Comment on se marie de Émile Zola

Comment on se marie de Émile Zola

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Zagreus, le 5 janvier 2011 (Inscrit le 16 novembre 2010, 40 ans)
La note : 10 étoiles
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Selon que vous serez puissant ou misérable...

Publié en 1893 mais écrit en 1875, le recueil analyse et illustre avec un réalisme cinglant un phénomène particulier : le mariage.

Après une préface générale qui retrace l’évolution historique de la notion d’amour (on passe de l’amour « parfaitement noble, d'une tendresse réfléchie, d'une joie honnête » au XVIIe siècle à l'amour « garçon rangé, correct comme un notaire, ayant des rentes sur l'État » au XIXe siècle) et donne les caractéristiques du mariage moderne (l’éducation diamétralement opposée des filles et des garçons creuse entre eux un fossé d’incompréhension : « l'homme de nos jours n'a pas le temps d'aimer et il épouse la femme sans la connaître, sans être connu d'elle. »), Zola en arrive aux exemples. Quatre récits racontant la formation d’un couple, chacun dans une couche sociale différente : aristocrates (Maxime de La Roche-Mablon et Henriette de Salneuve), bourgeois (Jules Beaugrand et Marguerite Desvignes), commerçants (Louise Bodin et Alexandre Meunier) et ouvriers-artisans (Valentin et Clémence).

Ces quatre études de cas passent par les mêmes étapes essentielles : le contrat chez le notaire (essentiel chez les notables, hors de prix ou simplement pas envisagé pour les autres), l’union à la mairie (la seule pour Valentin et Clémence), à l'église (la plus prestigieuse et la plus courue pour le grand monde), le repas de noces (somptueux, modeste ou carrément rationné pour les plus pauvres) la nuit de noces (inexistante pour les deux premiers couples, simple et banale pour le troisième, passionné pour le dernier) la vie après le mariage (mésentente pour les plus riches, on fait chambre à part et on recherche une maitresse ou un amant ; les boutiquiers ne savent pas vraiment s’ils s’aiment mais n’ont pas le temps de penser à autre chose qu’à leur bilan comptable; dans la classe populaire on s’aime toujours mais on a sombré dans l’alcool).
Le résultat est terrible : pour les trois premiers cas, ce sont des mariages arrangés en vue de tenir son rang ou d’élargir le cercle de ses relations ou juste parce qu’on a peur d’être déclassé. Et comme il n’y a que l’intérêt qui compte, dans ces mariages là, il n’y a pas d’enfants. Seul le dernier cas est un mariage d’amour et le couple fait trois enfants mais il finit par mener «cette vie de querelles et de misère, dans la saleté du logis souvent sans feu et sans pain, dans la lente dégradation du ménage »…

Sommes-nous égaux devant le mariage ? Oui dans un certain sens car, pour tous ces couples, le dénominateur commun, qui détermine souvent le malheur et rarement le bonheur, c’est l’indétrônable argent (la dot des épouses, les frais de notaire, le prix de la robe de la mariée, les frais du repas de noces…) C’est ce que montre Zola, véritable entomologiste doué d’un sens de l’observation inégalé, révélant la substance même d'une catégorie sociale, soulignant à la manière d’un caricaturiste et avec un humour cruel (aspect peu connu de son œuvre) les antagonismes qui demeurent malgré tout entre mari et femme. C’est en cela que son livre a toujours pour nous un écho profond…

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