Viviane Elisabeth Fauville de Julia Deck
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Conte de la folie ordinaire
Viviane Élisabeth Fauville sort de chez son psy en courant : elle vient de l'assassiner et elle doit récupérer le bébé qu'elle a laissé dormir dans le tiroir de la commode de sa chambre d'hôtel.
Voilà, ce pourrait être le résumé de cette petite histoire étrange que nous conte Julia Deck.
[...] Vous avez répondu non, c’est moi qui m’en vais. Garde tout, je prends l’enfant, nous n’aurons pas besoin de pension alimentaire. Vous avez déménagé le 15 octobre, trouvé une nourrice, prolongé votre congé maternité pour raison de santé et, le lundi 16 novembre, c’est-à-dire hier, vous avez tué votre psychanalyste. Vous ne l’avez pas tué symboliquement, ainsi qu’on en vient parfois à tuer le père. Vous l’avez tué avec un couteau de marque Henckels Zwilling, gamme Twin Profection, modèle Santoku. « Le tranchant de la lame, d’une géométrie unique, offre une stabilité optimale et permet une coupe aisée », précisait la brochure que vous étudiiez aux Galeries Lafayette tandis que votre mère sortait son chéquier.
Parce qu'il faut dire que Viviane Élisabeth Fauville est un peu givrée, un peu fêlée, et qu'elle donnera du fil à retordre à la police qui va peiner à démêler le vrai du faux.
Et tout comme la police, le lecteur va se faire balader ...
Avec cette écriture sèche, à la précision entomologique, qui épingle la folie ordinaire et marque la distance sans rien épargner du fin fond de l'âme.
Avec cet usage étrange des pronoms qui met d'emblée le lecteur dans la peau de Viviane (vous ...) et puis qui vous en éloigne (elle ...) et qui nous en rapproche à nouveau (nous ...).
Qui donc est Viviane Élisabeth Fauville ? Folle ou pas ? Elle ou nous ?
Déjà plus mariée, pas vraiment mère, pratiquement sans boulot, Viviane Élisabeth Fauville erre en désordre dans Paris.
Un premier roman très réussi, publié par les prestigieuses Éditions de Minuit où sévit également Échenoz dont on parle souvent et qu'on aime beaucoup : on verrait bien Julia Deck en petite soeur d'Échenoz.
Pour celles et ceux qui aiment les histoires de fous.
Les éditions
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Viviane Élisabeth Fauville [Texte imprimé] Julia Deck
de Deck, Julia
les Éditions de Minuit
ISBN : 9782707322401 ; 14,50 € ; 06/09/2012 ; 154 p. ; Broché
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Les critiques éclairs (9)
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Pas trop.
Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 24 mars 2016
L'auteur crée un désordre dans son récit, sans doute pour instaurer un climat de doute.
Je n'ai pas été convaincu.
Le cas Viviane Elizabeth Fauville
Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 2 juin 2015
Julia Deck fait état de ses comportements erratiques , sans en délivrer, en dénouement, la raison , laissant à son lecteur le soin de reconstituer le puzzle, de forger lui-même son propre jugement .
Le récit de ses tribulations et de son naufrage que l’on suit à la trace dans les rues de Paris, ballottée qu’elle est entre bébé, époux, employeur, psychanalyste, police, m’a fait passer un agréable moment de lecture . Je me suis sentie embarquée, secouée au gré de ses dérives et de ses errances, déstabilisée par le jeu des pronoms personnels , passant du « je » au « tu », puis au «vous» comme un témoin pris parfois à partie , puis laissée finalement à l’abandon , ayant perdu mes repères, seule à juger du cas Viviane Elizabeth Fauville .
C’est bon, de temps à autre , de se sentir sollicitée pour faire la moitié du chemin dans la compréhension du personnage , même si celui-ci conserve finalement une part d’opacité .
Des trajectoires intégralement desservies par la RATP !
Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 59 ans) - 27 mai 2015
Après avoir été responsable de communication dans plusieurs groupes, elle quitte ses fonctions pour se consacrer à l'écriture.
En 2012, elle publie son premier roman «Viviane Elisabeth Fauville» aux Editions de minuit.L'accueil du livre en fait l'une des révélations de la rentrée.
Viviane Elisabeth Fauville- épouse Hermant- a 42 ans. Elle est responsable de la communication de la société Bétons Biron. Elle vient de se séparer de son époux, a quitté le domicile conjugal avec le bébé.
Lors d'une consultation tardive chez son psychanalyste, elle le poignarde à mort et rentre chez elle pour retrouver son bambin laissé seul...
Viviane Elisabeth Fauville ne sait pas pourquoi elle fait ce qu'elle fait. Elle habite un corps par de brèves intermittences.Sa mémoire est devenue un trou et des milliers de mouches s'envolent à l'intérieur de son crâne.
Viviane Elisabeth Fauville est l'esclave de la nécessité, le jouet des circonstances.
Une bombe prête à exploser, encore et encore...
Un roman incroyablement original à tout point de vue.
Un style unique, impliquant le lecteur. De courtes phrases aseptisées, cliniques, hyper descriptives comme pourrait l'être un rapport médical, un compte rendu d'enquête de police.
Factuel, uniquement factuel...
L'auteur "balade" le lecteur à ne plus savoir qui est Viviane. Une folle ? Vous ? Moi ? Madame tout le monde ?
Un ouvrage court, envoûtant, dérangeant.
De la littérature comme je l'aime...
EXCELLENT !!!
À la dérive
Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans) - 22 mars 2015
Si la fabrication du mystère est parfois réussie, dans l’ensemble les motivations de Viviane qui l’amènent à prendre action ne sont pas claires et semblent sorties de nulle part. De même, puisqu’elle n’est pas complètement folle, il est étonnant de constater l’absence de la moindre lueur de lucidité de sa part. Il aurait été plus intéressant de lire qu’elle soit consciente de sa maladie mentale et parfaitement habile à la dissimuler.
Un roman avec de belles idées mais plutôt flou et froid comme son personnage principal.
Aux franges de la folie
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 19 février 2015
« Vous êtes Viviane Elisabeth Fauville, épouse Hermant. Vous avez quarante-deux ans et, le 23 août, vous avez donné naissance à votre premier enfant, qui restera sans doute l’unique. Vous êtes responsable de la communication des Bétons Biron. L’entreprise Biron gagne beaucoup d’argent, elle occupe un immeuble de huit étages rue de Ponthieu, à deux pas des Champs-Elysées. Dans le hall, des hôtesses d’accueil souples et collantes comme les lanières en plastique des anciens rideaux de cuisine font patienter les visiteurs avec des trivialités équivoques.
Votre mari, Julien Antoine Hermant, ingénieur des Ponts et Chaussées, est né il y a quarante-trois ans à Nevers. Le 30 septembre, il a mis fin à deux ans d’horreur conjugale. Il a dit Viviane, rentré à pas d’heure de son soi-disant bureau d’études, Viviane je te quitte, il n’y a pas d’autre solution, de toute façon tu sais que je te trompe et que ce n’est même pas par amour mais par désespoir. »
(vous aurez remarqué au passage le « vous ». C’est vous qui êtes Viviane Elisabeth Fauville.)
Elle suit d’ailleurs une analyse avec le Docteur Jacques Sergent, écrivai-je. Non. Elle suivait, puisque dès le départ, nous comprenons que nous avons tué le Docteur en question. Avec un couteau de cuisine, après avoir laissé seule la petite fille dans son berceau.
Viviane n’est pas une meurtrière « professionnelle », elle n’a conçu son geste que dans l’urgence et n’a pas vraiment pris de précautions. D’ailleurs elle est très vite convoquée par la police – à titre de patiente. Et la situation commence réellement à devenir bizarre, à échapper au lecteur. Comme un napperon mal centré sur un guéridon qui commencerait lentement à glisser et dont on comprend bien qu’il va finir par tomber.
C’est qu’elle va s’acharner à rencontrer celles et ceux qui sont concernés par l’enquête ; intimes, autres patients, comme si elle avait besoin de faire le point sur ce qu’ils ont dit à la police. C’est que manifestement, elle déraille par moments …
Viviane Elisabeth Fauville va tomber. Enfin, pas vraiment … ou un peu …
En dire plus serait trahir le texte. Texte qui est court par ailleurs : 155 pages, c’est vite lu. Et c’est plutôt du genre à être dévoré !
Opaque
Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 15 février 2015
Convoquée au commissariat, elle repart libre mais va s'intéresser aux personnes dans l'entourage de celui-ci. Provoquant des rencontres plus ou moins brutales, on la suit dans ses périodes d'intense agitation comme dans ses moments de léthargie où elle se balance dans son rocking-chair avec sa fille.
Femme étrange, sans démonstration affective pour son enfant. L'impression d'un colis dont elle assurerait la garde, ou comme un alibi, une monnaie d'échange ou de pression envers la société, les policiers, son ex-mari.
Très déroutée par l'alternance des pronoms personnels ("Heureusement, je suis là"), j'avoue ne pas avoir aimé ce roman. La distance, la froideur du personnage comme de l'écriture m'ont empêchée de prendre du plaisir à cette lecture. Néanmoins je reconnais le talent de l'auteure pour nous emmener dans la folie de son héroïne et pour créer la surprise finale.
dérapage tout en souplesse
Critique de Ellane92 (Boulogne-Billancourt, Inscrite le 26 avril 2012, 49 ans) - 24 janvier 2015
Viviane Elisabeth Fauville, c'est moi, c'est toi, c'est elle, c'est vous… Facile en tout cas de se reconnaître dans cette femme quarantenaire et jeune maman, cadre supérieur et en cours de divorce. D'ailleurs, l'auteure ne s'y trompe pas et n'hésite pas à utiliser alternativement le vous, le je, le tu, etc… Ce procédé qui déstabilise le lecteur déstructure également la narration, à l'image de l'esprit Viviane.
Ce petit livre intelligent évoque avec beaucoup de brio les difficultés d'être une femme aujourd'hui. Etre une mère aimante, c'est possible. Une épouse comblée, ça arrive. Avoir une carrière brillante, pourquoi pas. Ce qui est compliqué, bien sûr, c'est de se transformer en Wonder Woman qui mène tout de front à la perfection. Sans compter l'injonction sociétale à "se réaliser", à être heureuse. Car à moment donné, il y a toujours une petite poussière qui vient enrayer la belle logistique qui ne tient finalement qu'à un fil. Dans ce cas, on peut consulter un psy. Ca arrive, et des fois aussi, c'est utile. D'autre fois, on peut tomber sur un charlatan, qui nous prend de haut et dont l'objectif est d'assécher votre compte en banque.
Des fois, rien ne va plus, mais on ne peut pas rester assise sur sa chaise à bascule, en regardant son bébé dormir. Alors on la laisse dormir toute seule dans sa chambre, en vérifiant qu'elle n'aura pas froid et en s'assurant par des moyens que les autres réprouveraient qu'elle ne se réveillera pas. Et on fait des choix. De préférence les plus mauvais. On ne fait pas exprès, mais il y a des moments où l'on n'est plus capable de prendre du recul, de réfléchir aux conséquences de ses actes. Et puis on s'auto-flagelle, en forçant la rencontre avec ceux qui fréquentaient le psy poignardé, sa femme, sa maîtresse, d'autre encore…
Viviane Elisabeth Fauville, c'est moi, c'est toi, c'est elle, c'est vous ; c'est un peu de nous, un nous possible, un nous en devenir, si jamais un grain de poussière venait à enrayer la belle logistique de notre vie qui ne tient finalement qu'à un fil.
Une très belle découverte !
Elle ne se rappelle plus très bien comment regagner son domicile, quelle ligne de métro ou d'autobus l'y conduirait le plus sûrement. Elle se souvient que ses bras sont vides et qu'il y manque l'enfant dont c'est la place.
Personnage troublant
Critique de Aliénor (, Inscrite le 14 avril 2005, 56 ans) - 31 mai 2013
Dès lors, notre histoire devient moins classique. Et là où Juila Deck l’est moins encore, c’est dans sa manière de tricoter le récit. Le narrateur passe en effet alternativement du « vous » au « elle », voire au « je », accentuant les profonds déséquilibres de cette femme. Cet effet de style a pour conséquence de rendre ce personnage en mal d’identité de plus en plus inquiétant, au point que le lecteur s’interroge au final sur la réalité des faits qui lui ont été racontés.
Comme dans un roman noir, la tension monte et le trouble s’installe. Et à l’issue de la lecture des questions subsistent, au point d’être tenté de relire ce récit pour être sûr d’en avoir bien saisi toutes les subtilités. Un seul bémol pour moi, le choix de l’auteure quant à la conclusion de l’histoire. Mais il n’en demeure pas moins que cette lecture a été un coup de cœur, et que ce premier roman, d’une grande originalité dans sa forme, est très prometteur.
Une femme de son temps
Critique de Stavroguine (Paris, Inscrit le 4 avril 2008, 40 ans) - 12 février 2013
« Comme tout le monde », c’est ce que se disent les flics devant cette vieille jeune maman désemparée qui répond mal à leurs questions quand ils la convoquent à propos de l’assassinat de son charlatan de psy qui, comme tous les psys, la fidélise en répondant des « oui » mystérieux à chacune de ses confessions et la soulage de son argent depuis des années où elle se rend chez lui en cachette, comme son mari chez sa maîtresse. « Elle », c’est Viviane Elisabeth Fauville. Et Viviane Elisabeth Fauville, c’est vous sous la plume de Julia Deck, qui connaît bien le lectorat des Editions de Minuit.
Lesquelles Editions de Minuit réalisent une très bonne pioche avec ce premier roman rédigé avec une écriture sèche et déjà très Minuit, à couper au couteau comme on découpe un psy. Julia Deck nous balade dans Paris et la tête un peu fêlée de son héroïne, qui en est finalement moins une qu’elle n’apparaît comme l’égérie de la femme moderne, qui jongle constamment entre ses rôles de cadre supérieur, de mère, de femme au foyer, d’amante et surtout dangereusement avec la folie dans une société qui continue d’être dirigée par des psys, des patrons et des maris. Viviane Elisabeth Fauville nous interprète la complainte de la femme moderne tiraillée entre ses envies de meurtre et de tout envoyer valser. Et comme on la comprend !
A la fois farce sordide jubilatoire et tragi-comédie moderne, uppercut et coup de surin, c’est un roman de femme sur une société qui n’a d’égalitaire que le nom, et c’est un sacrément bon défouloir ! A lire !
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