Un homme, un vrai de Tom Wolfe
(A Man in Full)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Atlanta, une société duale
En 1000 pages, palpitantes à lire, l’auteur vous fera découvrir tout ce qui gangrène la société américaine.
Il a choisi Atlanta comme toile de fond, car, cette ville avec ses 75 % de noirs et ses émeutes raciales sert de baromètre au reste des Etats-Unis.
Tous les dysfonctionnements - ou ne sont-ce tout simplement les fonctionnements ? - de la société américaine sont passés en revue.
Le génie de l’auteur est de les brosser sous forme d'une histoire qui tient le lecteur en haleine depuis la première page jusqu’à la 1000ème, et cela grâce à une plume alerte, féroce et corrosive.
Les magouilles politiques, l'achat des électeurs, les procès bidons type OJ Simpson (pour éviter les émeutes raciales), les krachs immobiliers, les banques rapaces, vous savez, celles qui vous prêtent un parapluie lorsqu'il fait soleil et qui vous le reprennent quand il pleut, les paradis fiscaux créés pour contourner les lois, les licenciements abusifs, les travaux de forçats, sous-payés, que même les Noirs ne veulent plus effectuer (pour cela, il y a les Asiatiques clandestins), l’absence de couverture sociale si on se retrouve sans emploi, les sectes où les gourous se hissent au rang de vedette, les prisons peuplées à 80% de Noirs qui ne fabriquent que des tueurs "born to kill", où sévissent des viols systématiques et une violence sans nom, l’arbitraire de la police, les rackets des petits vieux, les paranoïaques qui se font construire des palaces avec une pièce cachée dont la famille ignore jusqu’à l’existence, les Noirs, considérés comme "simples d’esprit" mais dont les Universités ont besoin pour gagner des matchs et. du fric, en un mot une jungle où la seule pensée de devoir y vivre vous donne déjà froid dans le dos.
Quant aux personnages, on éprouve quelque tendresse pour eux.
Malgré leur appétit du gain ou du pouvoir, leur esprit étriqué de petit blanc raciste et intolérant "On devrait mettre des cloches à ceux qui ont le sida pour que les gens puissent les entendre arriver et se barrent de leur chemin", l'auteur nous en dévoile tellement sur chacun d'entre eux qu’on arrive à les excuser..
Riches ou pauvres, ils ont tous eu leur lot de malheurs.
Chacun à sa manière essaie de s’en tirer, l’un en rêvant de reconnaissance, l’autre en s'attachant un conjoint pour être reconnu
"Qui était cette femme superflue ? Qui était cette invisible femme ? Qui était ce fantôme social sans un mari à côté pour lui donner une identité ?".
Mon héros préféré, dans cette histoire, c'est le petit ouvrier pathétique aux mains énormes d'avoir transporté des colis frigorifiques de 40 kilos par moins 20° et qui se fait injustement licencier, injustement emporter sa voiture, injustement attaquer, injustement jeter en prison, injustement harceler et qui s'en sortira grâce à un livre lu par erreur "Les Stoïciens" d'Epictète.
Comme ajoute Mark Harris - Entertainement Weekly : "Un roman imposant, d'une ambition spectaculaire, superbement observé, et d'une drôlerie impitoyable"
Les éditions
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Un homme, un vrai de Tom Wolfe
de Wolfe, Tom
R. Laffont / Pocket
ISBN : 9782266100113 ; 2,10 € ; 08/06/2000 ; 1010 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (7)
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Du grand Wolfe
Critique de Anna Rose (, Inscrite le 3 octobre 2006, 52 ans) - 3 septembre 2015
ça change et ça dérange
Critique de Antihuman (Paris, Inscrit le 5 octobre 2011, 41 ans) - 28 avril 2013
Tel de toute façon ce Charlie Croker, ce patron exemplaire - qu'on a dépouillé, selon lui, presque de tout; il faut noter que le lecteur découvre l'histoire avec le puzzle de l'intrigue, après les 20 actes du début, groggy d'un coté ou d'un autre, et pendant qu'il tente de rassembler les morceaux. Car la plume est sans doute acide mais également consciente de toutes les irrégularités... Sinon le roman met pas mal de temps à démarrer et doit surtout son moteur narratif aux aventures de Conrad Hensley, une sorte de "working-class hero" qui peine tout le long à obtenir quelque rédemption. Enfin, on appréciera la suite si tout cela n'est en fait que très typique de la ligne directrice des livres de l'écrivain-journaliste, classique mais assez peu renouvelée.
Long, trop long, mais...
Critique de Bookivore (MENUCOURT, Inscrit le 25 juin 2006, 42 ans) - 16 octobre 2010
Le pouvoir, pour vrai ?
Critique de Martell (, Inscrit le 27 février 2004, 61 ans) - 9 août 2008
Un grand roman
Critique de CC.RIDER (, Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans) - 31 août 2007
Ex-star de football, richissime promoteur immobilier à qui tout a réussi, Charlie Crocker, 60 ans, est un des maîtres d’Atlanta. Il est malheureusement au bord de la faillite pour s’être lancé dans des projets pharaoniques qui se sont révèlés calamiteux.
Conrad Hensley, jeune père de famille prolétaire et idéaliste, perd son emploi de magasinier dans un entrepôt frigorifique appartenant à Crocker, suite à une compression de personnel. Très vite la machine s’emballe et Conrad se retrouve au fond du trou, une monstrueuse prison californienne où il découvre par hasard Epictète et la philosophie stoïcienne…
Tels sont les trois points de départ d’une fresque sociale aussi féroce qu’inoubliable. Wolfe nous fait découvrir avec un même mordant l’avidité, l’hypocrisie et le snobisme de la haute société d’une part, la bassesse, la décrépitude morale et la lâcheté des bas-fonds d’autre part. (La description de la vie dans la prison, parfaitement documentée, est à dresser les cheveux sur la tête…)
Ce roman digne des plus grands (Balzac, Dostoïevski) est bâti comme une merveilleuse mécanique de précision. Tout s’enchaîne implacablement et de manière souvent surprenante. Les destins s’entrecroisent, les ambitions s’affrontent, les complots se trament, les pires instincts se déchaînent jusqu’au dénouement inattendu, mais logique. Les personnages sont humains, attachants, croqués sur le vif. Un coup de cœur pour Conrad, l’ouvrier idéaliste dont on suit le terrible chemin de croix et un œil finalement attendri pour Charlie, sympathique crapule que les épreuves amènent à une sorte de rédemption.
Ce livre à l’humour féroce aborde sans tabou aucun tous les problèmes de la société américaine actuelle : prégnance insupportable de l’argent et du matérialisme, totalitarisme de l’anti-racisme et du politiquement correct. Basé sur un véritable travail d’enquête et d’investigation, ce livre magistral est l’œuvre d’une plume lucide, libre et…géniale. Alors, Wolfe, plus grand écrivain américain vivant ? Sans aucun doute !
Un philosophe, un vrai
Critique de Mae West (Grenoble, Inscrite le 26 décembre 2004, 73 ans) - 6 janvier 2005
C'est l'histoire d'un mec ..
Non en fait c'est l'histoire de deux mecs .
Le premier, Charlie Croker, est un businessman dans toute sa splendeur : il possède des usines, des immeubles, une immense propriété dans le New-Jersey, des domestiques (noirs) des chevaux (de race), un jet (personnel) avec pilote (fidèle), une femme (vieillissante), une maîtresse (jeune) .
Le second, Conrad Hensley, travaille dans une usine de surgelés appartenant au premier : marié, une femme, deux mômes, petit appartement, et, pour couronner le tout, une belle-mère qui le méprise parce qu'il a des "doigts comme des gigots", et des traites à payer .
Suite à un conseil d'administration mémorable, Charlie Croker, au bord de la faillite, décide de réduire la production de surgelés plutôt que de vendre son jet : s’ensuit un " plan social ", qui va mettre Conrad au chômage. De guigne en guigne, Conrad se retrouve en prison pour avoir cassé la figure antipathique d'un gardien de fourrière et pour n'avoir pas voulu plaider coupable, puisque ne se sentant pas coupable.
Totalement immergé dans le bain corrosif de la violence carcérale, il se sent à la fois incongru et menacé en permanence : plutôt intello, par comparaison ; il commande par correspondance un roman policier "le jeu des stoïciens" mais, par erreur, la librairie lui expédie un livre qui raconte la vie et l’enseignement d’ Epictète :"les Stoïciens" .
Le gardien arrache la couverture cartonnée, susceptible dans ce contexte d'être transformée en objet contondant, aussi Conrad ne se rend pas compte de la méprise et commence à lire. Malgré le charivari permanent des prisonniers de droit commun, il lit, et plus il lit, plus il se passionne : Epictète "lui parle", Conrad se reconnaît en lui.
Un roman ambitieux
Critique de Heyrike (Eure, Inscrit le 19 septembre 2002, 57 ans) - 3 janvier 2005
Son ex-femme, Martha, lutte pour continuer d'exister dans cette ville où plus personne n'osent la reconnaître lorsqu'ils la croisent, alors qu'il n'y a pas si longtemps elle était encore la femme respectable de l'illustre promoteur immobilier Charlie Croker. Devenue la femme superflue, elle lutte quotidiennement durant des séances de gymnastique impitoyable pour effacer les traces du temps qui passe. Elle sait pourtant qu'il est vain de vouloir rivaliser avec toutes ces jeunes femmes qui suent sang et eau pour ressembler à des garçons avec des seins.
L'avocat noir, Roger II White, sait qu'il est promis à un bel avenir. Tout comme il sait qu'il est difficile de trouver sa place au sein de cette ville divisée entre les deux communautés blanche et noire. Depuis le lycée, où il fut surnommé Roger Too White (Trop Blanc), il se sait prisonnier des rapports difficiles entre celles-ci. Soucieux d'être à la hauteur de son rang social et professionnel, il craint en permanence d'être perçu comme un individu trop soumis au modèle blanc, et de donner ainsi l'impression qu'il trahit sa communauté. Ce jour là, alors qu'il se rend chez l'entraîneur de l'université de Georgia Tech pour y rencontrer la star du football, Fareek Fanon, Roger ne sait pas encore qu'il va être confronté à la plus grande crise politique et sociale qu'ait connu Atlanta depuis longtemps.
Le poste qu'occupe Ray Peepgass au sein de la PlannersBanq ne lui permet pas, malgré un salaire élevé, d'assurer un train de vie luxueux, les frais engendrés par son divorce et le procès en paternité intenté par la perfide Finnoise rencontré au cours d'un séminaire. Le fait qu'il se sente en plus méprisé par ses collègues de la banque ne fait qu'accentuer son amertume. Pousser par l'idée de revanche, il échafaude un projet pour souffler la tour de Charlie Croker à la PlannersBanq. Mais pour cela il lui faut trouver des associés, à commencer par Martha ex-Croker.
A 5000 kms de là, dans la baie de San Francisco, un homme travaille comme un forcené dans un entrepôt de distribution de produits congelés par une température de moins 18°, la Croker Global Foods. Malgré les conditions de travail très difficile, Conrad tient le coup car il espère bien acquérir une maison sur un petit arpent de bonheur où lui et sa famille pourront vivre paisiblement. Mais les récentes difficultés financières de son employeur vont ruiner tous ses espoirs. Dans sa lutte pour préserver sa dignité et ses rêves, Conrad va connaître le chaos de la déchéance et de l’absurde.
Un roman ambitieux où le cours des évènements se mêlent et se démêlent sur fond de crise raciale, menaçant de mettre la ville d'Atlanta en feu. L’auteur orchestre magistralement les destins des personnages en maniant avec prouesse l’art du récit et dresse par la même occasion un portrait au vitriol d’une société cosmopolite profondément divisée par la couleur et l'argent. Une histoire prenante et très bien écrite, qui permet au lecteur de dévorer ce pavé de plus de mille pages sans difficultés.
Une galerie de portraits tous plus fascinants les uns que les autres. Le mégalomane et pathétique Charlie Croker totalement abasourdi lorsqu'il comprend que l'ascenseur social fonctionne dans les deux sens. Martha ex-Croker terriblement éprouvé par la perte de reconnaissance sociale. Roger White, en homme épris de justice, est terriblement conscient qu'il demeure prisonnier des antagonismes des deux communautés. Peepgass obscur petit rouage de la PlannersBanq qui attend son heure de gloire en allant charmer la pauvre Martha dans son vieux costume élimé. Et le déterminisme de Conrad, certainement le plus sympathique d'entre tous, qui, après avoir perdu le contrôle de sa vie par la faute d'intérêts supérieurs, est précipité contre le mur des sacrifiés, et malgré tout acquiert la force de résister face l'adversité en suivant les préceptes d'un certain Épictète.
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