Sanctuaire de William Faulkner
( Sanctuary)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Le culte de la perversion
Lire William Faulkner, c’est déjà un exercice périlleux. En faire une critique, c'est carrément du masochisme. Que dire de nouveau et d'au moins aussi intelligent qu'un Maurice Edgar Coindreau (son traducteur), qu'un Albert Camus, qu'un Jean-Paul Sartre ou qu'un André Malraux ?
Justement, en 1933, André Malraux écrivait dans une préface devenue célèbre : « Sanctuaire, c'est l'intrusion de la tragédie grecque dans le roman policier. (…) Sans doute est-ce une erreur que de voir dans l’intrigue, dans la recherche du criminel, l'essentiel du roman. (.) Limitée à elle-même, l’intrigue serait de l'ordre du jeu d’échec- artistiquement nulle. Son importance vient de ce qu'elle est le moyen le plus efficace de traduire un fait éthique ou poétique dans toute son intensité. Elle ne vaut que par ce qu'elle multiplie »
William Faulkner n’aimait pas ce roman, il ne l'a écrit pour de l'argent. Pour booster les ventes, il avoue avoir cherché "l'histoire la plus effroyable qu'on puisse imaginer" Faulkner est descendu dans les abîmes de l’âme humaine à la recherche du mal absolu.
Comment ne pas s’émouvoir du sort de cette pauvre jeune fille, Temple Drake, psychologiquement broyée et sauvagement violée à l'aide d’un épi de maïs ? Et Popeye, ce truand impuissant et pitoyable, qui se laisse accuser d'un meurtre qu'il n’a pas commis ? Et Horace Benbow, l'avocat justicier, qui se fourvoie en voulant faire le bien ? Sanctuaire est résolument noir, malsain et désespérant.
A cela s’ajoute le chaos stylistique. L'écriture de Faulkner est volontairement obscure. Une chronologie bouleversée avec des flash-back incessants, des phrases « fracturées » et des monologues intérieurs qui ne se distinguent pas toujours de la narration, l’oeuvre de Faulkner demande une attention constante de la part du lecteur. Pour ma part, j'ai bien failli abandonner avant la fin… mais il faut croire qu’il n'y a pas de plaisir sans effort. Après le « Bruit et la fureur », je m'étais pourtant jurée qu'on ne m'y reprendrait plus !
Les éditions
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Sanctuaire [Texte imprimé] William Faulkner traduit de l'anglais par R. N. [René Noël] Raimbault et Henri Delgove... préface d'André Malraux
de Faulkner, William Malraux, André (Préfacier) Gresset, Michel (Traducteur) Raimbault, René-Noël (Traducteur) Delgove, Henri (Traducteur)
Gallimard / Collection Folio.
ISBN : 9782070362318 ; 8,60 € ; 01/01/1972 ; 384 p. ; Poche
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Les critiques éclairs (9)
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pas emballé
Critique de Thomas lu (, Inscrit le 11 novembre 2019, 34 ans) - 11 novembre 2019
Une oeuvre sombre et dérangeante !
Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 59 ans) - 6 novembre 2017
Il a situé la plupart de ses récits dans son état natal du Mississippi.Il est considéré comme un des plus grands écrivains américains de tous les temps et un écrivain majeur du XXe siècle.
"Sanctuaire" est son sixième roman (1931).
Sud profond des états-unis -Comté imaginaire de Yoknapatawpha (Mississippi)- la prohibition fait rage et la jeunesse prend tous les risques pour acheter de l'alcool.
Temple Drake, jeune fille de bonne famille, est abandonnée dans une maison délabrée, par son petit ami venu y chercher de l'alcool. Une masure habitée par des marginaux dont le mystérieux et violent Popeye. Temple, telle une brebis lâchée dans la jungle, sera violentée, violée et séquestrée.
Elle échouera dans une maison close de Memphis où sa déchéance va s'accélérer.
Un récit effroyable, dérangeant où le malaise est omniprésent.
Une lecture difficile sur la fond et la forme.
Je me suis interrogé sur la finalité du récit. Mais où Faulkner veut-il en venir ?
J'avoue être resté sur ma faim. Probablement n'ai-je pas compris le sens profond de cette oeuvre.
Même à la relecture de la préface d'André Malraux, je n'ai pas avancé dans la compréhension.
Un roman qui restera un mystère....
Faulknerisme mineur
Critique de Khan (, Inscrit le 1 mai 2005, 38 ans) - 3 mai 2008
Il y a un passage formidable qui pour moi rachète à lui seul la technique de narration temporelle qu’emploie Faulkner. La scène du “dix heures et demie” comme j’aime à l’appeler. Formidable madeleine proustienne, ce dix heures et demie se moque de tout. Ce n’est pas le dix heures et demie de l’instant présent mais une multitude de dix heures et demie, ou comment à partir d’un principe rigide comme le temps, Faulkner va transporter son lecteur dans d’autres journées, d’autres parts d’existence de l’héroïne, comment de sa grange il va la faire voyager à la soirée de préparation pour le bal, comment tout simplement il va nous promener et finalement ressaisir son lecteur lui donner à manger, pas trop, mais juste ce qu’il faut pour lui enlever un peu de l’agacement que l’on ressent pour l’auteur. Certes en faisant exploser en diverses temporalités la structure narrative Faulkner accède à des facilités de narrations ou même à des expérimentations qui peuvent le faire passer pour plus grand qu’il ne l’était mais à côté de ce principe maintenant éculé, se trouve le vrai génie de Faulkner et il est total. J’entends parler de son génie de la description, de son élégante façon de raconter. Jamais Faulkner ne nous inonde de descriptions, paradoxe amusant quand on sait à quel point il aime nous malmener avec le temps! Ces dernières sont d’ailleurs pour le moins étranges toujours mal placées.
Disons plutôt inappropriées dans tout autre roman autre qu’un roman de Faulkner. L’écrivain n’est jamais là où on l’attend, il se perd dans des descriptions secondaires où les mots sont chirurgicalement choisis, travaillés, intelligemment - peut-être trop - placés. Pourtant tout est d’une élégance rarissime, on voit que l’oiseau qui chante n’est pas le plus intéressant mais qu’il recrée finalement une ambiance, une réalité, que les froides descriptions étirées d’autres écrivains n’arriveront jamais à appréhender. Faulkner, c’est le génie de la description secondaire, le magicien de la littérature, le seul écrivain qui entre mille possède un style d’une modernité à la fois austère et gaie, les mots ne correspondent pas au ressenti, ils recréent simplement une atmosphère qui elle-même va générer le ressenti! Les descriptions deviennent alors vivantes, l’imagination du lecteur est appelée à tout instant, mais toujours sous contrôle d’éléments secondaires qui la recadrent constamment dans une réalité pourtant fictive.
J’aime Faulkner pour cette raison plus que pour l’histoire de narration inversée, j’aime Faulkner pour son talent à manier ce qui est secondaire chez d’autres, j’aime Faulkner car il ne donne rien d’un coup, parfois on découvre encore des traits de caractères des personnages alors qu’on les connait déjà depuis 200 pages. La description chez Faulkner seule échappe au temps, elle est totale, parfaitement totale et immortelle, c’est elle le vrai sanctuaire de l’écrivain, la seule chose qu’on ne pourra jamais lui enlever, son plus précieux don, celui qui pour moi différencie le travailleur acharné du génie.
Quelle surprise
Critique de Zelda (Rambouillet, Inscrite le 26 avril 2006, 53 ans) - 24 juillet 2006
C'est l'été et tout est frais et léger ... sauf ce livre.
Mais quel livre !
C'est véritablement une plongée au coeur de l'Amérique profonde du sud poisseux.
On lit une histoire terrible et fascinante, un peu comme lorsque l'on assiste à une scène horrible dont on devrait détacher les yeux sans pouvoir le faire.
Ce livre m'a aussi permis de réfléchir aux personnages, qui sont si lisses aujourd'hui (je pensais à Houellebecq et aux critiques de Plateforme). Faire de Popeye un impuissant, violent et jaloux, donner une envergure incroyable au personnage de Temple qui s'adapte, bien que détruite, à cette nouvelle existence alcoolisée, cela est vraiment intéressant.
C'est du beau travail étrangement ficelé par moment, à lire en toute connaissance de cause.
C'est en somme un vrai livre d'adulte .
Horace Benbow, initiateur du lundi de Pentecôte ouvrable.
Critique de Feint (, Inscrit le 21 mars 2006, 61 ans) - 22 avril 2006
Sanctuary : un Faulkner qui fait mal
Critique de Sylkarion (Saint-Etienne, Inscrit le 9 décembre 2005, 44 ans) - 9 décembre 2005
Une merveille de sensibilité
Critique de Giny (Casablanca, Inscrite le 26 avril 2005, 36 ans) - 23 septembre 2005
Ces ellipses narratives sont à mon goût ce qui fait le charme du livre, qui le fait passer d'une banale histoire, après tout, à un chef-d'oeuvre de désespoir.
Je suis d'accord, Jules
Critique de Esperluette (*, Inscrite le 19 juin 2002, 52 ans) - 26 août 2002
Attentif ? Oui, pour le moins !
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 26 août 2002
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