Hergé, fils de Tintin de Benoît Peeters

Hergé, fils de Tintin de Benoît Peeters

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Macréon, le 16 janvier 2003 (la hulpe, Inscrit le 7 mars 2001, 90 ans)
La note : 9 étoiles
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Hergé et l'inquiétude

"Hergé se prend pour Jésus-Christ" affirmait, il y a quelques années, un des meilleurs dessinateurs de BD belges, dans une interview à "Libération". Il est vrai que les " Beatles " pensaient de même lorsqu'ils affirmèrent à la face du monde “ qu’ils étaient aussi célèbres que Jésus-Christ "
Or, Hergé était un homme foncièrement modeste tout en ayant conscience de l'originalité, de la résonance, du retentissement et de la " finition" de son oeuvre. Le beau livre de Benoît Peeters ( 511 pages)le prouve surabondamment. N’oublions pas qu’en 1940, (il avait trente trois ans) Hergé avait déjà derrière lui des albums comme Le Lotus bleu (1936), l'oreille cassée (1937),l’Ile noire (1938), le Sceptre d'Ottokar (1939). Allaient suivre, pendant la guerre, d'autres chefs-d'oeuvre comme le crabe aux pinces d’or, l’Etoile mystérieuse, le secret de la licorne et le Trésor de Rackham le Rouge.
Hergé est aussi l’auteur de "Quick et Flupke", gamins de Bruxelles, de véritables petits bijoux de drôlerie et de surréalisme que les amateurs s'arrachent à prix d’or. Aidé par une équipe talentueuse (dont Jacques Van Melkebeke et Baudouin van den Branden de Reeth ), il crée des dizaines de personnages du plus haut cocasse, inspiré par l'humour bruxellois (la "zwanze", qui est l’art du Bruxellois des Marolles de faire accepter des énormités avec le plus grand sérieux).
Les “tintinologues" raffolent des “méchants" de Hergé, bien typés, inoubliables: Gibbons, le grand industriel américain qui bouscule un porteur de pousse-pousse( Le Lotus bleu), Mitsuhirato, agent secret de la Chine et du Japon, le lieutenant Allan, bourreau du capitaine Haddock, les frères Loiseau, antiquaires plus vrais que nature, le marchand d’armes Basil Bazaroff et les sublimes Ramon et Alonzo, toujours en dispute, à la recherche du fétiche volé(L’Oreille cassée).
Il y a les “bons", que les enfants ( petits et grands) adorent: Chester, l’ami de Haddock , l'illuminé Philipulus (Etoile mystérieuse), Bianca Castafiore, si naïve et si bonne, madame Pinson ( un vrai second rôle) et le célèbre Didi (Le Lotus bleu), fils du vieux Wang Jen Ghié, qui sauve Tintin à plusieurs reprises, Nestor, le valet naïf mais parfois très efficace.
Il y a enfin les personnage ambigus, faux, méchants, hypocrites, falots, ou dont on ne sait pas exactement à quel camp ils appartiennent : le général Alcazar, Philémon Siclone, l’explorateur Ridgewell, aux petits yeux indéfinissables et à la fléchette empoisonnée qui veut vivre avec les Arumbayas et l'incroyable Aristide Filoselle, pick pocket collectionneur.
Benoît Peeters se situe dans la grande lignée des intervieweurs, admirateurs ou biographes de Hergé: Numa Sadoul, Pierre Assouline, le philosophe Michel Serres, qui lança Hergé au sein de l'intelligentsia française, Philippe Goddin ("chronologie d'une oeuvre"), Pierre Fresnault-Deruelle , sémiologue. et nous en passons.
Benoît Peeters a eu l'insigne faveur de pouvoir consulter la correspondance entre Hergé et sa première épouse, Germaine Kieckens. Celle-ci prit une part très active dans l'élaboration de la première partie (la plus belle) de l’oeuvre de Hergé. Ce dernier lui écrit: "quelle femme admirable tu étais pour réaliser à quel point je t’étais redevable de l’oeuvre que j'ai faite, car sans cesse tu t'es effacée,de même sacrifiée, pour me permettre de me consacrer entièrement à ce que je faisais".
Germaine Kieckens était elle-même une femme pleine de vie, les pieds sur terre et assez réservée quand on lui parlait du talent de son mari: “C’était un gentil garçon, très doué pour la réclame. Il avait beaucoup de talent, mais il a eu aussi beaucoup de chance... Alors, ne venez pas nous en faire un Michel-Ange".
Peu après la fin de la guerre, Hergé entre en dépression. Son premier Mentor, l'abbé Wallez, qui a connu la paille humide des cachots après la libération, écrit à Germaine Kieckens " Georges subit une crise en raison d'un long surmenage. On ne travaille pas impunément vingt ans en étant soumis à une telle tension". Bientôt, le ménage bat de l'aile, Hergé avoue une liaison, puis une autre, Germaine Kieckens, bouleversée, s’accroche. Elle supporte mal l'officialisation de sa rupture avec l’homme de sa vie. En 1977, 17 ans après le départ du domicile conjugal de son époux, le divorce est prononcé.
Le détail de ce drame est narré par le menu dans le livre de Benoît Peeters, d'une grande richesse documentaire et affective. Ce n'est pas une hagiographie, mais ce n'en est pas loin. Vous trouverez dans ce livre des informations surprenantes que je vous laisse le soin de découvrir.

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Les éditions

  • Hergé, fils de Tintin [Texte imprimé] Benoît Peeters
    de Peeters, Benoît
    Flammarion / Grandes biographies (Paris. 1947)
    ISBN : 9782082100427 ; 15,76 € ; 11/10/2002 ; 511 p. ; Broché
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