L'Euthanasiste ambulant de Yves Trottier

L'Euthanasiste ambulant de Yves Trottier

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Libris québécis, le 13 décembre 2002 (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans)
La note : 5 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (40 452ème position).
Visites : 4 182  (depuis Novembre 2007)

Pour que la mort ne vienne pas comme un voleur

Yves Trottier est un auteur de 29 ans. Pour écrire son premier roman, il s'est attaqué à un sujet litigieux, soit l'euthanasie. L'auteur du lac St-Jean est parvenu à relever le défi, mais il lui reste à peaufiner son écriture.
Son roman nous plonge dans un état qui a reconnu l'euthanasie à la manière des Pays-Bas. Des lois encadrent la pratique de ceux qui s'y consacrent. Avant de procéder à cet acte, il faut que le médecin détermine que le seuil de douleur soit devenu intolérable avec un «souffromètre», un gadget de science-fiction, et qu'il s'assure que le requérant ait consenti librement à son euthanasie. Là où le bât blesse, c'est que cette pratique s'étend aussi aux sans-abri, les «jetables» que l'on ne peut recycler.
Le héros, le docteur Bonaventure, est l’initiateur du projet qui a amené la reconnaissance légale de l'euthanasie. Il a agi pour que la dignité humaine soit accrue par une loi qui empêcherait la mort de venir comme un voleur. Mais il n'a pas pensé que son noble but, qu'il soutient parfois par des arguments spécieux, pouvait échapper aux dérives toujours possibles, surtout quand une telle pratique passe entre les mains de nombreux intervenants comme les fournisseurs des doses létales et les corporations syndicales, sans compter les euthanasistes qui seraient portés à étendre la loi de leur propre chef à des cas non stipulés.
C'est ce point surtout que l'auteur exploite avec assez de crédibilité. Son héros devient victime des magouilleurs et son sens aigu d'autrui le fait pécher à l'endroit d'un jeune qui veut se suicider. Sa condamnation le porte à se remettre en question, mais ses doutes disparaîtront vite quand un cancer le prendra de court. C'est ainsi que l'auteur ferme sa boucle.
À travers ses péripéties se glisse la vie amoureuse de l'euthanasiste. Vivant avec une jeune comédienne du cinéma pornographique, il mène une vie idyllique digne des plus mauvais romans Harlequin. Ce chapitre risible dépare une oeuvre qui peut se défendre.
Il est aussi regrettable qu'un conseiller littéraire ne soit pas venu assouplir l'écriture. L'auteur a peut-être voulu épater le lecteur avec des phrases ronflantes et redondantes. En somme, il a servi un menu gargantuesque dans des assiettes de carton.

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Les éditions

  • L'Euthanasiste ambulant de Yves Trottier
    de Trottier, Yves
    JCL
    ISBN : 9782894312612 ; EUR 20,10 ; 20/03/2009 ; 297 p. ; Broché
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Et si la mort était un droit ...

10 étoiles

Critique de Claude (, Inscrit le 24 mai 2004, 63 ans) - 24 mai 2004

« L’Euthanasiste ambulant » : un titre accrocheur pour un roman qui nous tient en haleine d’un chapitre à l’autre. Nous entrons dans la vie du docteur Bonaventure où s’entremêlent dilemmes moraux, amour, magouille et quotidien tranquille... Il va sans dire qu’il est quelque peu déstabilisant de constater que « donner la mort » pourrait faire partie du quotidien ! L’auteur y utilise un humour teinté d’ironie qui porte le lecteur à se questionner et à être à l’affût. C’est grâce à cette ironie, présente dans toutes les situations dans lesquelles se retrouvent les personnages, que nous passons, sourire en coin, à travers diverses réflexions et dilemmes. Et si nous avions, nous aussi, octroyé le droit à la mort ?
C’est dans un univers étrangement semblable au nôtre que l’action prend place, à la différence que le droit individuel a pris une importance prépondérante, voire essentielle. Ainsi, la relation entre Samantha – une actrice et productrice de films pornos – et le docteur Bonaventure prend tout son sens. Cette relation qui pourrait nous sembler paradoxale n’est qu’une association logique de deux êtres qui défendent une même cause : offrir une réponse à des besoins essentiels de l’humain. Intelligente et convaincue, Samantha remettra quelques fois le docteur sur la bonne voie lorsque celui-ci fera face à des dilemmes moraux… Sont ici associés la mort, sujet fort solennel, et l’amour, sujet plutôt « frivole », ce qui ne va pas sans rappeler l’alliance mythique d’Eros et Thanatos, représentants de la vie et de la mort ne pouvant exister que l’un par l’autre.
En somme : un roman complexe du point de vue moral, complet en ce qui a trait aux intrigues et à l’authenticité des personnages et délectable au point de vue de l’écriture. C’est en effet dans un français recherché et fluide - qui nous sort de l’écriture trop épurée dans laquelle la littérature perd de son art - que l’auteur nous fait plonger tout naturellement dans la vie du docteur Bonaventure, pionnier et ardent défenseur du droit à la mort (si la personne souffre « assez », bien entendu!).

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