L'esprit tant du marcheur que de l'écrivain est d'aller à la rencontre des autres et d'en faire part au lecteur, de l'emmener dans cette marche, dans cet enrichissement.
Je déteste la marche et pourtant, à la lecture de ce récit, je me sentais par moment un peu envieux de ce qu'il vivait. Pour un peu j'aurais pris une carte et un sac à dos.

On obtient un livre humaniste, plaisant, où la lecture chemine au gré des rencontres. Pas de phrases plus ou moins dithyrambiques, mais des sujets développés sur deux voire trois pages maximum et chacun pouvant quasi être la base à un thème de réflexion ouverte, l'auteur posant la question et apportant ses arguments sans les présenter comme une vérité absolue. Les centres d'intérêt multiples rendent ce parcours très enrichissant, lui donnant du rythme, chaque page étant une nouvelle découverte, un élargissement des perceptions, des interrogations.
Cette perception est étayée par la présentation de chaque chapitre avec la liste des sujets traités.

L'une des performances de l'auteur c'est que, malgré ce choix de traiter une succession de sujets, la lecture reste fluide.

Le "je" est utilisé pour nous parler de ce qu'il voit, pour attirer notre attention et non pas pour nous parler de lui.
J'ai eu plusieurs fois, au cours de cette lecture, la réminiscence d'un ancien livre traitant d'un parcours à travers la région "Le tour de la France par deux enfants", notamment de par cette façon d'introduire les chapitres mais aussi par la curiosité, l'envie de découvrir, le plaisir de savoir permanents.
Peut-être faut-il voir là le fait que ce roman a quarante ans et se trouve dans la continuité de cet ouvrage si répandu dont l'auteur a pu être imprégné ?

Si une certaine nostalgie se ressent par moment, ce n'est nullement passéiste, l'auteur est résolument à l'écoute du présent.

Un ouvrage plaisant, incitant à la réflexion et invitant à se mettre à cheminer, le tout avec un réel agrément de lecture.

C'est le genre de livre qu'on déguste... on sait qu'on se sentira "orpheline" quand on l'aura fini... et on aura envie de le relire souvent !

Saule a déjà très bien exprimé ce que moi aussi j'ai ressenti à la lecture de ce livre.

Si vous aimez la marche, si vous aimez la France, la géographie, la sociologie, la nature, l'humour, la philosophie, la beauté de la langue française, "Chemin faisant" vous offre tout cela dans le récit passionnant et intelligent d'une traversée de la France des Vosges aux Corbières.

Ni guide, ni journal de marche, JL nous livre ses observations, ses joies, son amertume, la richesse (ou non)des rencontres, la vie des cafés, des petits villages traversés, des hameaux semi abandonnés. Nous progressons avec lui sur les chemins choisis et les régions traversées.

Un livre magnifique !

Jacques Lacarrière est un écrivain et un poète, il est un amoureux des mots et de leur étymologie. Dans les années 70, il a marché pendant six mois en France : partant des Vosges il a rejoint la mer méditerranée.

Comme il le dit dans sa préface, il y a une grosse différence entre un marcheur qui écrit et un écrivain qui marche. C'est évident que son livre est beaucoup plus qu'un compte rendu de sa marche : c'est une superbe évocation des chemins, une série de tableaux, une suite d'impressions et de réflexions, à la manière d'un impressionniste, sur les régions traversées, sur les gens rencontrés, les paysages.

J'ai éprouvé un véritable enchantement à la lecture de ce livre. J'avais l'impression d'être sur les routes de France, dans les forêts profondes ou les champs, de voir les petits hameaux abandonnés, les personnages pittoresques rencontrés par l'auteur. Tout est bon dans ce livre : les descriptions des paysages, la poésie de la langue, l'étymologie des mots, l'histoire du pays. C'est terriblement pittoresque et bucolique. Les réflexions par ci et par là de l'auteur sont toujours intéressantes, qu'il nous parle de la disparition des petits agriculteurs et de la désertification des campagnes, de la rage exterminatrice des chasseurs, des hôtels, du mauvais accueil des français vis à vis du nomade,.. c'est toujours un plaisir.

Ayant moi-même traversé la France à pied en 2004, j'ai trouvé dans ce livre des villages où j'avais, tout comme l'auteur, dormi, que ce soit dans le Morvan ou en Auvergne. J'avais l'impression en le lisant de revoir tous ces petits villages. Je marchais presque exclusivement sur des routes, alors que l'auteur est allergique au goudron et marchait toujours par les sentiers de forêts. Comme il le dit, même en prenant plusieurs mois, on reste un passant pressé dans tous les endroits merveilleux où on passe (sans compter ceux qu'on ne voit car on est passé à côté). Idéalement on devrait tous pouvoir passer quelques mois sur les routes, à intervalles réguliers, pour connaitre notre pays et les gens.

A lire de toute urgence, pour les amoureux de la marche, de la France, pour les amoureux des mots et de la poésie.