Lettres pour ma poubelle sur le petit monde de l'édition : textes à dire de Paul Desalmand

Lettres pour ma poubelle sur le petit monde de l'édition : textes à dire de Paul Desalmand

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Lucien, le 21 mars 2002 (Inscrit le 13 mars 2001, 69 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (24 606ème position).
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Des trésors dans une corbeille à papier.

Paul Desalmand a le sens du «concept éditorial». On lui doit notamment l’idée de la «vraie-fausse interview», celle de biographies réalisées sur le modèle de son «Cher Stendhal» (Cher Maupassant, Cher Léautaud, Chère Colette…), celle de «Lettres pour ma poubelle sur le petit monde» (de la télévision ; de la presse ; du cinéma ; du sport…) Ces collections verront-elles le jour ou resteront-elles cantonnées à leur premier numéro? Bien malin qui pourrait répondre à cette question. Bien malin, quand on connaît un peu le petit monde de l’édition. Ce petit monde (univers impitoyable, diront certains) que Paul Desalmand décrit ici avec un humour acerbe dans une série de «vraies-fausses lettres» jamais envoyées (encore que…) mais qui, toutes, atteignent leur but.
L’épigraphe de Musil lance le ton : «Beaucoup parler de soi passe pour bête. L'humanité a trouvé une manière originale de tourner cet interdit : l'écrivain!» Suivent une série d’épîtres qui brocardent à tour de rôle éditeurs vénaux, auteurs pas très bons, journalistes jeteurs de poudre aux yeux, écrivains adulés, éditeurs auto-édités… Epinglons entre autres la lettre d’une étudiante américaine («Cunnilinguistic Department».) à Philippe Sollers, à propos de quatre emplois du verbe «enculer» dans son roman «Femmes» ; «L’huître et le néant», ou le gueuleton frugal d’un «grand écrivain, spécialiste de désespoir» qui, sirotant «avec un petit bruit les dernières gouttes de son cognac», produit ces aphorismes désenchantés : «La vie est une maladie incurable» ou «J’aspire au bonheur des cailloux» ; sans oublier la comparaison entre une brave concierge montmartroise et Françoise Verny, conseillère en édition, auteur de trois ouvrages dont Desalmand se demande naïvement : «si le manuscrit était arrivé, sous un nom d’emprunt, chez les différents éditeurs de la place, aurait-il reçu un accueil favorable?» Un aperçu un peu plus complet du style de Paul Desalmand vous tente ? Je vous propose de déguster ce petit pastiche de La Bruyère , «Giton et Phédon» : « Giton a beaucoup d'idées, il aime la littérature, la vraie. Sa culture est immense et il a conservé tout l'enthousiasme de ses jeunes années pour la vie de l'esprit. Lui parle-t-on d'un projet, il s'échauffe, est prêt à vendre ses meubles. Vient-on de découvrir un nouvel écrivain en Amérique du Sud, il passe la nuit à le lire. Il aime le papier, l'odeur de l'encre du livre qui vient de paraître, rêve de grandes entreprises, ne compte jamais le temps qu'il consacre à un auteur. Il mourra à son bureau en corrigeant des maquettes. Il laissera une trace et, sur son lit de mort, en pensant à tous les livres qu'il a fait naître, à tous les auteurs à qui il a donné la possibilité de s'exprimer, à tous les lecteurs qu'il a émus, il pourra se dire : «J'ai quand même fait ça.» I1 est pauvre.
Phédon vend des livres comme il vendrait du savon. Il a d'ailleurs promu de la lessive autrefois, mais l'édition lui est apparue plus prestigieuse, plus amusante et surtout plus rentable. Pour lui, un livre est un produit comme un autre. Il lit les graphiques de ses ordinateurs, converse avec les spécialistes de marketing et les banquiers, n'invente rien, mais flaire ce qui est dans l'air, les courants porteurs. La poésie pour lui est quelque chose de ringard, le roman pas très in, la grande littérature obsolète (encore que, on ne sait jamais, ça pourrait devenir juteux). A ses yeux, il n'existe que deux sortes de livres, ceux qui se vendent et ceux qui ne se vendent pas. Il aurait laissé Baudelaire et Verlaine crever de faim. La seule prose qui trouve grâce à ses yeux est une littérature de plaisance et de complaisance, branchée sur un sujet mode et signée par un présentateur de télé ou une célébrité quelconque. Il est riche.»
Paul Desalmand aime les citations. Paul Desalmand aime l'amitié. Ce n’est donc pas un hasard si j’ai glané dans ce petit volume hautement recommandable cette belle phrase d'André Malraux que je vous livre pour terminer : «Il faut être avec ses amis, surtout quand ils ont tort.» De passage à Paris, faites donc un petit détour par la rue Caulaincourt. Au 50, sans les rayons de la librairie «Marie Vaut d'Age», un exemplaire numéroté et dédicacé des «Lettres pour ma poubelle» n'attend que votre bon vouloir…

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Les éditions

  • Lettres pour ma poubelle [Texte imprimé], sur le petit monde de l'édition Paul Désalmand
    de Desalmand, Paul
    P. Désalmand / Ecrire et éditer
    ISBN : 9782951517707 ; EUR 10,52 ; 01/01/2000 ; 187 p. ; Broché
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Jamais deux sans trois.

8 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 69 ans) - 12 avril 2003

Troisième larron des rencontres littéraires à la Maison Losseau (mons, 37 rue de Nimy, le 26 avril 2003), Paul Desalmand parlera de son dernier livre, "Ecrire est un miracle", avec sa verve coutumière. Spécialiste de Stendhal, docteur ès lettres, Paul Desalmand
déshabille le petit monde de l'édition avec un cynisme brillant. Un débat franco-belge Ancion - Desalmand pourrait s'avérer assez intéressant...

Marie Vaut d'Age

8 étoiles

Critique de Lucien (, Inscrit le 13 mars 2001, 69 ans) - 24 mars 2002

La référence à cette petite librairie montmartroise, juste en face de chez Paul Desalmand, c'était plutôt pour le folklore. L'ouvrage est disponible chez les partenaires habituels de "critiques libres" ou chez l'auteur, qui se fera un plaisir de le dédicacer et de l'expédier aux fidèles du site. Me contacter pour plus de détails. Il n'en reste pas moins que ce quartier de Paris vaut le détour : au cimetière de Montmartre, vous pourrez vous recueillir sur les tombes de Stendhal (plus exactement "Arrigo Beyle"), Berlioz, Dumas fils, Michel Berger, François Truffaut ou... Dalida. Vous êtes aussi à deux pas du quartier "Amélie Poulain" (café des deux Moulins, épicerie Colignon...)

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