L'Amant de la Chine du Nord de Marguerite Duras
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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« C'est un livre. C'est un film. C’est la nuit. »
Il faut écrire la douleur pour ne pas qu’elle soit oubliée. La réécrire même. Inspirée des images du film, peut-être, c'est le retour dans une histoire douloureuse en apprenant la mort du « Chinois ». Toute affaire cessante, Marguerite Duras revient sur ce récit que fut « L’Amant », autobiographique et scandaleux. Un an pour réécrire cette histoire dans toute l'impudeur et la franchise qu'elle mérite.
L’enfant et le Chinois. Une histoire tragique que rien ne destine à une fin heureuse. L’hystérie désespérée d’un amour impossible et qui fait mal…
« L'histoire est déjà là, déjà inévitable, Celle d’un amour aveuglant, Toujours à venir, Jamais oublié. »
Sensualité, souffrance. L’insupportable besoin de posséder ce qu'on ne pourra garder à soi à tel point que la douleur finit par remplacer tout désir. Dans l'atmosphère suave et languissante de l'Indochine des années 30, ils se découvrent, s'aiment, se haïssent. Et finalement vont devoir se perdre. Autour gravite « la mère », personnage inéluctable des récits de Marguerite Duras. Femme dénigrée, repoussée mais follement aimée. Puis les deux frères. le petit frère, Paulo, le premier amour. Et l’aîné, Pierre, violent et criminel. Et enfin, Thanh, le frère enfant perdu du Siam…
Et puis vient l’inévitable dénouement, au son de cette Valse Désespérée comme l’appelle l’enfant et qui marque le début et la fin de cet amour sans avenir.
« - On ne se reverra jamais. Jamais ? - Jamais. - A moins que… - Non. - On oubliera. - Non. - On fera l’amour avec d'autres gens. - Oui. Les pleurs. Ils pleurent très bas. »
« L'Amant de la Chine du Nord » est un magnifique récit, direct et sensuel. Orienté sur les perceptions et la vision de cette histoire et de son contexte que fut la langoureuse Indochine, ce roman nous transporte sur les rives du Mékong, dans les rues de Saigon et au creux de cet amour fort et douloureux, bercé par l’écriture délicieusement sans réserve de Marguerite Duras. Superbe.
Les éditions
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L'amant de la Chine du Nord [Texte imprimé] Marguerite Duras
de Duras, Marguerite
Gallimard / Collection Folio.
ISBN : 9782070388097 ; 5,72 € ; 01/01/1993 ; 246 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (9)
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Le survol d'une passion amoureuse
Critique de Sundernono (Nice, Inscrit le 21 février 2011, 41 ans) - 28 février 2022
Je dois avouer avoir été très surpris par ce style, très épuré, particulièrement contemporain et par l’emploi régulier du terme « l’enfant » pour évoquer le personnage central. J’ai eu l’impression que Marguerite Duras voulait créer un certain malaise chez le lecteur en soulignant la jeunesse de la maîtresse de cet amant de la Chine du Nord. Si tel était son désir, cela a fonctionné pour moi.
Je ne peux pas dire avoir apprécié ou été impressionné par ce classique de la littérature contemporaine que l’on survole de manière très légère.
Sentiment mitigé mais tout de même positif.
Perversion, sentiments et barrière culturelle
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 13 juin 2013
L'Amant était banalement voyeur ; L'Amant de la Chine du nord baigne dans la perversion, mais est mieux conçu, car l'analyse psychologique y est plus poussée, les sentiments analysés, la barrière culturelle et le décalage générationnel entre les deux protagonistes montrés avec minutie.
Cela fait d'autant plus mal, l'oeuvre est d'autant plus malsaine, quelque peu choquante, il faut bien que je l'avoue ; mais, après tout, chaque sujet s'avère décibel et digne d'intérêt. Ce livre est fait pour comprendre autant que pour troubler. J'en suis sorti à la fois amer, écoeuré, mais aussi enrichi d'une réflexion. Ce roman n'est pas sans intérêt.
j'ai préféré
Critique de Crapouillon (REIMS, Inscrite le 30 décembre 2006, 34 ans) - 7 mars 2007
Marguerite Duras y conte davantage une histoire et non des souvenirs en vrac. J'ai sans doute préféré pour cela.
J'avais reproché à "l'Amant" d'être trop résumé mais ici, il y a plus de détails, l'auteur s'attarde sur des événements. Je pense que "l'Amant de la Chine du Nord" est moins autobiographique que le premier. Mais ici, on trouve un fil directeur dans les événement : ce n'est pas un amas de souvenirs en vrac.
L'ambiguïté de l'époque ressort bien dans son roman : elle fait de son frère son amant, elle désire son amie Hélène Lagonnelle ce qui prouve la volonté de Duras de créer un roman suivant les moeurs de l'époque d'écriture et non pas seulement un écrit autobiographique (cet aspect était beau coup moins présent dans "l'Amant").
Je me suis posé une question : décrit-elle le film ou décrit-elle ce qu'elle voudrait que soit le film ?
mais n'ayant pas trouvé les dates du film, je n'ai pas pu y répondre.
Je pense que le style d'écriture est moins déconcertant dans "l'Amant de la Chine du Nord" ce qui m'a fait le préférer. C'est une question d'habitude et j'avoue que je n'ai pas l'habitude de lire ce genre d'écrivain.
Une catharsis
Critique de Mieke Maaike (Bruxelles, Inscrite le 26 juillet 2005, 51 ans) - 11 mai 2006
On retrouve le même thème, les phrases courtes, l’impudeur, la sensualité, la douleur. Mais « L’Amant de la Chine du Nord » est nettement moins bon. Il s’agit d’une simple chronologie des faits. Il donne une plus grande importance aux personnages secondaires, au contexte et à la réalité de la vie en Indochine. Une version cinématographique « tout public » de cette histoire d’amour, en quelque sorte. On ne retrouve malheureusement pas la magie de « L’Amant », cette évocation décousue de souvenirs et de sensations, par petites touches, tableaux successifs et impressions.
Ce livre est donc intéressant comme éclairage de « L’Amant », mais ne doit pas être considéré comme une œuvre majeure de Duras.
Concision
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 6 septembre 2005
« C’est un poste de brousse au sud de l’Indochine française.
C’est en 1930.
C’est le quartier français.
C’est une rue du quartier français.
L’odeur de la nuit est celle du jasmin.
Mêlée à celle fade et douce du fleuve. »
Ou encore
« Le ciel, on le voit d’un bord à l’autre de la terre, il est une laque bleue percée de brillances.
On voit les deux enfants qui regardent ensemble ce même ciel. Et puis on les voit séparément le regarder.
Et puis on voit Thanh qui arrive de la rue et ve vers les deux enfants.
Puis on revoit le ciel bleu criblé de brillances.
Puis on entend la Valse sans paroles dite « désespérée » sifflée par Thanh sur un plan fixe du bleu du ciel. »
Des indications cinématographiques de cet ordre il y en a quantité. Voire des renvois en bas de page qui suggèrent :
« En cas de cinéma on aura le choix. Ou bien on reste sur le visage de la mère qui raconte sans voir. Ou bien on voit la table et les enfants « racontés » par la mère. L’auteur préfère cette dernière proposition. »
Ne pas croire pour autant qu’il s’agit d’un simple script, désincarné et fixant des paysages, des situations et des visages. C’est bien un roman d’amour. D’amour décalé dans une situation de type « fin de colonie » tout ce qu’il y a de plus décalé.
C’est plein de chair, de sueur et de choses bizarres.
Ce roman, ou cette façon d’écrire, je ne sais pas, m’évoque irrésistiblement un écrivain qui serait parvenu à la perfection dans le genre qu’il s’est choisi. A la perfection, sauf que ce genre est une impasse et que lui seul peut y aller.
Je veux dire que je n’imagine pas quiconque faire mieux que M. Duras dans son genre. Mais c’est une très belle impasse !
Assez d'accord...
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 6 février 2004
pas touché
Critique de Echemane (Marseille, Inscrit le 12 juillet 2002, 45 ans) - 5 février 2004
Jeanne Moreau . Marguerite Duras. La passion.
Critique de Miller (STREPY, Inscrit le 15 mars 2001, 68 ans) - 1 octobre 2002
Le titre du livre de Yann Andréa, son dernier ami. Moreau joue Duras. Mais sans jouer. Elle est. Femme âgée face à la mort. Face à l'alcool. Face à sa féminité en ruine. Face à l'amour, encore et encore, pour le (trop) jeune Yann Andrea.
« La passion reste en suspens dans le monde, prête à traverser les gens qui veulent bien se laisser traverser par elle ».
Marguerite Duras « Tu me tues. Tu me fais du bien ».
Extrait d' Hiroshima mon amour
L’Amant de la Chine du Nord est une ré-écriture de l'Amant que décide Duras dès qu’elle apprend la mort du Chinois, son amant initiateur. Celle que Duras vivra avec lui, toute jeune, en Indochine. Rappelons pour ceux qui le savent pas (les extraterrestres ?) que ce texte à la fois dur et sensuel, et autobiographique, a été mis en image par Jean-Jacques Annaud. L'amant est donc un polaroïd sur l’initiation amoureuse de Marguerite. Dont les pétales effeuillés sont parmi les plus touchants de la littérature mondiale. Son amant qu'elle appelle dans le livre le chinois, un rentier du Saigon colonial de l'entre deux-guerres.
L'Amant de la Chine du Nord n'est pas le livre qui m’a le plus accroché chez Duras.
Mais l’intérêt de l'Amant de la Chine du Nord c'est l'interaction entre le travail d’écrivain, qui même dans l’autobiographie peut prendre la tangente de la fiction, interaction aussi entre la mort de l’Amant et le film de J.J. Annaud. C'est presque un auto-essai. Montaigne, l'inventeur de l’essai s'en gratte encore les cheveux.
Le Mékong , fleuve coule dans le texte et devient fleuve de la passion.
Tout Duras est là : sa-petite-musique-de-la-passion.
Si Duras est passionnée, elle aussi et surtout une tragédienne, douée pour les drames familiaux. Sa technique ? Une petite musique incantatoire, répétitive, par petits souffles et halètements comme pendant l’amour. Car Duras a une écriture du ventre, du bas ventre, et un ton qui pourtant nous le fait oublier. Sa-petite-musique-de-la-passion agira dans tous ses livres comme un filtre.
Sa vision du réel vu par ce filtre-là.
Ecouter ce qu’elle répond, à propos du réel, lors d’une interview : Sinclair Dumontais
Madame Duras, il y a chez vous une profonde passion pour l'écriture. Nul ne peut en douter. Mais dans cette passion, quelle est la part du devoir et de la mission à accomplir et celle du simple assouvissement de soi? En d'autres termes, croyez-vous que l'écriture qui a donné un sens à votre vie a le pouvoir de donner un sens à la vie?
Marguerite Duras
Le devoir est un mot que je n'aime pas: il y a l'écriture et puis il y a la vie, avec ses horreurs, ses injustices. L'un et l'autre ne peuvent être liés qu'à condition de faire de la vie et de ses catastrophes une écriture. L'écriture des choses matérielles ne saurait être différente de celle envisagée pour la littérature. Ecrire un roman, c'est écrire l'histoire d'un monde qui pourrait exister et je fais du monde une écriture courante, qui court et glisse. C'est pourquoi le mot devoir n'existe pas pour moi, il n'y a pas un devoir pour l'écrivain. Il n'y a que l'écriture qui pousse un homme, une femme à prendre position en regard du réel.
Duras n’avait pas de devoir, de mission. Duras écrivait. Duras n'arborait ses médailles littéraires pour présider un jury littéraire. Duras était solitaire et frondeuse. Duras était chiante, tuante, mais touchante. Duras a mordu à la politique, au cinéma et au théâtre. Duras engagée, contre la guerre d’Algérie. Duras contre De Gaulle !
Duras en 1968.
Duras qui donnait la parole aux exclus de la société. Pendant sa vie, elle a assisté (parfois en chieuse) aussi aux tournages de ses films, y compris Moderato cantabile (un de ces meilleurs livres), India Song, et Hiroshima, mon amour, et elle allait voir ses pièces présentées au théâtre. Duras buvait. Duras détestait les mâles. Duras aimait les mâles.
On oublierait presque la Duras « mère », Duras la douce, voilà ce que fait passer Jeanne Moreau. Et dans l'Amant de la Chine du Nord. Deux pages superbes p136 et p137
un extrait :
Rappel : Le chinois (son amant) L’enfant (c’est elle, Duras très jeune fille) : « .Ils se regardent sans se parler. Le Chinois s'assied dans le fauteuil, il ne va pas vers l’enfant. Il dit : j'ai bu.Il pleure.Elle se lève, elle va vers lui, elle le déshabille, elle le traîne jusqu'au bassin. Il la laisse faire. Elle le douche avec l’eau de pluie. Elle le caresse, elle l’embrasse, elle lui parle. Il pleure les yeux fermés, seul… ».
Vraiment très beau!
Critique de Thémis (Ligny, Inscrite le 17 avril 2001, 54 ans) - 12 février 2002
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