La femme rompue de Simone de Beauvoir

La femme rompue de Simone de Beauvoir

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Pendragon, le 5 mai 2002 (Liernu, Inscrit le 26 janvier 2001, 54 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 6 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (2 118ème position).
Visites : 21 316  (depuis Novembre 2007)

Profondeur Tragique...

Ce « roman » de Simone de Beauvoir se présente en fait en trois nouvelles courtes racontées à la première personne du singulier par trois femmes. Ces trois femmes nous décrivent, nous font part de leurs angoisses face à une séparation douloureuse.
La première nouvelle présente une femme d’un certain âge qui ne peut supporter que son fils ne choisisse pas la voie qu’elle pensait avoir tracée pour lui. Il s'ensuit des crises, des disputes, entre la mère et le fils, la mère et son mari, la mère et sa bru. Simone de Beauvoir nous décrit ici de manière extrêmement précise les différents états d'esprit par lesquels une femme se sentant trahie peut passer… allant d’exagérations en refus de « voir » la vérité quand elle se présente.
La deuxième nouvelle est un récit très court et très rapide. Les phrases sont hachées, directes, sans syntaxes. Elles sont écrites comme elles sont pensées, sans fioriture. C’est le résultat des cogitations nocturnes d’une mère qui s'est vue privée de la garde de son enfant et elle lâche son fiel sur tout et tout le monde. Récit intense et hargneux, il n’est pas vraiment à prendre avec le dos de la cuillère.
Quant à la troisième nouvelle, c'est la plus profonde et la plus sensible. Une femme de 44 ans apprend que son mari, son seul et unique amour, la trompe. et pire que cela, qu'il la trompe depuis 10 ans ! Il s'ensuit un effondrement tragique d'une femme qui ne vivait que par et pour son mari. Le récit présenté par Simone de Beauvoir est en fait un journal intime où sont décrits les moindres états d'âmes de cette femme rompue…
L’écriture de Simone de Beauvoir est fantastiquement belle, riche et profonde. Elle manie les mots et la langue française avec une rigueur et une magie que je n'ai pas souvent eu l'occasion de rencontrer. Les sujets ici décrits sont d'une psychologie et d’une justesse rares, mais ils ne sont pas à proprement parler des récits qui respirent le bonheur et la joie de vivre.

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amour, toujours... ou jamais?

10 étoiles

Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans) - 11 mars 2012

Trois nouvelles, ou plutôt trois courts romans, écrits à l'âge de la maturité par une auteure devenue célèbre tant par son œuvre littéraire et philosophique que par ses prises de position politiques et surtout en faveur de la condition féminime. Trois portaits de femme, chacune atteinte par une crise existentielle. Crise de la quarantaine ("La femme rompue"), de la cinquantaine ("Monologue"), de la soixantaine ("L'âge de discrétion"), Simone de Beauvoir ne veut juger ni l'homme, ni la femme, ni même la société, et dresse seulement un portrait tout en finesse des situations inextricables dans lesquelles le couple s'engage au fil du temps, et dont la femme est la première victime. Ecrit avec beaucoup de sincérité et un style épuré, proche de la langue parlée (comme on le ferait dans un journal intime), ce recueil dresse un constat, toujours d'actualité, des espoirs que chacun(e) d'entre nous met dans l'amour. Amour toujours? La réponse est contrastée, puisque l'une des protagonistes va retrouver l'amour au sein de son couple, les deux autres non, bien que la fin de la troisième nouvelle reste entr'ouverte...

La douleur au féminin !

9 étoiles

Critique de DE GOUGE (Nantes, Inscrite le 30 septembre 2011, 68 ans) - 8 novembre 2011

Le personnage central de ces trois nouvelles est la douleur :
- celle d'une femme qui a construit sa vie sur une idéologie gauchiste et humaniste et qui voir son fils unique devenir, par opportunisme plus que par conviction ... Giscardien !
- celle d'une déséquilibrée qui fuit son propre système d'auto destruction, pour poursuivre les siens qui lui ont (heureusement) enlevé son enfant !
-celle enfin, d'une femme trahie par celui sur lequel (dangereuse construction) elle a basé sa vie !

Une analyse fine, et sans complaisance de chacun de ces destins ! Une écriture ferme et allant à l'essentiel !

Une Simone de Beauvoir, humaine, fouillant l'âme féminine avec sa richesse et ses limites.

Sont-ce de belles histoires (dans la forme : oui) ou de terribles interrogations ?
A chacun de juger !

3 nouvelles.

7 étoiles

Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 3 janvier 2008

Pas forcément facile que ce recueil de trois nouvelles. Trois nouvelles qui concernent des femmes, rompues, exaspérées, en crise, confrontées à des situations pénibles ou désespérantes. On n’est pas ici dans le meilleur des mondes ! Ne pas s’attendre à sortir indemne et guilleret de cette lecture ! Simone de Beauvoir fait ici étalage de toute sa sensibilité à percevoir, disséquer et exposer les ressorts de la psychologie humaine, de femmes ici en l’occurrence, et dans des situations limites ou pour le moins perturbées.
« L’age de discrétion ». La femme concernée ici est une mère. Une mère tourmentée de ce que son fils ne se comporte pas, ne fait pas les choix, comme elle les aurait faits, comme elle aurait souhaité qu’il les fasse. Drame de l’humain, cette mère ainsi « niée », ou contredite, s’épanche, explose, invective. C’est étouffant, destructeur … comme dans la réalité ?
« Monologue ». La nouvelle qui m’a certainement le plus touché tant elle m’a évoqué une femme de ma connaissance. Murielle, femme trahie, privé de son enfant, s’enfonce dans un délire haineux, bouleversant, sans issue. C’est palpable de souffrance et de désespoir. Un être vivant, les yeux bandés, enfermé dans les méandres obscurs de la vie et qui, toujours plus, se perd dans un néant inhospitalier. On est content d’en sortir … de la nouvelle. Pour ce qui est de Murielle …
« La femme rompue ». Loin d’une femme triomphante, on l’aura deviné, Monique vient de découvrir que celui qui partage(…ait) sa vie n’est pas l’être à l’amour exclusif qu’elle croyait. Terrible remise en question. Ecroulement des certitudes, de ces gestes du quotidien auxquels on s’est accroché et qui tout à coup se dérobent. Que reste-t-il quand ce qui fondait largement votre vie s’avère être un mirage, ou, pour le moins, un château de sable ?
Non. Pas une lecture aisée que ces trois nouvelles mais la vie, elle-même … ?

Que de questions dans cette critique et combien justifiées !

8 étoiles

Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 28 juin 2002

Tout d'abord revoilà notre Saint-Germain sur le pont et nous en sommes tous certainement plus que ravis ! Quelque chose manquait depuis un moment... Quels écrivains ont participé à la construction, même "modestement" de notre personne ? Vaste comme sujet !... Et il apportera autant de réponses qu'il y a de lecteurs. Qui oubliera Dumas et "Les trois mousquetaires" alors que d'autres y mettront Anne et Serge Golon avec "Angélique"... Mais si je devais répondre pour la période de "maturité" je dois reconnaître qu'avant de Beauvoir je mettrais Camus et Yourcenar. Et Dostoïevski ! Et Faulkner ! Et Hemingway ! Et...et...et... Tous les grands auteurs lus laissent en nous une empreinte indélébile qui vient ajouter sa pierre à un édifice ô combien complexe qui forme "nous". A y réfléchir une telle liste me semble longue... très longue... Et dans le lointain, j'entends les voix de Radiguet, de Kazantzaki, d'Istrati, de Kadaré, de Rimbaud, d'Apollinaire, de Giono et j'en oublie combien !...
Tant pis, je dirais quand même qu'Antigone, les Karamazov et d'Artagnan sont les personnages de la littérature qui me hantent le plus avec le Zénon de "l'Oeuvre au noir" et l'Hadrien des "Mémoires". A chacun sa réponse.

Quelle plume!

9 étoiles

Critique de Saint-Germain-des-Prés (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans) - 27 juin 2002

Mon avis rejoint celui de Pendragon.
Quelle intensité chez Simone de Beauvoir.
Peut-être suis-je partiale car il s’agit d'un de mes auteurs favoris.
La rigueur de son écriture et de ses descriptions psychologiques est fabuleuse.
En quelques traits, les personnages sont sous une loupe.
Jamais anecdotique, toujours pénétrante, parfois dérangeante, Simone de Beauvoir écrit des œuvres consistantes qui résistent au temps.
Non, en effet, ce n’est pas précisément une écriture qui respire le bonheur (même si l'humour n’est pas absent de tous les de Beauvoir.), mais les grands romans sont rarement des farces…
Quel style de livre laisse des traces ?
Quel style de livre est capable de nous poursuivre, des jours durant, de son atmosphère ?
Quel style de livre peut contribuer, ne fut-ce que modestement, à la construction de notre personne ?

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