Bonaventura MIR gouverneur du domaine du Replat

Un récit riche et truculent traité à la manière d’une fable, Bonaventura MIR jeune homme érudit choisit de vivre seul, exilé de son petit village catalan, sur un replat escarpé de la montagne proche. C’est le fils du maire du village de Malpuis, petit déjà il était bizarre mais après son retour de la ville, à la fin de ses études de droits, tous les villageois s’accordent à penser qu’il est : « un peu fêlé de la cafetière ».
Un soir, un chien de chasse agonise sur le replat et pour mettre un terme à ses hurlements déchirants, Bonaventure et les villageois vont le chercher, en voulant le rejoindre, Bonaventura chute violemment, il se retrouve sur le replat avec le chien, il décide in extremis d’y rester.
Ce petit coin de terre ingrat et coupé de tous par les précipices qui le bordent, deviendra sa propriété, son pays, il en assurera le gouvernement. Mettant à profit ses études de droit, il s’emploie sur le champ à élaborer les lois qui s’appliqueront aux habitants du replat (les animaux). Pour être en accord avec ses doubles fonctions, culture et agriculture, il s’invente deux identités complémentaires, Ventura MIR agriculteur qui travaille la terre pour manger et Bonaventure MIR notaire qui édicte les lois, une sorte de dédoublement de la personnalité qui a l’avantage de doubler le peuplement humain.
« Au nom de Dieu qu’il soit patent que moi, Ventura MIR agriculteur du village de Malpuis du district de Talarn, naguère héritier du Poblador, afin de subvenir à mes besoins matériels et spirituels, fait l’acquisition à perpétuité en vertu du droit du premier occupant,…d’une étendu de terre en friche….Sont témoin de cette attribution, la nature et les animaux tous usufruitiers du domaine et le nouveau propriétaire Ventura MIR, qui ne sait pas lire et je signe en son nom, Bonaventura MIR, sur l’écritoire du replat, le dix neuvième jour d’août 1837».

Malgré les appels et les tentatives désespérés de sa mère et de son père pour le faire revenir, il s’accroche à son bout de terre et en tire subsistance. Cet état de chose fait l’affaire de son frère qui entend être le seul héritier du domaine de ses parents, le Pablador et qui lui voue une haine féroce.
Ayant tout abandonné, jusqu'à son héritage, Bonaventura croit pouvoir vivre tranquille en compagnie de ses lois qu’il perfectionne sans cesse et des quelques animaux bienveillants qui peuplent le replat, mais c’est compter sans l’intarissable propension de l’homme et de la femme à tirer profit ou chicane de tout et de tous. Lors de péripéties rocambolesques, il devra protéger son territoire contre l’intrusion de son frère, de sa veuve cherchant la semence de l’héritier survivant, d’un vieil ami étudiant, d’un vendeur de bible protestant, d’un savant et j’en passe.
« En fin de compte, pour le vieux aussi ce qui comptait c’était l’héritier, pas l’aîné, perdu à jamais, coincé dans la montagne, au milieu des précipices de la folie »
Un récit poétique et divertissant, le langage frustre et pimenté des villageois crée un contraste hilarant avec le vocabulaire procédurier de Bonaventura, dont la philosophie humaniste étend le domaine de la loi aux animaux et aux minéraux.
C’est aussi une description intéressante des rapports sociaux et des moeurs dans un petit village catalan au dix neuvième siècle, une réflexion par la dérision, sur l’héritage, la propriété, la loi, l’état.
Face aux humains cupides et conformistes qui l’entourent, Bonaventura fait office de juriste poétique, c’est surtout un homme qui au delà du délire ou par ce délire tente d’être libre à une époque troublée et archaïques, où la place de chacun était assignée à vie.

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  Le sauvage des Pyrénées [Texte imprimé], roman Pep Coll traduit du catalan par Edmond Raillard et Juan Vila

  de Coll, Pep Raillard, Edmond (Traducteur) Vila, Juan (Traducteur)
  Actes Sud
  ISBN : 9782742787913 ; 23,90 € ; 29/05/2010 ; 316 p. ; Broché

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