Petals' Pub de Arlette Cousture

Petals' Pub de Arlette Cousture

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Libris québécis, le 17 février 2012 (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans)
La note : 6 étoiles
Moyenne des notes : 6 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (50 735ème position).
Visites : 4 233 

Les Montréalaises de 1884

Avec Les Filles de Caleb, Arlette Cousture a tracé le chemin à de nombreux écrivains qui, à sa suite, ont pris la plume pour raconter les incidences de l’Histoire à travers le quotidien du peuple. Leurs romans, qui s’attachent en particulier au X1Xe siècle, remplissent les rayons des librairies et des bibliothèques. D’accès facile, cette littérature populaire attire les lecteurs nostalgiques d’une époque, dont furent témoins leurs ancêtres pas si lointains.

En 1884, trois jeunes Montréalaises habitent des taudis du quartier Griffintown, le chef-lieu des Irlandais, qui ont fui la misère de leur pays pour se coltiner à la nôtre. Ces femmes aux noms floraux tentent de s’épanouir en dépit de la parcimonie du soleil. Angélique choisit la vie religieuse, mais, éprise du servant de messe, elle quitte le couvent. Margaret, une Irlandaise qui a survécu à la quarantaine obligatoire égrenée sur Grosse-Île, s’amène à Montréal avec son fiddle (violon). Violette, qui a perdu presque toute sa famille dans un incendie, vit dans un sous-sol infect avec son frère.

L’intrigue du roman repose sur la destinée de ces trois célibataires en quête d’amour et d’un emploi. Comment Angélique fera-t-elle fructifier ses dons de boulangère ? Comment Violette s’attirera-t-elle une clientèle avec ses doigts magiques de couturière ? Comment Margaret s’y prendra-t-elle pour acquérir le Petals’ Pub ? Leurs aspirations se doublent d’un questionnement amoureux. Et les prétendants font le pied de grue avant qu’elles ne se décident d’exaucer leurs désirs.

Tout le monde est beau, tout le monde est gentil. Du moins, c’est le souhait de l’auteure. Elle pourchasse les parents des soupirants, qui refusent de se formater sur l’adage. Elle houspille la violence familiale, dont se rend coupable un forgeron, père de plusieurs enfants. Elle dénonce les préjugés des bourgeois jaloux de leur caste. Il est impensable que la mère d’un fils médecin consente à ce que les feux de l’amour se consument avec une plébéienne.

Arlette Cousture est sensible aux différences sociales. Le roman reflète bien les quartiers montréalais qui confinent chacun à son rang. L’est et le sud-ouest de la ville sont réservés aux moins nantis; la gent aisée se regroupe au pied du mont Royal. Au-delà de ses différences se déploie une ville portuaire et nordique, qui menace la vie de ses habitants avec son fleuve annexé en hiver au système routier.

L’auteure a le don de créer de beaux personnages, qui se côtoient sur une voie bien balisée. Chacun est habité par l’énergie de sa jeunesse qu’il tempère à l’aulne d’une foi vivante, mais ouverte. La géhenne ne les obsède pas trop. C’est beau, rafraichissant, mais d’une naïveté qui affecte la crédibilité de l’œuvre.

Pour les premières féministes du Québec, déterminées de vivre au grand jour dans une société pudibonde et fermée, l’auteure a concocté un roman bien ficelé et aucunement redondant avec ses 413 p. Le bémol s’applique à la facture anecdotique et incisée en tranches comme pour une télésérie. D’ailleurs, sa meilleure œuvre, Les Filles de Caleb, a connu un succès retentissant au petit écran. L’écriture aussi se démarque de celle de ce roman. Elle n’est pas aussi fluide. Parfois, ça ressemble à une traduction, surtout avec les longs passages en anglais, qui se veulent fidèles à la langue des Irlandais. C’est tout de même intéressant pour ceux qui aiment les romans d’époque populaires.

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Lutte à l'indigence

6 étoiles

Critique de Saumar (Montréal, Inscrite le 15 août 2009, 91 ans) - 31 août 2012

L’histoire se déroule à Montréal, dans le quartier de Griffintown, en 1884. L’auteure, Arlette Cousture, présente trois jeunes héroïnes, dont le courage et la force d’âme émeuvent. Tout d’abord, Angélique, postulante du couvent qu’elle quitte, s’éprend du servant de messe, Eugène, étudiant en médecine. Elle découvre qu’elle allait autant l’aimer qu’elle aime le Christ. Arrive Marguerite, une orpheline, rescapée de Grosse-Île, qui a pour seul repère son violon. Elle ne connaît pas la langue, ni la culture du Québec. Heureusement, elle se rend chez Étienne et Violette, cousins d’Angélique, lesquels ont perdu leurs parents dans un incendie. Non seulement, tous deux vivent dans un sous-sol insalubre, mais ils le partageront. C’est dans ce milieu misérable, où la faim, le froid, les pieds mouillés et les rats hantent leur quotidien. Si ce récit n’arrive pas à démoraliser les lecteurs, c’est que l’auteure a réussi à créer des personnages d’une solide fierté et d’une joie de vivre, malgré leur pauvreté.

L’auteure aborde aussi le thème de la différence sociale. Le père d’Eugène, Edmond de la Dérantaye n’accepte pas Angélique, l’amoureuse de son fils. La raison de son refus, c’est qu’Angélique n’est pas de « son monde ». Il propose donc à son fils d’épouser Madeleine Cournoyer « pour la lignée » et de bien installer Angélique « pour la vie et les plaisirs ». Quant à sa femme, apprenant le départ de son fils, elle croira d’abord que c’est pour se rapprocher de l’Université. Ils lui cacheront même, pour l’instant, qu’elle sera grand-mère, afin d’éviter qu’elle en fasse un drame.

Le personnage du forgeron est odieux. Père de cinq enfants dont les plus vieux sont jumeaux. Il est si violent qu’il ira jusqu’à frapper sa femme, au point de nécessiter l’hospitalisation. Les jumeaux doivent se remplacer pour protéger la mère. Ce faisant, Gérard, un des jumeaux, reçoit un coup de poing dont il gardera des séquelles au cerveau en plus d’une profonde entaille à l’œil. Tant de violence pour satisfaire l’instinct de domination du paternel. Plusieurs scènes fortes se produisent dans la forge. L’enfer.

Le rythme est bon. Des intrigues captivantes où oscillent force et fragilité, où se côtoient l’indigence et l’abondance. L’écriture ne déçoit que par des passages en anglais et, pour tout dire, elle n’atteint ni la fluidité ni la crédibilité des « Filles de Caleb » et « Blanche ». Pas trop de rebondissements, c’est juste une histoire un peu sombre, qui est en même temps, remplie d’espoir et de rêves, et pour cause? Des héroïnes et leurs amis qui se tiennent debout, luttant afin d’améliorer leur sort. Qu’arrivera-t-il des amours de Violette et Gérald, de Marguerite et Étienne, ces jeunes personnes réaliseront-elles tous leurs rêves? Pourront-elles, enfin, connaître un peu de bonheur? C’est à lire!

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