La Nostalgie du Carillon de Virginie Holaind
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Le joueur d'accordéon
Un homme et son accordéon. L’homme est un immigré à Bruxelles. Il chantait, il était dans la joie mais son chant ne lui rapportait rien. Pas assez. Un jour, un homme « aux yeux et visage étroits » lui fait don d’un instrument. Qui peu à peu lui vole le peu de ses souvenirs. Reste le carillon de la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule qu’il écoute après s'être arrêté de jouer, le carillon qui retient sa mémoire de tomber dans l’oubli...
Un récit scandé par le rythme des mots, qui reviennent en boucle comme dans une chanson. "Dans la prose de la vie", les souvenirs en sont le refrain. Un texte à dire où l’accordéon figure l’interface entre l’homme et le monde. Qui, au gré de ses mouvements d’extension-contraction, prend l’air et le libère. Une fable à plusieurs entrées. Sur les affres du déracinement et la perte de repères, sur le déplacement des valeurs, sur les aléas de la mémoire et la conservation du temps... Une fable ouverte, aux multiples correspondances, qui donne lieu à plus d’une interprétation et dont la subtile musique se poursuit bien après la lecture.
Le joueur d’accordéon. Coupé de son passé et de son être, rendu sourd aux appels de la terre qu’il a quittée, l’accordéon sera l’instrument de sa perte. Seul le son du carillon le relie à un bruit qui fait sens pour lui, le relie à soi, le garde en éveil mais pour combien de temps, et ce mince fil, cette faible lueur suffiront-t-il ?...
À noter l’excellente couverture de Joachim Regout qui en un dessin stylisé met en perspective les éléments du récit, tels cet âne-accordéon dont le souvenir est porté par les sons et ce rouge de la couverture (sur laquelle tombent les pièces) qui donne le la de la composition.
Virginie Holaind possède un style et un univers qui donneront encore, on n’en doute pas, de nombreuses autres histoires fabuleuses.
Les éditions
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La Nostalgie du Carillon
de Holaind, Virginie
Maelström / Bruxelles se conte
ISBN : 9782875050908 ; 01/01/2011 ; 24 p. ; Bookleg
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Les critiques éclairs (4)
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Un air lancinant
Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 1 août 2012
L'auteur redonne corps à cet invisible de nos villes modernes. On le voit, on entend sa complainte. Dans une écriture scandée entre prose et poésie. Cette histoire se lit un peu comme une chanson, la chanson triste de cet accordéoniste
"Peut-être viendra ainsi le jour où il oubliera qu'il a oublié."
Critique de Sissi (Besançon, Inscrite le 29 novembre 2010, 54 ans) - 14 juin 2012
Le temps s'égraine, la mémoire fait défiler les souvenirs, on entend le cliquetis des pièces tout autant que les silences, dans un univers empreint d'une tendre nostalgie.
Et on est transporté....
"Il est neuf heures.
Radoslav sait qu'il a quitté son pays un jour pour une bonne mauvaise quelconque nécessaire abrupte urgente folle bonne mauvaise raison.
Ca devait être ça.
Mais il a oublié. Laquelle.
Il se souvient juste...
... du silence et les...qui écrasent le temps.
Juste un caillou ou deux dans ses souliers et l'odeur rance de la carriole du Père.
Et....Dino et la poussière.
Et Kiev et le carillon...de Petchersk.
Ensorcelant !
Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 23 mars 2012
Et, dans mon fauteuil, quand j’ai ouvert ce petit opuscule, j’ai libéré un air d’accordéon qu’un vieil homme qui ne l’était pas tant que ça, jouait pour faire tomber quelques pièces sur le carré de chiffon qu’il avait étendu à ses pieds, juste quelques pièces qui lui permettraient de vivre encore un peu. Car l’accordéon est magique comme la sorcière, la fée, il fait tomber les pièces sur le carré d’étoffe mais il dévore la mémoire du vieil homme qui oublie d’où il vient, là-bas à l’Est, où c’était mieux, où il existait.
En quelques mots délicatement brodés sur ces quelques pages, la sorcière, la fée, raconte l’exil, la solitude, la nostalgie, la pauvreté mais pas la misère, avec une profonde délicatesse, une grande tendresse sans jamais s’apitoyer inutilement, seulement un peu de mélancolie et de désespoir pour compatir, témoigner, montrer à ceux qui ne veulent pas voir en jetant une petite pièce au pauvre joueur d’accordéon sans même le regarder.
Un bijou de texte qui mêle la prose et les vers en une même poésie, qui jongle avec la forme pour rythmer la lecture comme le vieil homme rythme le souffle de son accordéon. Mais comme mes mots ne savent pas dire ce que je ressens, je laisse la place à la sorcière, la fée, et aux quelques fragments de texte que j’ai choisi presqu’au hasard de ma lecture :
Juste le silence et les pas qui écrasent le temps.
Son accordéon qui se tait quand chante le carillon.
Il étendra sa couverture rouge et ce bout minuscule où quelques pièces tomberont.
La joie, ça ne parle pas la même langue chez tout le monde.
Il se rappelle à peine d’où il vient. Là-bas, plaines de l’Est…
Il oublie ce qui existe ou a existé
Peut-être viendra aussi le jour où il oubliera qu’il a oublié…
Là-bas il existait. S’il s’en souvient bien. Il existait.
Oh n'exilez personne... !
Critique de Saint Jean-Baptiste (Ottignies, Inscrit le 23 juillet 2003, 88 ans) - 17 mars 2012
Il est à Bruxelles, il joue de l’accordéon, un accordéon qui se tait quand sonne le carillon de Saints-Michel-et-Gudule. Mais avant l’exilé était joyeux, il chantait. Maintenant il est triste, son accordéon lui fait perdre le peu de mémoire qui lui restait et, en perdant la mémoire, « il devient rien ».
Ce court récit est très bien imaginé, tout en douceur et plein d’humanité.
Virginie Holaind a évité les poncifs du genre : pas d’apitoiement sur le malheureux, pas de reproche aux passants qui passent sans regarder. Il y a seulement une histoire qui renvoie le lecteur à ses pensées sur la solitude, sur la nostalgie et sur l’oubli.
Ce beau texte est présenté comme un long poème. Il est mis en pages avec beaucoup d’originalité et divisé en courts chapitres, avec des blancs, comme pour laisser au lecteur le temps de savourer. Une présentation de qualité pour une écriture de qualité.
Nous avons d’autant plus de plaisir à faire la critique de La Nostalgie du Carillon que son auteur(e) le vaut bien. C’est une habituée du site et, sauf erreur, elle a fait ses premières armes dans « Vos Écrits ». Espérons que sa modestie ne l’empêchera pas de nous tenir au courant de ses prochaines productions, en lui souhaitant qu’elles seront aussi bonnes que celle-ci.
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