La grève : Atlas Shrugged de Ayn Rand

La grève : Atlas Shrugged de Ayn Rand
(Atlas shrugged)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Isad, le 15 janvier 2012 (Inscrite le 3 avril 2011, - ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 10 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (875ème position).
Visites : 5 811 

Géniale histoire d’une femme libre et éloge de l’esprit d’entreprise

Ce livre est un cri à travers Dagny Yaggart qui entend sauver l’entreprise créée par son grand-père et dans laquelle elle a pratiqué différents métiers avant d’en être à la tête opérationnelle. Elle ne veut rien devoir à personne que ce qu’elle a gagné par opposition à son frère James qui fréquente les milieux politiques et fait du lobbying économique et réglementaire. Autour d’elle gravitent les hommes de sa vie : Eddy Willers, fidèle ami d’enfance et son assistant à la compagnie de chemins de fer, Francisco d’Anconia brillant amant de son adolescence, Hank Rearden, le sidérurgiste autodidacte et John Galt, l’inventeur, personnage énigmatique et auteur de l’idée de laisser les non-créateurs se débrouiller seuls.
La grève c’est celle des entrepreneurs-inventeurs qui estiment qu’on les exploite, eux et le fruit de leur cerveau, pour donner sans fin à ceux qui attendent tout de l’État et ne créent rien.

C’est l’histoire d’une femme libre et d’individus qui se battent contre les taxes qui entravent la libre-entreprise. C’est une diatribe contre le communisme et l’idée de satisfaire les besoins de ceux qui n’ont rien et qui demandent qu’on les aide sans rien donner en retour à la société.

L’auteur nous montre une conception de l’existence qui exige de l’être humain qu’il mette en place les conditions de sa réussite personnelle et refuse d’accuser la malchance. On est soi-même l’auteur de sa vie.

Elle fustige aussi une critique des comportements moutonniers, de l’absence de prise de responsabilité quand on veut se conformer au carcan des procédures qui étouffe la prise d’initiative du travailleur de base qui sait ce qu’il faut faire mais n’ose pas car c’est lui qui sera accusé en cas d’échec. Et on retrouve là les méfaits du principe de précaution qu’engendre la peur du risque.

Le livre n’épargne ni les hommes politiques ni des médias qui se conforment aux désirs de la petite élite qui a le pouvoir et corrompt pour le conserver. Il égratigne aussi les lois et ceux qui gravitent autour car ce petit monde judiciaire ne cherche pas protéger et à rendre justice mais à prendre en faute et sert ceux qui savent en comprendre le langage ésotérique et en contourner toutes les subtilités à leur profit.

L’auteur montre la déliquescence de toute la société lorsqu’elle est privée de la croissance engendrée par les innovations de quelques-uns. C’est alors que les idées les plus folles surviennent, pour rétablir l’ordre, faire rentrer les gens affamés de le rang et exiger l’obéissance, ... au nom de l’intérêt général bien sûr.

En bref, il s’agit tout à la fois d’un roman historique, d’amour, de philosophie, de révolte et d’apprentissage, d’un hymne à la création et au génie de l’esprit humain. L’histoire est simple et attachante, détaillant les motivations profondes des différents personnages qui se révèlent être issues de principes simples.

Il y a certes quelques passages démonstratifs un peu trop longs qui relèvent plutôt d’un cours, mais j’en recommande fortement la lecture qui est très stimulante et pousse à la réflexion. Et bien sûr, toute ressemblance avec notre monde contemporain serait purement fortuite puisque le livre a été écrit dans les années 1950 !

Cela faisait longtemps que je n’avais pas lu un livre d’une telle force.

« Connaissez-vous le lieu commun du médiocre ? C’est le ressentiment à l’égard de la réussite de l’autre. »

« Le seul pouvoir que tout gouvernement a, c’est celui de tomber sur le dos des criminels. Et bien, quand il n’y a pas assez de criminels, il suffit d’en fabriquer. On déclare tellement de choses ’’hors la loi’’ qu’il devient alors impossible aux hommes de vivre sans jamais violer la loi. »

Pourquoi faire de l’argent ? « Dans le but d’échanger mes meilleurs efforts contre les meilleurs des autres »

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Qui est John Galt ?

10 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 9 septembre 2024

Ce livre de plus de 1300 pages est considéré comme l’œuvre la plus importante de Ayn Rand, philosophe et romancière d’origine russe. Cet ode à l’anticommunisme viscéral dont elle a fait son cheval de bataille, décrit une Amérique qui étouffe jusqu’à l’absurde la libre entreprise conduisant les entrepreneurs à se désespérer d’une autorité de pillards. Ses critiques portent aussi sur l’emprise de la religion, mais elle est plus subtile dans cette optique, vu le contexte étasunien.
Le contexte, quoique purement fictionnel, voire science-fictionnel lorsqu’on arrive à la troisième partie, pourrait se situer durant la période des années 30, bien que la crise de l’époque n'avait évidemment pas pour cause l’interventionnisme ou des politiques de collectivisme. L’Etat est décrit comme destructeur, un frein à la libre entreprise et obligé de subventionner des activités qu’il a lui-même limitées pour qu’elles restent un minimum rentables. Les entrepreneurs sont soumis à des règles de plus en plus absurdes leur interdisant de faire du commerce librement voire de procéder à des inventions. Les autorités sachant pertinemment bien qu’elles ne peuvent être respectées exercent des chantages à l’égard de certains d’entre eux, notamment sur Hank Rearden, métallurgiste et inventeur.

Au fil du récit une question est sans cesse posée « Qui est John Galt ? », comme une litanie qui reste comme une énigme semblant conduire à un hypothétique dénouement. Sans dévoiler la fin de l’histoire, la troisième partie offre d’autres perspectives en dévoilant l’existence d’une vallée cachée à la Jules Verne, où tous les exilés ou grévistes, d’où le titre du livre en français, se retrouvent à réinventer une société utopique, où l’argent reprendrait sa valeur et où chacun exercerait un autre métier que celui exercé dans sa vie précédente.

Plusieurs personnages majeurs entremêlent leurs destins dans cette saga ardue, très philosophique mais captivante.

Dagny Taggart, véritable personnage central du roman qui passe à travers toutes les crises et difficultés rencontrées par la Taggart Transcontinental. Elle se bat comme un diable pour tantôt sauver, tantôt développer sa société, faisant face à son frère, James (Jim) Taggart, qui en qualité de Président du Conseil d’administration met plus la tête dans le sable que d’apporter un soutien à sa dynamique sœur. Elle est à un moment du roman à la recherche d’un mystérieux et génial ingénieur qui aurait inventé un moteur électrique capable de fonctionner avec l’électricité statique. Un temps, elle s’efface de la gestion de la Taggart Transcontinental, jusqu’au jour où son frère la supplie de revenir à la manœuvre.

Hank (Henry) Rearden, patron du groupe Raerden Metal qui devient le leader du marché grâce à un procédé révolutionnaire de fabrication d’acier, dont la fiabilité est mise en cause. Sa position dominante gêne fortement la concurrence qui l’accuse de déséquilibrer le marché et des lois anti-trust mettent à mal son groupe industriel. Marié à Lillian, une belle femme délaissée, il entretient une relation extra-conjugale tumultueuse avec Dagny Taggart, vice-présidente et directrice exécutive de la société ferroviaire Taggart Transcontinental, qui est par ailleurs cliente de Raeder Metal. Il devient à la fois l’ennemi et l’ami de Francisco d’Anconia dont il admire l’intelligence, mais qu’il accuse de l’avoir trahi.

Eddie Willers, fidèle bras droit de la Taggart Transcontinental. Il assure l’intérim de la Vice-Présidente, Dagny Taggart lorsqu’elle doit provisoirement abandonner son poste pour des questions de stratégie face aux lois anti-trust. Il reste son confident et homme de confiance de Dagny.

James (Jim) Taggart, président du Conseil d’administration de la Taggart Transcontinental. Personnage sans envergure et qui récolte les fruits des activités et du dynamisme de sa sœur Dagny, dont il est jaloux. Il est aussi à la manœuvre auprès des décideurs politiques qui sont à la base des mesures qui étranglent ses concurrents.

Francisco d’Anconia, héritier d’un groupe minier d’Amérique latine, il fait au début du roman la pluie et le beau temps dans le milieu des affaires. Grâce à sa grande fortune, il est vu, malgré son intelligence remarquable, être un oisif et peu intéressé par les affaires. On apprend qu’il a été l’amant de Dagny lorsqu’ils étaient encore étudiants. Il réapparaît lors du mariage de Jim Taggart, outre semer la pagaille et créer la zizanie, il improvise un discours sur l’argent et la corruption qui gangrène le pays. Il semble être l’allié de Hank Rearder, il lui profère conseil et soutien suite aux difficultés qu’il rencontre. Ils ignorent au début de l’histoire qu’ils aiment la même femme, Dagny Taggart.

Ragnar Danneskjöld, décrit comme un personnage d’une beauté exceptionnelle, il est un pirate qui s’attaque aux bateaux de commerce des gros industriels en vue non de les rançonner, mais pour contrer la politique des pillards, soit l’autorité américaine. Son action de Robin des Bois en vue de rendre aux riches le fruit de leur travail est controversée en raison de la violence déployée.

John Galt : Le personnage est d’abord évoqué comme un fantôme ou un personnage imaginaire jusqu’à la troisième partie du roman. Il est le maître à penser d’un nouveau monde qui se veut le contraire de ce qu’en ont fait les pillards. Troisième larron de la trilogie avec Ragar Danneskjöld et Francisco d’Anconia, il devient également l’amant de Dagny, mais surtout, au chapitre XXVII, il prend la parole à la radio en piratant une allocution du chef de l’Etat. Ce discours, qui prend 70 pages du livre, est d’une densité exceptionnelle.

Grâce à un style prenant, presqu’envoûtant, vous serez porté par cette histoire et ce roman qui certes vous demandera un investissement temporel conséquent ; j’ai mis plus de cinq semaines pour le lire, mais vous ne le lâcherez pas des mains, conscient d’être en présence d’une œuvre majeure.

Un monument à l'intersection entre la littérature, la philosophie et la politique

10 étoiles

Critique de LesGouttesDuTemps (Paris, Inscrit le 17 mars 2021, 65 ans) - 18 avril 2021

"Atlas shrugged" (ou "La grève") serait aux Etats-Unis le livre le plus vendu après la Bible, jouissant d’une influence culturelle considérable, alors qu'en Europe il est quasiment inconnu en dehors d'un cercle d'initiés. D’après Ayn Rand, son roman décrit ce qui se passe lorsque la violence de l'Etat empêche l'esprit de fonctionner, soit directement (par le biais de la spoliation), soit en poussant les "hommes d'esprit", les véritables créateurs de richesse, à refuser de servir une société qui trouve normal de les traiter comme des esclaves. On est vraiment très loin du politiquement correct et du gloubiboulga médiatique ambiant (notamment en période d'épidémie...). .

C'est romanesque et (parfois inutilement) long, avec un foisonnement de personnages qui à mon sens rend presque obligatoire la rédaction d'une fiche destinée à identifier et à "suivre" chacun d'entre eux, sous peine de se perdre dans les méandres du récit. Parmi mes lectures récentes, l'oeuvre comparable me venant à l'esprit est "La chute des géants" de Ken Follett, qui (malgré ses qualités) m'avait déjà fait penser à cette citation de Blaise Pascal : "Je n'ai fait cette lettre-ci plus longue que parce que je n'ai pas eu le loisir de la faire plus courte". En dépit de ces longueurs, j'ai l'impression d'avoir lu un monument. Bien que la traduction française du roman me semble fluide et de bonne qualité, c’est la dimension idéologique et politique (davantage que la dimension purement littéraire) que j’en retiens avant tout. A lire, absolument.

Mon nouveau livre culte!

10 étoiles

Critique de Bréhec (paris, Inscrit le 21 novembre 2004, 66 ans) - 2 septembre 2015

Et voilà! La grève a détrôné "Le prince des marées" au sommet de mes livres cultes!
C'est un livre qui sous la forme d'un roman passionnant fait profondément réfléchir sur soi-même, son travail, sa place dans la société. Sur la médiocrité, l'ambition et la corruption des politiques... Et encore sur la liberté d'esprit, la liberté d'entreprendre... Les personnages sont inoubliables, et le propos diablement actuel!
Ne vous laissez pas impressionner par l'épaisseur du livre, vous allez le dévorer et regretter de l'avoir terminé.

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