Mémoires d'une enfant manquée de Brigitte Pilote

Mémoires d'une enfant manquée de Brigitte Pilote

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Libris québécis, le 1 mai 2012 (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans)
La note : 6 étoiles
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Rêver d'être une star

Jeanne Côté est une enfant manquée selon le sens qu’en donne Guy Corneau. Née de parents manquants, elle tente de laisser sa marque malgré leur indifférence. Elle veut même devenir un grand homme comme Jésus Christ et Jacques Cartier, dont elle partage les initiales.

À travers l’héroïne, l’auteure fait le procès des adultes trop occupés à se déculpabiliser de leur course à l’égoïsme même si on leur rappelle que les enfants sont les plus précieux des dons. De façon tranchée, la petite Jeanne se pose contre cette parentalité en quête d’un bonheur qui raie le monde de l’enfance. Faute de modèles, elle se tourne vers des personnages à la hauteur de ses ambitions, tel le découvreur de la Nouvelle-France. Mais elle se demande comment il a pu découvrir une contrée déjà habitée par les Amérindiens et les Inuit. C’est le Dr Morgentaler qui l’intéresse davantage. Ce juif, installé au Canada après avoir survécu au camp nazi, a consacré sa vie à la libération de la femme en lui rendant son corps après une lutte acharnée pour le droit à l’avortement. En fait, ce canevas sert à questionner les fondements de la liberté.

Le deuxième volet du triptyque suggère la commune comme prémices au bonheur. La famille de Jeanne quitte la ville pour les Cantons-de-l’Est. Dans un ancien couvent, on vit en communauté à l’instar des religieuses qui y habitaient. Les adultes vivent séparément de leur progéniture. Coupés de leurs parents, les enfants doivent oublier ce qu’ils ont vécu. On a confié leur éducation à Purusha qui leur apprend « à manier la hache du détachement ». Plus de crayons, plus de viande, juste des tubercules dans un pays où, pendant les trois quarts de l’année, le sol est gelé. Un détachement des artifices des sociétés de l’opulence. On se détache de tout. Une seule chose demeure. Il faut peu de temps pour que chaque enfant se trouve un nouveau petit frère ou une nouvelle petite sœur.

Le troisième volet propulse la petite Jeanne à la direction de ses pairs après le suicide de Purusha. Secondée par Damien, son amie de cœur et d’esprit, elle perpétue l’enseignement de ce maître zen. À l’instar des moines bouddhistes, chacun attend la manne qui fait vivre. Elle s’incarne dans un cinéaste intéressé de porter à l’écran l’exemple de Jeanne. Cette dernière y joue son rôle avec le fric dont on avantage honteusement les stars de cinéma. Rien de mieux que l’argent pour trahir les plus grandes ambitions. Quand on peut se graisser la patte (s’enrichir), on devient facilement une pâte molle. Voilà le bonheur recherché en se gardant bien de l’avouer.

Roman intéressant, qui présente une ligne de conduite axée sur la tendance du jour. En 1970, les communes faisaient fureur au Québec. Aujourd’hui, tout ce beau monde suit le mouton qui concourt à leur malheur. L’œuvre se démarque par son écriture haletante et son ton amusant. Malheureusement, ça se gâte au fil des pages.

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