, les hommes disponibles de la petite ville, Great Falls, où il vit avec ses parents s’engagent volontaires pour aller combattre le feu. Ca va être le cas de son père qui vient de se faire virer de son job de professeur de golf et qui sait qu’il ne retrouvera pas aisément quelque chose. Son père part donc, trois jours, trois jours pendant lesquelles la mère de Joe va lâcher prise et tenter de jeter les bases d’une nouvelle vie, via un autre homme, plus vieux, son employeur, Warren Miller.
Joe va assister à ce ballet insidieux, autant incompréhensible qu’explicite à ses yeux. Il va naître à la vie adulte et son cortège de petitesses, de petites lâchetés, de compromissions.
Richard Ford a traité par ailleurs ce thème dans des nouvelles de « Rock Springs » et nul doute qu’il doit y avoir échos avec sa propre jeunesse ?
C’est doux-amer, en clair-obscur, et plein de sensibilité.
Un récit quelconque et improbable
Critique de Tanneguy (Paris, Inscrit le 21 septembre 2006, 85 ans) - 30 octobre 2008
On peut laisser de côté...
Un bon auteur
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 18 janvier 2003
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