Le palais de verre de Simon Mawer
(The glass room)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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L'architecture du fascisme
Simon Mawer, auteur anglais, connu principalement en France pour L’évangile selon Judas (2006), écrit le Palais de verre en 2009. Le succès rencontré par ce dernier roman – finaliste du Booker Prize et élu meilleur livre de l’année par des revues anglaises – a entraîné sa publication en France très dernièrement au Cherche Midi.
L’intrigue romanesque s’étale sur 600 pages. La sauce prend dès l’évocation du couple Landauer qui se rencontre et se lie en Tchécoslovaque à la fin des années 20. De leur union naît Le palais de verre, habitation privée, quintessence de toute une vie, dénotant complètement avec le style architectural de l’époque. « Et tout autour d’eux s’étend la Pièce de verre, ce lieu d’équilibre et de raison, un endroit sans âge enserré dans sa structure rectiligne, qui traite la lumière comme une substance, le volume comme un matériau tangible et qui nie l’existence même du temps ». Ce lieu connaîtra successivement l’amour qui enchaine une famille, l’adultère qui en découle parfois, et un monde intellectuel et artistique fécond d’une Tchécoslovaquie au devenir écourté par la montée du fascisme et du socialisme.
La demeure suscitera tour à tour l’envie, l’admiration mais aussi les trahisons. Si le thème de la seconde guerre mondiale est déjà largement exploité dans la littérature contemporaine française ou étrangère, Mawer l’exploite d’une toute autre manière, en soulignant, notamment la place de ce qu’on osait appeler les « recherches scientifiques » sur les races, soi-disant garantes de toute objectivité à propos de la dégénérescence des juifs et autres groupes sociaux. « Les Slaves ne sont pas idiots, bien sûr, mais ils sont instables émotionnellement, capables de chef-d’œuvre comme d’autres d’une grande bassesse, c’est la science qui le dit. Regardez Tchaïkovski, Dostoïevski ». Si l’écrivain dénonce implicitement le fascisme, le socialisme dénote aussi.
Les prénoms et noms slaves, mélodieux, amènent au récit un rythme toujours plus enjoué, entretenu par les multiples métaphores émanant de ça de là, pareilles aux flocons inattendues qui donnent à la grisaille de l’hiver un côté plus poétique. Un effet boule de neige qui améliorera une écriture nécessitant peu de commentaires. On contemplera également le paysage architectural dressé ; profanes, n’ayez peur. Simon Mawer n’abuse pas de cette trame et nous initie pieusement aux joies des perspectives et des matières plus nobles que le contreplaqué.
On sauce jusqu’à la dernière goutte. Presque rassasiés !
Les éditions
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Le palais de verre [Texte imprimé] Simon Mawer traduit de l'anglais par Céline Leroy
de Mawer, Simon Leroy, Céline (Traducteur)
le Cherche midi
ISBN : 9782749118208 ; 22,00 € ; 10/05/2012 ; 580 p. ; Broché
Les livres liés
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Les critiques éclairs (3)
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Silence
Critique de Yotoga (, Inscrite le 14 mai 2012, - ans) - 10 mars 2014
" Il y a des silences qui en disent long et se font l'écho des sons à venir. "
Vitre, dis-moi qui est la plus malheureuse
Critique de Pascale Ew. (, Inscrite le 8 septembre 2006, 57 ans) - 21 novembre 2012
Liesel et Viktor vivent comme les couples de leur temps, avec deux enfants… et une maîtresse sur le côté. Avec l’arrivée de la guerre, tout leur monde est chamboulé...
Pendant ce temps, leur maison est réquisitionnée par les nazis, puis par les Russes.
A chaque étape de ce roman (mais je m’étonne de ne pas voir cette mention sur la couverture !?), cette maison est le théâtre d’amours diverses, mais rarement heureuses. Elle est surtout témoin de son temps et des affres de l’histoire.
J’ai trouvé l’histoire par moments trop longue. Dans ce livre, les femmes ont un bien triste sort : entièrement dépendantes des hommes, jusqu'à devoir s'avilir. Le ton est parfois aussi trop cru à mes yeux. J’ai aimé par contre les jeux de mots disséminés ici et là dans toutes les langues.
Parce que les maisons ont une âme.
Critique de Christian Palvadeau (, Inscrit le 19 janvier 2011, 60 ans) - 27 juin 2012
L’invasion de l’Autriche puis des Sudètes va bouleverser le destin de ce couple qui devra abandonner leur maison, s’enfuir et se réfugier, pendant qu’il est encore temps, en Suisse puis aux Etats-Unis.
Bien sûr, on peut parler d’une fresque historique ou d’une saga familiale mais là ne réside pas l’essentiel. Nous assistons d’un côté à la poursuite de la vie de la maison accaparée par les nazis puis par les communistes et de l’autre à la poursuite de la vie des exilés loin de leur rêve. Et le rêve et le souvenir finissent par se confondre. Si l’adultère, le détournement de ses idéaux, sont très présents dans le livre, la maison, elle, est toujours là, transparente, intemporelle, comme niant un passé monstrueux et un avenir incertain et sombre. Cette thématique est peut-être à rapprocher pour partie de celle sous-jacente au "Nagasaki" d’Eric Faye. Un peu comme si les maisons appartenaient à ceux qui les habitaient (voire les concevaient), un peu comme si celles-ci étaient capables de reconnaître leurs propriétaires, qu’elles portaient en elles l’écho des moments qu’on y a passés, qu’elles les conservaient quand le visage d’un enfant n’est plus qu’une vieille pomme ridée. Et dans le cas présent, si particulier, de cette maison de verre, comme si la transparence agissait à la fois comme un révélateur et un baume. On est envoûté par cette maison.
Piet Mondrian disait : « Seul l'aspect pur des éléments, dans des proportions équilibrées, peut atténuer le tragique dans la vie. »
On trouvera aussi des rapprochements intéressants avec "La Maison de l'aigle" de Serge Brussolo où il est question dans un premier temps d'une maison de verre et dans un second temps d'une autre maison occupée par les nazis. Remarquons par exemple quelques phrases : "Elle revenait de l'autre bout de la Terre et la maison était encore là.", "A la seconde où tu passeras le seuil du hall, la maison reprendra ses droits sur toi."
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