Le déni français de Sophie Pedder

Le déni français de Sophie Pedder

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités , Sciences humaines et exactes => Essais , Sciences humaines et exactes => Divers

Critiqué par Falgo, le 6 décembre 2012 (Lentilly, Inscrit le 30 mai 2008, 85 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 670ème position).
Visites : 3 200 

Le regard étonné et consterné d'une étrangère sur la France actuelle

Sophie Pedder est journaliste économique, correspondante à Paris de la revue anglaise "The Economist". Elle y a publié dans le numéro du 31 mars 2012 un article qui a fait des vagues en France. Ce livre est une réflexion approfondie sur ce qui était alors dénoncé.
Son constat est simple, appuyé sur la campagne présidentielle de 2012 et les débuts de la présidence Hollande: la France doit impérativement et rapidement redresser sa compétitivité et commencer d'apurer sa dette. Sinon, elle s'expose à de graves déconvenues. Or, elle estime que "les candidats ont préféré l'esquive et le déni" (p.17). Son livre est un essai d'explicitation des problèmes de fond que rencontre la France et que ses élites politiques évitent de traiter.
Sophie Pedder reconnaît la spécificité du modèle économique et social français reposant sur une dépense publique forte et efficace, en cela très différente du modèle anglo-saxon. Elle apprécie à leur juste valeur ses avantages et la qualité de vie qu'ils génèrent. Et elle appuie tout de suite là où ça fait mal (p.19): "Le problème, c'est que la France a financé tous ces privilèges à crédit.....les Français ne travaillent pas assez et ne créent pas assez de richesse pour s'offrir tous ces avantages....Leur origine [des difficultés] se situe dans le choix que les dirigeants français, de droite comme de gauche, ont fait depuis trente ans de repousser sans cesse les échéances en augmentant la dette et en accumulant les budgets déficitaires."

L'auteur passe ensuite en revue les maigres efforts faits par des dirigeants sans courage politique pour maintenir les Français dans l'illusion que le pays était dans une situation normale. Elle juge les politiques menées à la fois sur un plan historique et par comparaison avec d'autes pays. Elle a l'intelligence de ne pas le faire par rapport aux pays anglo-saxons (référence toujours rejetée en France comme non-pertinente), mais avec les modèles allemands et scandinaves, plus proches du nôtre.
Cette mise en perspective lui permet de souligner les largesses et la folie des grandeurs qui caractérisent le modèle français, lequel a plutôt bien servi le pays quand tout allait bien (Les Trente Glorieuses) et le conduit aujourd'hui à des difficultés majeures. En dépit de grands atouts (natalité, qualité du système de soins, structure des revenus plus égalitaire qu'ailleurs), ses faiblesses (système scolaire peu performant, chômage endémique, difficultés d'intégration des immigrés, incohérences d'organisation et de gestion, irréfléchie opposition de l'opinion française au capitalisme -sujet sur lequel Sophie Pedder s'interroge avec effarement) lui font connaître un constant déclin économique.
Elle décrit ensuite, souvent par comparaison internationale, ce qu'il convient de faire: rejeter une posture de victimes, l'immobilisme et l'acceptation du déclin; ne pas compter (sauf exception limitée) sur l'illusion de faire payer les riches; réduire drastiquement les dépenses publiques; réactiver le marché du travail; relancer l'investissement productif; redresser la compétitivité des entreprises.
Ce résumé fait l'économie de la solide argumentation employée point par point par l'auteure, qui s'exprime dans une langue accessible, débarrassée de tout jargon économique.

COMMENTAIRE: Je retrouve largement ici les points de vue développés dans le livre de Nicolas Baverez ("Réveillez-vous"), dont le premier chapitre ("Le déni français") reprend le titre de celui-là. Les voies du redressement sont tracées. Mais pour le réaliser, il y faudrait une classe politique courageuse et cohérente, ce que ne laisse pas présager son indignité actuelle (début décembre 2012). Comme le dit Baverez, la classe politique - qui ne dirige pas le pays depuis trente ans, en dépit de ses rodomontades - attend d'être contrainte par des organismes extérieurs (Prêteurs, F.M.I., Autorités Européennes, etc.) à prendre les mesures nécessaires. Cela lui permettra de se dédouaner aux yeux des Français toujours naïfs et de les faire passer pour des victimes, ce qu'ils adorent.
Le seul bémol que je peux apporter à ce jugement positif sur cet ouvrage est que Sophie Pedder reste dans une perspective "classique" sans prendre en compte les nombreuses questions posées par la référence constante à la croissance. Sinon, excellente lecture, précise et roborative.

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6 étoiles

Critique de Isad (, Inscrite le 3 avril 2011, - ans) - 26 mai 2013

Le livre est composé d’une série de comparaisons dans divers domaines montrant combien il fait bien et bon vivre en France mais que nous le faisons à crédit depuis 1974, date du dernier budget en équilibre. L’auteure montre que l’ensemble de nos voisins ont pris conscience de cette réalité qui fait que les baby-boomers font égoïstement peser la charge d’une dette grandissante sur les générations futures. Elle suggère que nous adoptions les solutions de bon sens adoptées un peu partout : réduction du nombre de fonctionnaires et amélioration de leur efficience, suppression d’allocations familiales pour ceux qui sont au-dessus d’un certain plafond, écrêtement des allocations chômage pour les cadres là encore au-delà d’une certaine somme, ...

Elle vilipende les politiques qui cachent les faits et ne veulent pas agir, attendant le retournement de la conjoncture. Elle reproche aux médias de leur emboiter le pas, victimisant le peuple assailli de toutes parts par les « autres » et qu’il faut aider. En creux, elle déplore aussi que l’ensemble de la population, même si elle est moins dupe qu’il n’y paraît du fait qu’elle se gave d’antidépresseurs pour calmer son anxiété car elle sait qu’on ne lui dit pas la vérité, ne se batte pas pour sa liberté et se laisse faire enfermer dans ce cocon protectionniste où on pense pour elle.

IF-0513-4046

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