La Mecque-Phuket de Saphia Azzeddine

La Mecque-Phuket de Saphia Azzeddine

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par CC.RIDER, le 19 août 2011 (Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans)
La note : 6 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 869ème position).
Visites : 4 219 

Oeuvrette de beurette en colère

Fairouz et sa soeur, deux franco-marocaines, ont décidé d'économiser sur les gains de leurs petits boulots pour offrir à leurs parents le pèlerinage à La Mecque qui leur permettra d'être appelés « Hadj » et de gagner le respect des habitants de leur cité. Mais Fairouz est une beurette rebelle et un tantinet insolente. Elle cherche à s'affranchir de « l'estampille natale » tout en respectant ses parents, ses traditions maghrébines, en réussissant ses études et en restant vierge avant le mariage. Autant dire qu'elle est tiraillée et que beaucoup de ses choix tiennent du grand écart, tout comme ce voyage qui pourrait tout aussi bien être vers Phuket, son eau turquoise, son sable blanc et ses palmiers, si, pour une fois, elle ne se faisait pas passer après tout le monde.
Un petit roman assez nombriliste, témoignage des difficultés existentielles d'une jeune fille immigrée de la seconde génération qui n'accepte plus la soumission de la première et voudrait réussir dans une société hostile. Le tableau de la famille est assez réaliste et édifiant. Les filles, élevées sévèrement, ont de meilleurs résultats scolaires puis professionnels que les garçons, considérés comme de petits princes. On mettra au crédit de l'auteur une honnêteté certaine, une franchise brute de décoffrage et un style vif et dynamique basé sur de nombreux dialogues « pris sur le vif » et un langage parlé parsemé de verlan et autres tournures « banlieue ». Mais ces états d'âme d'une beurette en colère suffisent-ils à faire de ce livre autre chose qu'une oeuvrette vite lue vite oubliée ?

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Une bouffée d'air frais.

9 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 11 décembre 2016

Un adorable petit roman qui se lit en une après-midi.
Avec un humour fou, pince sans rire et truffé d'auto-dérision, Saphia Azzedine nous invite dans le monde d'une "beurette de banlieue".
Fairouz économise chaque petit sou afin d'offrir à ses parents le pèlerinage à la Mecque qui leur donnera le statut tant espéré et fera taire les voisins.
Si ce n'est déjà fait (car ce subtil bouquin date de 2010) courez chez votre bouquiniste ; un bon moment de lecture garanti.

Un charme fou …

10 étoiles

Critique de Ori (Kraainem, Inscrit le 27 décembre 2004, 89 ans) - 20 octobre 2015

Une fois émis ce constat en trois mots, je réalise avoir tout à la fois salué la brillante intelligence qui se dégage de ce roman savoureux, mais aussi la subtilité pétillante de la talentueuse écrivaine qu’est Saphia Azzeddine.

Avec sa verve malicieuse, Saphia Azzeddine fait litière des us et coutumes des membres de sa communauté maghrébine, unanimes à célébrer le mâle depuis la nuit des temps …

Par le truchement de la narratrice, Fairouz, héroïne universitaire de ce roman, l’auteure raille ici le désir des femmes de sa communauté à se marier à tout prix. D’autre part, elle incite les jeunes hommes de sa famille, hélas victimes du délit de faciès, à redoubler d’efforts pour se hisser à l’excellence, tout en encourageant vivement les allochtones de sa génération à s’insérer dans la population d’accueil.

Ces considérations, qui devraient être le guide de vie de tout immigré, sont distillées ici et là dans l’ouvrage qui gravite autour de Fairouz, laquelle décide avec sa sœur Kalsoum d’offrir à leurs deux parents démunis, un pèlerinage à La Mecque. A la faveur de ce roman, la narratrice présente à son lecteur tous les acteurs de sa vie quotidienne, les membres de sa famille, les voisins et camarades ainsi que le père, notamment, qui met sur le compte des lobbies toutes les interrogations que se pose le citoyen !

Tout en tournant le dos à des traditions pesantes et d’un autre temps, l’héroïne clame sa croyance en dernière page en assurant qu’il y a deux manières d’envisager Dieu ici-bas. Il y a ceux qui demandent pardon et ceux qui disent merci : elle a choisi de dire merci mon Dieu.

Particulièrement bien inspiré que ce roman, remarquablement spirituel et … à la spiritualité assumée !

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