Une quête d'identité

Présentation

Unité de vie est le dernier roman écrit par Fabienne Swiatly et publié aux éditions La fosse aux ours en août 2011. La narratrice est une mère bosniaque. Enfant, elle a perdu ses parents durant la guerre qui opposait la Bosnie à la Serbie. Immigrée en France, elle n’a que de très vagues souvenirs de sa vie en Bosnie. Adulte, elle doit accompagner sa belle-mère, âgée, dans un établissement médical d’où elle ne sortira plus parce qu’elle perd la mémoire, les souvenirs et les visages s’estompent à mesure que le temps passe. L’absence de souvenirs unit ces deux femmes pourtant si lointaines. Seuls le dialogue et la photographie sont des tentatives pour restituer, faire resurgir un passé si étranger aux deux femmes mais pourtant si important pour préserver leur identité.



Perdre son passé c’est perdre son identité

Alors que les deux femmes se tenaient à distance l’une de l’autre lorsque la belle-mère était encore lucide, la maladie les rapproche. L’établissement médical dans lequel elle est internée constitue un hors-temps où le présent immédiat est le temps de référence. Afin d’oublier sa situation, la narratrice conte à sa belle-mère le récit de son quotidien qui n’a de sens que dans l’instantanéité de sa narration puisqu’il s’évaporera aussitôt qu’il sera terminé.

Ecouter le récit de ce qui se passe en dehors de son établissement médical est une échappatoire qui fait office de distraction nécessaire parce qu’elle n’a plus conscience de son passé et par corrélation de ce qu’elle est. Ainsi, on retrouve fréquemment sa demande « Raconte moi des choses. » Le verbe devient la musique nécessaire pour combler et meubler la pesanteur du néant qui rythme le quotidien de la belle-mère. En revanche, le verbe est pour la belle-fille cette mécanique qui ne rouille jamais et qui lui pèse à chaque fois qu’elle doit revivre les mêmes conversations et douter de sa compréhension.

Le dialogue est cette recherche d’une complicité féminine. Alors même qu’elle peine à se souvenir voire à reconnaître sa belle-fille, cette dernière cherche à débattre de la nouvelle place des femmes dans la société. Bien qu’elle perde la mémoire de son histoire, elle préserve les idées qui l’ont façonnée. Si la vieillesse altère les souvenirs, elle maintient en vie la substance même de son existence.



La photographie: une rédemption identitaire

La narratrice se trouve condamnée à vivre dans un présent éternel. Cherchant à comprendre qui elle est, perdue entre de vagues souvenirs de Bosnie où elle a vu ses parents décéder durant la guerre, elle s’arrête dans une librairie où figure un livre qui évoque ce conflit. Les seules résurgences de son identité bosniaque résident dans le nom « Médin » qu’elle donne à son fils. Photographiant les immigrés africains sur le port de Calais pour rejoindre l’Angleterre, elle immortalise par l’image la recherche d’un bonheur fantasmé, cherchant ainsi à comprendre ce qui lui est arrivé. Elle réactualise dans la photographie les potentialités de son identité. Mais photographier des immeubles et des lotissements en ajoutant des objets incongrus participe de la recréation d’un territoire oublié en Bosnie. La photographie est cet art qui facilite l’imagination d’un passé oublié parce qu’il n’est plus figuratif. En revanche, la photographie de famille en tant que fidèle représentation du réel, crée des liens entre ces deux femmes parce qu’elle oblige chacune des deux femmes rassembler les fragments de leur vie.

L’avis du blogueur

Ce roman dépasse la simple rencontre entre deux femmes. Il narre la création d’une complicité entre deux femmes dont le point commun est l’absence de souvenirs. Le dialogue est ce langage devenu obsolète et vide de sens parce qu’il s’use par réactivation des idées propres à chaque génération. En revanche, la photographie dépasse ce clivage parce qu’il réinvente le passé.

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  Unité de vie

  de Swiatly, Fabienne
  la Fosse aux ours
  ISBN : 9782357070226 ; 11,21 € ; 19/08/2011 ; 110 p. ; Broché

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