Les Gens du Sud de Yi Ch'ǒng-Jun

Les Gens du Sud de Yi Ch'ǒng-Jun
(Nam to sa lam)

Catégorie(s) : Littérature => Asiatique

Critiqué par Montréalaise, le 2 juin 2012 (Inscrite le 7 août 2010, 30 ans)
La note : 10 étoiles
Visites : 3 063 

Le Chant du Ressentiment...

Yi Ch'ongjun (1939-2008) est l'un des écrivains sud-coréens les plus lus et respectés. Avant-gardiste, il a développé une littérature conceptuelle, où le récit cède le pas devant la description des évolutions de la conscience. Auteur d'une centaine de nouvelles et d'une douzaine de romans, il a privilégié des histoires se déroulant dans sa région natale : le Jeolla, au sud-ouest de la Corée du Sud, région campagnarde éloignée des capitales, historiquement rejetée par le pouvoir qui ne la considère que comme un simple grenier à riz. Ainsi, les habitants du Jeolla, depuis l'époque féodale jusqu'à aujourd'hui, sont reconnus pour se rebeller constamment contre toute forme autoritaire de pouvoir, que ce soit contre les dynasties royales, l'empire japonais ou l'ancienne dictature sud-coréenne (ex : soulèvement démocratique de la ville principale de Gwangju en 1980). C'est aussi la région natale du premier président véritablement démocratique du pays, le Prix Nobel Kim Dae-jung, et également la seule jusqu'à maintenant, à avoir voté pour des partis proches de l'ancien chef d'État, c'est-à-dire, des partis de gauche.

Dans « Les Gens du Sud », recueil de cinq nouvelles, Yi Ch'ongjun nous fait découvrir l'essence même du ressentiment des habitants du Jeolla : ce chant folklorique nommé « pansori ». Les cinq nouvelles, se déroulant principalement sous le régime de Park Chung-hee, convergent vers un même personnage : celui d'un homme traversant les auberges et les routes campagnardes de la région et qui part à la recherche de sa demi-soeur qu'il n'a pas revue depuis longtemps. En fait, depuis qu'il s'est enfui dans une forêt après avoir échoué à tuer son beau-père qu'il haïssait, un chanteur vagabond à la voix puissante et mystérieuse. Celui-ci, après la mort de la mère du garçon, l'avait emmené lui et sa demi-soeur, sur les routes du Jeolla en leur apprenant à chanter le pansori et à battre du tambour. Après la fuite du garçon, il posera un geste terrible à sa fille : il la rendra aveugle afin de rendre sa voix plus belle et authentique et de la garder auprès de lui jusqu'à sa mort. De longues années plus tard, le garçon devenu homme part à la recherche de cette soeur, le coeur rempli de remords et d'un désir de pardon.

L'écriture de Yi Ch'ongjun est d'une beauté à vous couper le souffle. Ni trop sobre, ni trop touffue, elle nous plonge comme dans un rêve dans les sentiments les plus profonds de ces « Gens du Sud » et dans les paysages magnifiques du Jeolla, le berceau du folklore le plus coréen. Dans cette contrée du pansori, des rizières, des plantations de thé et des multiples îles de la mer, vous sentirez constamment dans votre coeur la nostalgie du voyage et l'hospitalité des campagnards, des éléments que vous ne trouverez jamais dans la cruauté des villes et des régions plus favorisées par le développement économique surprenant de la Corée du Sud.

Un recueil que je vous conseille fortement et qui a eu un énorme succès, à un point tel que le réalisateur Im Kwon-taek y a tiré un de ses films les plus célèbres, « La Chanteuse de Pansori » (1993).

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Les éditions

  • Les gens du Sud [Texte imprimé] Yi Ch'ǒngjun traduit du coréen par Kim Jung-Sook, Arnaud Montigny, Yang Jung-Hee... [et al.] édition préparée et postfacée par Patrick Maurus
    de Ch'ǒng-Jun, Yi Maurus, Patrick (Editeur scientifique)
    Actes Sud / Lettres coréennes (Arles).
    ISBN : 9782742768486 ; 18,80 € ; 01/06/2007 ; 158 p. ; Broché
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