De Marceau à Déon, de Michel à Félicien : Lettres 1955-2005 de Michel Déon, Félicien Marceau
Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances
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Objet en voie de disparition
Michel Déon et Félicien Marceau deviennent amis en 1955. Cette amitié n’a jamais été abîmée par les longues absences de ce « voyageur immobile » qu’est Michel Déon alors que, pour Marceau, les voyages « c’est partout la Bretagne » et dès lors à quoi bon voyager ? Cette amitié s’est nourrie d’une correspondance qu’Alice Déon a réunie. Malheureusement elle ne dit pas si cette correspondance irrégulière (3 lettres en 1960, une en 61 puis silence jusqu’en septembre 65 et ainsi de suite) est l’intégrale des échanges conservés ou bien s’il agit de morceaux choisis comme Michel Déon l’a fait l’an dernier avec son journal dont il n’a publié que des extraits.
Cet échange épistolaire commence mal : le fils de Bianca Marceau a oublié à Paris un sac que Déon doit récupérer et faire parvenir. On a connu lecture plus captivante ! Et puis, de lettre en lettre va naître un vrai sentiment d’amitié. D’admiration aussi surtout chez Marceau pour qui il y a au moins trois raisons d’être heureux : lire d’un ami le bon livre qui a du succès.
Et de quoi parlent des écrivains dans leurs correspondances ? Des voyages de l’un, du théâtre de l’autre et surtout des livres et plus encore du milieu littéraire. Pour ce qui est des livres évoqués, il faut bien constater que trente ou quarante ans plus tard il n’en reste pas grand chose. Ceux qui ont alors emballé les critiques, séduit les jurys littéraires sont pour la plupart tombés dans l’oubli. Les intrigues y ont aussi leur part, surtout quand on parle prix littéraires ou candidatures à l’Académie Française. Les deux amis portent sur ce monde de vanité un regard complice, parfois indulgent. Ainsi cherchent-ils à aider Thierry Maulnier « qui a une fin de vie si difficile » ou Jacques Laurent « dans une panade troublante » en leur faisant obtenir un prix, synonyme d’argent liquide et de meilleure visibilité sur les tables des libraires. L’amitié pouvait donc l’emporter sur la qualité littéraire d’un livre. C’est peut-être contestable mais bien moins que le lobbying commercial d’éditeurs. Ainsi s’amusent-ils aussi de la « coïncidence » entre l’envoi à Déon d’un « mot plus que charmant » d’Henri Troyat et peu après la demande formulée par des inconnus de soutenir sa candidature au Nobel.
Parfois le regard est plus méchant quand ils traitent, inconsidérément, Marguerite Yourcenar de « vioque qui déraille » ou parlent de façon inappropriée de la « connerie des Belges » qui ont tenu rigueur à Félicien Marceau, après la guerre, d’avoir travaillé à la radio, sous l’occupant, jusqu’en 1942. « Connerie qui n’est pas leur apanage puisque nous avons vu des Français nuls ou médiocres s’en emparer. » Ouf, tout le monde est servi !
Tout ceci, parce que ces messieurs écrivent bien et que leurs lettres n’appartiennent pas à un genre mineur, nous vaut quelques jolies formules comme cette remarque de Félicien Marceau à propos de Jean Dutourd : « Il y a chez lui un bonheur d’écrire qui donne un bonheur de lire ».
Une poste défaillante dont ils se plaignent souvent et la mondialisation du téléphone vont donner à leur échange un autre caractère, plus personnel et dont ne saurons probablement plus rien. C’est Marceau, fataliste, qui note : « Les lettres font partie de ces choses qui peu à peu disparaissent ».
Et la maladie interrompit leur conversation sans en altérer l’affection.
Un livre qui pourra plaire aux admirateurs de ces deux auteurs mais c’est surtout par leurs livres que se continue la conversation entre l’écrivain et le lecteur.
Les éditions
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De Marceau à Déon, de Michel à Félicien : Lettres 1955-2005
de Déon, Michel Marceau, Félicien Déon, Alice (Commentaires)
Gallimard
ISBN : 9782070786961 ; 18,80 € ; 04/11/2011 ; 193 p. ; Broché
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