Le livre noir de l'agriculture: Comment on assassine nos paysans, notre santé et l'environnement de Isabelle Saporta
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Manger tue, contamine et ruine
On trouvera difficilement plus défenseur des agriculteurs que moi. C'est pourquoi j'abordais ce livre avec circonspection, en le supposant être un brûlot de plus sur nos pauvres paysans français.
Les premières pages ne m'ont pas démenti. L'auteur y assène, un peu maladroitement certaines des conclusions de son livre et agace un peu le lecteur méfiant que je suis. Une sorte de procès à charge des paysans. Et puis on rentre dans le vif du sujet et au fil des pages, on tombe des nues. On hallucine, on pleure, on peste, on enrage, on se désespère.
Dans ce livre, l'auteur prend quelques fleurons de notre "industrie agricole" en exemple pour expliquer de quelle façon l'agriculture intensive ruine les agriculteurs, fusille l'environnement, dégrade la santé des consommateurs, réduit les bêtes à des condition de "vie" épouvantables et défie les lois de la nature. Tout cela pourquoi ? "Parce que c'est l'unique façon de nourrir de plus en plus de monde à moindre coût", comme aiment à nous le faire croire les partisans du productivisme agricole ? Pas vraiment... Et l'on découvre stupéfié, preuves à l'appui, comment les seuls qui retirent bénéfice de cette course délirante à la production sont la grande distribution, les fabriquant de produits phytosanitaires (joli nom pour parler de pesticides, insecticides, fongicides, etc.) et... les coopératives agricoles, initialement créées par des agriculteurs, pour défendre leurs intérêts !
J'avais envisagé de citer ici quelques faits décrits dans ce livre, du genre "il faut 16 000 litres d'eau pour produire 1kg de viande rouge", "le prix du porc augmente de 30% en grande surface, alors que le prix payé aux éleveurs baisse de 30% dans la même période", "les porcs bretons sont les plus gros consommateurs d'antibiotiques en Bretagne", (...) mais tout ceci ne serait que racolage facile (et il y a pourtant bien pire) car sorti de son contexte, fort bien expliqué dans ce livre qui démonte le complexe et infernal engrenage de notre agriculture "moderne".
Je préfère plutôt citer ce passage qui sonne comme une note d'espoir au milieu d'un océan d'abomination : "l'INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) est formel : cela coûte moins cher aux paysans de produire vertueux pour l'environnement que de polluer. C'est un fait prouvé désormais par les chercheurs de cet institut : l'agriculture intensive n'est pas rentable." Car des solutions pour sortir de ce cauchemar, il y en a. Et elles ne sont pas si compliquées à mettre en oeuvre. Mais elles impliquent de faire au préalable le constat que depuis 60 ans, l'agriculture dite productiviste est un vaste échec. Ce livre - qui remporte un joli succès depuis sa sortie - y contribue et devrait être lu par chaque français !
Pour faire court : si vous n'aviez qu'un seul essai à lire cette année, choisissez celui-ci, il pourrait bien changer votre façon de vous nourrir et d'envisager l'agriculture.
Les éditions
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Le livre noir de l'agriculture [Texte imprimé], comment on assassine nos paysans, notre santé et l'environnement Isabelle Saporta
de Saporta, Isabelle
Fayard
ISBN : 9782213656038 ; 0,40 € ; 16/02/2011 ; 252 p. ; Broché -
Le livre noir de l'agriculture [Texte imprimé], comment on assassine nos paysans, notre santé et l'environnement Isabelle Saporta
de Saporta, Isabelle
Fayard / Pluriel (Paris. 1982)
ISBN : 9782818502242 ; 9,20 € ; 18/01/2012 ; 250 p. ; Poche
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Les critiques éclairs (5)
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Triste constat sur l'agriculture et l'agronomie
Critique de Elya (Savoie, Inscrite le 22 février 2009, 34 ans) - 1 décembre 2013
Cet essai tient plus de l’enquête journalistique que d’une synthèse scientifique. Les sources sont plutôt rares car comme le justifie l’auteur, dans ce milieu, beaucoup de choses sont dissimulées. Il se réfère donc majoritairement aux propos échangés par téléphone et mail avec des gens qui dénoncent ce qu’ils ont vu pratiquer.
Contrairement au livre de Souchier, Le livre noir de l’agriculture n’est pas très optimiste et se focalise plutôt sur la mise en évidence des lacunes de notre système agricole et alimentaire (bilan cependant salutaire) plutôt que sur des propositions concrètes de moyens d’y remédier. Les toutes dernières pages abordent un peu cela, mais en stipulant que les initiatives doivent être plutôt politiques et venir d’en haut, comme si en tant qu’individu isolé nous ne pouvions avoir aucun poids. En cela j’ai préféré le livre de Souchier, même si ces deux lectures peuvent être complémentaires et m’ont plus que jamais convaincue de changer urgemment mon mode d’approvisionnement alimentaire, entre autres.
Une enquête à nous faire perdre l'appétit …..
Critique de CHALOT (Vaux le Pénil, Inscrit le 5 novembre 2009, 76 ans) - 30 avril 2012
Dans ce livre, l'auteure-journaliste va plus loin dans son enquête afin de montrer et de démonter les effets désastreux pour l'agriculture, les agriculteurs et les consommateurs des choix effectués pour nous et surtout malgré nous par les entreprises agro alimentaires et tous les producteurs des pesticides et fongicides.
« Dans le cochon tout est bon » voici ce qu'on entend encore dans nos campagnes... Aujourd'hui n'est n'est moins vrai que ce dicton : les cochons souffrent, sont maltraités, les petits qui viennent au monde avec le mauvais calibre sont éliminés et dans notre assiette, « il est la poubelle de toutes les industries du monde ».
Quant à la pollution de la nappe phréatique et du développement des algues vertes, n'en parlons pas...
Les subventions publiques permettent aux éleveurs de poursuivre dans leur course au rendement à la détérioration de la nature et de réparer les dégâts occasionnés sur l'état de l'eau....
Ils sont pollueurs et aussi les payés et non les payeurs! Cherchez l'erreur....
Les choix actuels sont fortement critiqués, qu'il s'agisse du développement de la culture du maïs, « mauvais pour la terre, mauvais pour l'environnement, mauvais pour l'eau, mauvais pour les bêtes », du choix opéré pour la production des pommes de terre, du blé ou des fruits, tout est basé sur la rentabilité à outrance au dépend de la qualité.
« On est passé d'un problème de recherche fondamental à un problème de santé publique ».
L'agriculteur est la première victime du productivisme : il se surendette pour s'équiper et pour acheter les produits chimiques, il nuit à sa propre santé et il ne voit pas le bout du tunnel.
Lui et le consommateur sont empoisonnés par des doses de plus en plus fortes de pesticides et autres produits médicamenteux qui se trouvent dans les assiettes.
Une autre logique est possible, souhaitable et indispensable, celle qui consiste à favoriser la culture bio pour tous.
C'est une alternative que nous ouvre l'auteure mais il est vrai qu'il faut du courage politique de la part de nos élites qui devraient écouter les petits paysans, les associations de consommateurs et arrêter de faire les yeux doux à une FNSEA acquise à cette fuite en avant....
L'enquête nous coupe l'appétit....Peut_être ….à moins qu'elle ne nous invite à manger autrement et à changer le cours de l'histoire .
Jean-François Chalot
Shadok agricole
Critique de Isad (, Inscrite le 3 avril 2011, - ans) - 19 juin 2011
Il s’agit d’un procès à charge contre l’élevage concentrationnaire (contre lequel les pays du Nord de l’Europe sont plus en pointe que nous), contre les coopératives (qui sont pourtant des associations de producteurs !), contre l’industrie alimentaire et la grande distribution qui confisquent les marges, contre l’industrie phytosanitaire qui rend tout le monde dépendant, contre l’esclavage consenti de nombreux agriculteurs qui réclament encore plus d’aides et ne voient pas qu’il faut changer totalement le système, contre les hauts fonctionnaires qui cautionnent le tout au nom de la compétitivité du pays.
La plupart des agriculteurs ne sont plus des entrepreneurs. Ils sont devenus de simples sous-traitants des industriels, obligés de se référer à leurs préconisations pour avoir un certain revenu assuré, même s’ils savent qu’ils épuisent les sols à long terme par manque de rotation des cultures. La solution à l’agriculture productiviste : réapprendre l’agronomie, tout simplement.
Cela donne certes un rendement moindre, mais pas d’endettement et des marges plus élevées et souvent aussi moins de travail pour l’agriculteur. Surtout, il y a moins de risque pour sa santé et celle du consommateur. Bien sur, on aurait ainsi moins besoin de l’industrie phytosanitaire dont le lobby est puissant (et cela ferai baisser le PIB!).
Quant au slogan d’une agriculture intensive nécessaire pour « nourrir le monde », il faudrait commencer par prendre soin de ce qui est produit : la FAO estime que 50% de la nourriture est jetée à la poubelle dans les différentes étapes qui vont du champ à la fourchette.
Le livre est une dénonciation. Il expose des faits et est très engagé vers un retour à plus de sagesse. Et c’est comme tout : il faut oser sortir du courant dominant. Avec les risques de tout innovateur au début : regard d’incompréhension de la part de l’entourage, voire ostracisme.
L’auteure n’en parle pas, mais le consommateur, c'est-à-dire tout le monde, chacun à son niveau, peut agir en faisant très attention à la provenance de ce qu’il achète. Nous sommes ainsi tous responsables de l’état du monde où nous vivons par les choix que nous faisons. « Rien n'arrête une idée dont le temps est venu » disait Victor Hugo...
IF-0611-3742
A lire absolument
Critique de Lu7 (Amiens, Inscrite le 29 janvier 2010, 38 ans) - 26 avril 2011
Un ouvrage assez complet pour comprendre les mécanismes complexes, internationaux, européens et nationaux, qui ont amené agriculteurs et consommateurs dans une impasse environnementale, économique et sanitaire.
Pour ceux qui ne se seraient pas encore rendu compte qu'on nous met de la merde dans l'assiette, et qu'il est impératif d'imposer, par sa façon de consommer, un changement radical des pratiques!
Prise de conscience
Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 19 avril 2011
L'auteur explique les conditions de production de différents produits issus de cette agriculture vouée au rendement, en commençant par dénoncer les méfaits de l'élevage industriel porcin, avant de s'attaquer aux dégâts commis sur les nappes phréatiques, et d'enchaîner avec les cultures trop intensives, et bourrées de pesticides, du maïs, de la tomate, de la pomme de terre, de la pomme.
" Récapitulons. 57 milliards d'euros pour le budget de la politique agricole commune. Des centaines de milliards investis, en pure perte, dans l'eau. Que ce soit dans son gaspillage, via le financement de l'irrigation et de la consommation outrancière de l'agriculture, ou dans sa dépollution. Des aides pour supporter la sécheresse, une fois que la ressource en eau a été mise à mal. Des aides pour lutter contre les algues vertes, des aides pour méthaniser le lisier, des aides pour soutenir le revenu des agriculteurs, des aides, des aides, encore des aides,.. Toujours plus d'aides. Pour colmater ce système délirant. Sans jamais le remettre en cause, ni se poser les bonnes questions".
Isabelle Saporta stigmatise les autorités tant françaises qu'européennes pour leur absence de remise en question. Un peu comme un cheval au galop qui avancerait avec des oeillères. "On va droit dans le mur" déclare un témoin dans ce livre. "Tout cela aux frais du contribuable consommateur qui, non content de payer pour sa nourriture, paie aussi pour la décontamination de son environnement et pour les risques que cette agriculture fait peser à sa santé"
On apprend notamment que "chaque jour, nous avalons, au bas mot, entre vingt et trente résidus de pesticides. Et les chercheurs d'indiquer qu'il existe un lien indubitable entre l'exposition aux pesticides et le cancer. L'incidence du cancer a ainsi doublé en vingt-cinq ans".
Ce que révèle cette enquête est édifiant. Le bilan dressé par la journaliste est très noir, mais se clôture néanmoins sur une note d'espoir, en prônant un retour à l'agriculture bio, au savoir-faire de nos ancêtres. Une solution tout aussi viable économiquement et durable.
Cette enquête est très bien structurée et explique très simplement les tenants et aboutissants de l'agriculture actuelle.
Ce livre est instructif mais aussi très angoissant.
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