Effets secondaires de Frank Deroche

Effets secondaires de Frank Deroche

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Miller, le 26 septembre 2002 (STREPY, Inscrit le 15 mars 2001, 68 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 671ème position).
Visites : 3 401  (depuis Novembre 2007)

« J'ai horreur des singes, ils ne pensent qu’à se gratter les couilles »

« J'ai horreur des singes, ils ne pensent qu’à se gratter les couilles »
F. Deroche à propos de Effets secondaires, roman de Frank Deroche, le Dilettante, Paris,
septembre 2002

Au fond, Deroche se « moque » de la sexualité, de notre sexualité, et se méfie de toutes les sécrétions du corps, peut-être parce que notre corps est devenu un des vecteurs les plus puissants du mercantilisme exacerbé. Deroche nous balance avec un esprit fin, les clichés sociaux et littéraires du moment. Dont le Baise-moi « de la Despentes », Virginie, de son prénom.
Deroche décale, tantôt acide, tantôt hilare, de ce décalage bipolaire qu'on aime à Bruxelles, à l’image de Jérôme ( Hiéronymus, pour les intimes) Bosch. Le peintre de l’étrangeté, ses toiles aux grenouilles pâmées, se délassant le ventre et lâchant des oeufs.

Un extrait d’Effets secondaires :
«... Transfigurons donc la loi biologique du rut selon les traditions ancestrales. D'après les Anciens – et comme ils ont raison ! qu’est-ce que le cerveau, sinon de la moelle ? et qu’est-ce que la moelle, sinon une réserve de sperme ? Diogène La‘rce qualifie d’ailleurs le sperme de « goutte de cervelle ». En activant son pénis, l'homme risque donc sa vie, ou plus exactement sa moelle, c'est-à-dire son esprit. Garder son sperme, c'est se garder comme un bambou, dressé vers le Fuji, selon l ‘axe feng shui pénis-vertèbres-cerveau.
L’abstinence fait tenir droit, l'incontinence affale. Ceux qui se vident de leurs humeurs sont toujours malades du dos. Montaigne appelait prophétiquement « consomption dorsale » cette dissipation d'énergie due à une trop grande émission de semence... ».
Mais non, Deroche n'est pas un dangereux malade à ceinturer au plus vite ! ! !
Je suis même prêt à parier les boules de Geisha Gucci de Lolita Pille (premier roman de chez Grasset, un éditeur qui a bien vendu l'image-de-la-pétasse, une bonne promo de publiciste), je suis prêt à parier, disais-je, qu'entre les deux hémisphères du cerveau de Frank Deroche, scintille ce familier croissant de lune. Celui que la femme aimée sait nous chalouper à la dérobée d'un regard.
Deroche (son personnage) n’est probablement ni très dangereux, ni très malade, malgré les médicaments répertoriés dans son livre. De la Cystine Bailleul aux comprimés Lexomil, et on en passe. Toute une biochimie médicamenteuse qui jalonne les pages jusqu'à l'illustration de la couverture.
Serions-nous face à un sinistre hypocondriaque ? Ou alors un chasseur de grillons ? Un grillon allemand, s’entend.
Réfugié dans l’âtre de la maison de Koenigsberg, celle de ce brave Emmanuel Kant.

Vite, encore un petit extrait (juste pour la route) : « Croiser le regard d'un chirurgien plasticien est aujourd’hui un geste universel, mais toujours lourd de sens. Il y a seulement quelques années, dans le Jura, une femme était assez belle quand elle ne faisait pas peur au bétail ».
Que font, dans cette histoire, ces deux vieux potes du seizième (pas l’arrondissement, mais le siècle !) :
La Boétie et Montaigne ?
À vous de le découvrir, chers lecteurs et trices.
Sachez seulement que Frank Deroche habite Paris, rue La Boétie. Mais bien sûr, ce n'est qu’un indice de plus, pour vous inciter à lire ce premier roman intelligent.

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Comme un médicament périmé...

6 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 69 ans) - 4 mars 2003

"Ceci n'est pas un roman" : je n'emploierai pas cet argument car j'ai trop souvent reproché à d'autres de l'utiliser. Mais enfin, un narrateur-personnage qui porte le même nom que l'auteur et qui file un monologue nombriliste d'une heure quinze montre en main, ce n'est pas vraiment le créateur d'un univers romanesque.
Et puis, comme il est daté, ce livre 2002, à nos yeux de lecteurs contemporains! Que tout cela est vieillot! Certes, le bouquin évoque un auteur très moderne, Montaigne, mais comme tout le reste est convenu! Un cocktail médicamenteux où interviennent de manière récurrente les noms propres cultes d'une certaine mythologie de l'époque, si possible parisienne (Duras, Yann Andrea, Bernadette C. et David D., Virginies Despentes, Christine Angot, Boris Cyrulnik...), les noms communs pas très folichons liés au corps, à la maladie, si possible à la sexualité (proctologue, rectum, prépuce, fellation, clitoris...) et, bien sûr, les galipettes homosexuelles (le clou du livre étant constitué par la sodomie à laquelle Montaigne se livre sur la personne - en partie - de son tendre ami Etienne de la Boétie).
Certes, l'ensemble est censé produire l'humour, cet humour cynique qui était tellement à la mode en 2002. L'ennui est que le livre passe à côté de son objet. Je ne peux parler que pour moi, bien sûr, mais la vérité est triste : je n'ai pas ri une seule fois... Je me suis infligé d'aller au bout comme on inflige l'huile de la morue à un enfant : c'est pour ton bien...
Comme tout ceci est daté, déjà! Comme un vieux tube de Lexomil périmé que l'on retrouvera dans une armoire, en 2012, et dont on s'étonnera d'avoir pu trouver ça "intéressant", il y a si longtemps, en 2002...

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