Alexandre Borodine, 1834-1887 de Nina Nikolaevna Berberova
(BORODINE)
Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances , Arts, loisir, vie pratique => Musique
Un Savant compositeur et un Compositeur savant !
Nina Berberova, auteure russe née à Saint-Pétersbourg en 1901 et décédée en 1993, écrivit cette biographie de Alexandre Borodine en 1937 après avoir achevé celle de Tchaïkovski. Son goût pour la musique et les musiciens se retrouve également dans ses romans l’Accompagnatrice et La résurrection de Mozart.
Elle le signale en préface : Autant pour celle de Tchaïkovski elle avait pu rencontrer des personnes ayant connu le musicien, autant pour Borodine elle s’est « contentée » de documents comme des lettres, journaux, articles publiés entre 1928 et 1934 dans la collection Académia principalement. Collection, elle le précise, qui a disparu en 1937 ses créateurs ayant été « réduits au silence » et certains même « liquidés ».
Cette très courte biographie est une vraie rencontre avec Alexandre Borodine. Ce compositeur né en 1833 et décédé en 1887 était membre de ce qui fut appelé le « groupe des cinq » avec Rimsky Korsakov, César Cui, Moussorgski, Balakirev, tous compositeurs russes autodidactes.
C’est un portrait vivant, un vrai petit roman, qui pénètre dans la vie de cet homme, fils naturel d’un prince tartare, qui fut musicien violoncelliste et compositeur parallèlement à ses métiers de chimiste de grand renom, de professeur et de médecin.
Nina Berberova réussit la performance d’embrasser l’homme et le compositeur dans une centaine de pages. Elle nous raconte l’enfant aimé et tendre, l’homme d’une grande bonté qui recueillait les indigents et même les truands malades, le grand savant, le musicien génial qui ne faisait pourtant pas grand cas de son génie considérant son attrait pour la musique presque comme un passe-temps. Il se qualifiait lui-même, selon Balakirev, de « compositeur qui aspire à rester inconnu… ».
Je ne veux pas raconter cette vie car ce serait déflorer l’œuvre de Nina Berberova dont l’écriture et le style en font une biographie originale, très personnelle mais appuyée sur des faits exacts, ou l’on rencontre les musiciens du « groupe des cinq » dont certains portraits sont saisissants et non dépourvus d’humour :
« Oui, c’était Modest Moussorgsky, mais avachi, aux yeux écarquillés, aux grandes joues pâles. Son linge défraîchi, son gilet de couleur parsemé de cendres de papiroses »
Si la forme fait penser à un roman cette biographie n’est cependant pas du tout romancée.
Borodine est un compositeur original et très attachant, à l’image de sa musique raffinée (« La petite suite » série de pièces pour piano), expressive et romantique (quintette à corde en fa mineur ; quatuor n°2 en ré majeur), porteuse des voix de son pays en offrant un mélange de musique russe populaire et orientale avec des formes musicales puissantes aux élans souvent héroïques (Les deux symphonies, le poème musical « Dans les steppes de l’Asie centrale »).
Mais l’œuvre dans laquelle il s’investira et qui fera sa renommée est bien « Le Prince Igor » immense opéra dont sont extraites les « Danses Polovtsiennes » et qu’il ne pourra cependant terminer, sa mort survenant brutalement à 54 ans suite à un infarctus ; l’opéra sera achevé par Rimsky Korsakov et Balakirev.
Ceux qu’on a appelés les « petits romans » de Nina Berberova découverts dans les années 80/90 sont de vraies perles littéraires.
« Le serviteur allume les bougies du piano. On retire la peluche qui couvre son énorme couvercle verni, et on le relève. Moussorgsky joue le « primo », Balakirev le «Secundo». Cui arrange son pince-nez et replie ses mains sèches et noueuses sur ses genoux ; Stassov, dont le fauteuil grince lourdement, tourne une énorme oreille vers le piano dans l’attente d’une « béatitude surhumaine » : Wagner lui-même « pourra aller se rhabiller ».».
Alors si vous voulez tout savoir sur Alexandre Borodine il faudra vous reporter à une biographie plus complète surtout concernant la partie musicale. Mais je vous conseille en premier celle de Nina Berberova pour sa qualité littéraire et surtout son approche humaine et profonde de ce compositeur qui ne ressemble à aucun autre, même au sein du « groupe des cinq ».
Liens musicaux :
http://youtu.be/fgbzzIYYQ5Q
http://youtu.be/OKm-oipDkp0
http://youtu.be/_W2aQf8Lb5M
http://youtu.be/mPERT2eujC8
Les éditions
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Alexandre Borodine [Texte imprimé], 1834-1887 Nina Berberova trad. du russe par Luba Jurgenson
de Berberova, Nina Nikolaevna Jurgenson, Luba (Traducteur)
Actes Sud
ISBN : 9782868694591 ; 12,40 € ; 08/01/1992 ; 91 p. ; Broché
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Borodine, Nina Berberova, la musique et les livres... | 3 | Shelton | 21 juin 2012 @ 11:32 |