Parmi les perdants du meilleur des mondes de Günter Wallraff

Parmi les perdants du meilleur des mondes de Günter Wallraff
(Aus der schönen neuen Welt)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités

Critiqué par CHALOT, le 2 novembre 2010 (Vaux le Pénil, Inscrit le 5 novembre 2009, 76 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (22 864ème position).
Discussion(s) : 1 (Voir »)
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un reportage effrayant et saisissant

« Parmi les perdants
du meilleur des mondes »
livre de Günter Wallraff
éditions la Découverte
mars 2010
19 €
320 pages


Le profit.... rien que le profit

Après son livre « tête de turc » paru en France en 1986, le journaliste Günter Wallraff récidive... Rien n'a changé ou presque en Allemagne.... La situation s'est dégradée: les derniers acquis sociaux et les ultimes digues de protection tombent ou du moins se lézardent.
Il n'hésite pas à se transformer en « homme noir », pour constater, horrifié, que le racisme ordinaire subsiste et se développe sans même que les « braves » citoyens puissent imaginer être hors la loi.
Sa « mutation » en SDF lui fait découvrir le système qui permet à des œuvres dites caritatives d'empocher des sommes non négligeables aux dépens des naufragés de la vie. C'est ainsi que l'Église en arrive à gérer un camp de travail à Pétrus dans une petite ville « proprette » sur les bords du Rhin.... Les moyens mis en œuvre n'exaltaient pas toujours la charité chrétienne, avant-hier mais aussi aujourd'hui.
Le troisième reportage sous déguisement conduit notre journaliste à travailler dans un centre d'appel. En France, nous sommes nous aussi inondés d'appels téléphoniques parfois intempestifs. Des personnes crédules ou vulnérables se retrouvent ainsi avec des achats inutiles et des notes à payer non désirées. Beaucoup ignorent que les appelants sont surexploités, corvéables à merci et jetables.
Le lecteur n'a encore rien vu... Le pire arrive avec le sale travail pour la mauvaise bouffe dans une boulangerie sous-traitante de Lidl.
Cette chaîne de supermarchés discounts est notoirement connue dans toute l'Europe :  « pour sa gestion des ressources humaines-management à la cravache, flicage, privation des droits syndicaux ».
Cette « boulangerie » comme Lidl constitue le « bagne » moderne, un capitalisme primitif qui aurait dû disparaître depuis longtemps.

Après ces quatre reportages en immersion totale, Günter Wallraff poursuit son enquête d'une manière plus classique afin de nous montrer et surtout pour dénoncer les conditions de travail effroyables qui sont le lot commun de centaines de milliers de précaires.
Le secteur public en voie de privatisation n'est pas épargné par une logique inhumaine.
Dans la Deutsche Bahn, les récalcitrants à la privatisation des chemins de fer sont virés ou mis au placard pendant que l'argent public engraisse les commis du système et les politiques complices.
La fin du voyage a lieu dans le cabinet de curieux avocats qui expliquent à des patrons comment se débarrasser le plus (il)légalement possible des syndicalistes et des délégués du personnel.
Le journaliste conclut en exprimant ses doutes quant à la venue d'un monde plus humain.
Évidemment, aucun rafistolage n'est possible et s'il faut défendre les derniers acquis, dénoncer les scandales, cela ne suffit pas.
Il faut continuer à lutter et mettre à bas cette société et bâtir du neuf.

Jean-François Chalot

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Exclusion et misère : la face cachée d’une économie riche et prospère

8 étoiles

Critique de Colen8 (, Inscrite le 9 décembre 2014, 82 ans) - 16 juin 2016

Un journaliste allemand connu pour ses enquêtes et ses documentaires s’est efforcé de raconter quelques cas extrêmes des laissés pour compte de la première puissance économique européenne. On est en 2009, au pic d’une crise qui a produit 7 millions de chômeurs et conduit plus 350 000 personnes à la rue. Cette crise qui oblige les chômeurs de longue durée à accepter un travail à 1€ ou 1,50€ de l’heure pour continuer à percevoir des aides de quelques centaines d’euros par mois. Dans la plupart des cas leur vie a basculé après des coups durs imprévisibles, perte d’emploi, prison, faillite familiale ou professionnelle. Certains encore plus fragilisés ont perdu ou renoncé à leurs droits. Quelques uns sont des migrants.
Sous nom d’emprunt, en anonyme grimé et déguisé il s’est glissé parmi eux, se déplaçant un peu partout à Coblence, Frankfort, Cologne sa propre ville, et pas seulement dans les grandes villes. Il a expérimenté la nuit dehors à -15° dans un sac de couchage isotherme seulement jusqu’à 0°, les foyers sordides où il a recueilli les confidences de ses compagnons temporaires de misère. Il s’est fait embaucher dans des centres d’appel sans foi ni loi pour y découvrir l’arnaque institutionnalisée comme seul moyen pour les télévendeurs d’atteindre l’objectif fixé au prix d’y perdre leur âme. Derrière l’apparence d’un Noir parlant sans accent, ce sont des réactions de crainte, d’indignation, des humiliations gratuites qu’il n’a cessé de subir venant de ceux qu’il croisait, ne serait-ce que pour louer un logement ou simplement se joindre à un groupe de randonneurs.
Dans un autre registre des témoignages en disent long sur des conditions de travail inhumaines et même dangereuses. Répercutant les prix écrasés d’une grande surface (donneur d’ordre), le patron sous-traitant d’une boulangerie industrielle trouve toujours plus d’astuces pour s’octroyer le maximum de profits au détriment des salariés. Ni un café-boutique d’une chaine multinationale avec ses salariés précaires ni un restaurant gastronomique avec ses apprentis ne font mieux. Horaires, salaires, sécurité, santé, hygiène, les règles élémentaires des droits des salariés y sont bafouées sans scrupule. Les contestations sont sanctionnées par le chantage à l’emploi. Les licenciements secs sont significatifs d’un temps que l’on croyait révolu. Ailleurs c’est un avocat d’affaires qui se vante de pouvoir « débarrasser » les entreprises de leurs éléments jugés trop revendicatifs (les représentants du personnel), ou encore ce sont les pressions internes pour « casser » des cadres (y compris de direction) opposés à la décision de privatiser les chemins de fer allemands.

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  Les perdants du meilleur des mondes 4 Saule 25 novembre 2010 @ 17:56

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