La conscience d'Eliah de Guy Lalancette

La conscience d'Eliah de Guy Lalancette

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Aaro-Benjamin G., le 15 juin 2010 (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 271ème position).
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Amant de la douleur

Lalancette se fait connaître de plus en plus. Heureusement, puisqu’il est d’un des meilleurs écrivains québécois. Un écrivain authentique, sans concessions, qui écrit avec ses tripes.

Dans son quatrième roman, la trame s’articule autours de deux suicides apparents. Celui du protagoniste principal Éliah dans le présent, et celui de Gabriel, un garçon rencontré dans un pensionnat neuf ans auparavant et qui était l’amant d’Éliah. Les chapitres alternent d’une période à l’autre, chacun dévoilant un morceau du puzzle comme dans les polars - que l’auteur affectionne d’ailleurs.

La narration est donnée à la conscience d’Éliah, du moins la partie sombre, celle qu’il refuse de voir, « …je dirais que je suis un parasite nourri à sa conscience – quelque chose de parallèle -, une squatteuse en somme. »

Cette astuce permet de percer l’âme d’Éliah, car ce dernier est un garçon introverti, un écorché marqué par les blessures de l’enfance. Il s’automutile et s’isole, une sorte de fugue où il n’a pas à faire face à ses frayeurs et à l’amour que les autres lui donnent.

« …emprisonné dans sa peur du tumulte de l’amour et du monstre qui menace. Un monstre qui a grandi dans Éliah, guettant les manifestations de ses bonheurs pour les dévorer de l’intérieur par le sang, sa chair ouverte, transpercée, et sa douleur offerte à son Dieu-Ogre pour calmer sa colère, et la peur de sa colère. »

Sous la couverture hideuse, il y’à là une histoire cruelle, violente et tragique racontée par une plume incisive mais non dénuée de sensibilité. Certes, ce roman sera trop dur pour nombreux lecteurs. Pour ma part, j’ai été totalement bouleversé par le charme morbide et la triste beauté de la mort de l’innocence.

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Les éditions

  • La conscience d'Eliah de Guy Lalancette
    de Lalancette, Guy
    VLB
    ISBN : 9782896490868 ; 18,00 € ; 16/07/2009 ; 192 p. ; Broché
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Les Désarrois de l'élève Éliah Pommovosky

9 étoiles

Critique de Libris québécis (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans) - 2 mai 2013

Ce roman dévoile l’atmosphère régnant dans les juvénats des frères. Les communautés initiaient à la vie religieuse des éphèbes, attirés par le prestige social dont elles jouissaient et par des frais scolaires dérisoires. Inaptes à jouer un rôle parental, les frères laissaient leurs postulants à eux-mêmes en dehors de leur formation et de leur instruction.

Le vide était rapidement comblé par le matamore du juvénat, appuyé de ses acolytes. Ce dernier imposait sa loi par la terreur. Les récalcitrants risquaient gros. Pendant que les parents croyaient leurs rejetons en sécurité dans un lieu de sanctification, les plus vulnérables étaient humiliés par leurs pairs. La fureur atteignait davantage les élèves aux tendances sexuelles ambivalentes. Les amourettes homosexuelles n’étaient pas rares dans ces milieux fermés.

Le héros, Éliah Pommovosky, a goûté à la médecine d’un de ces fanfarons quand ce dernier a découvert son amitié particulière pour Gabriel Blanc. La narration, confiée à la conscience d’Eliah, rapporte l’amour interdit du héros, perturbé dès l’enfance par un père qu’il aimait, mais qui n’en a pas moins tué sa femme. Des mises en abîme font ressortir les causes qui l’ont rendu impuissant à écouter la voix de sa conscience tellement la souffrance morale le dépassait en raison de son jeune âge. C’est en s’infligeant des blessures corporelles qu’il croyait apaiser sa douleur, accrue de surcroît par toutes les trahisons qui ont émaillé son adolescence. Et le temps n’a pas arrangé les choses. Devenu professeur, il s’est marié, mais sa vie de couple s’est dissoute dès la première nuit de noces, tellement l’empreinte de Gabriel est resté profonde.

Cette tragédie se divise en deux pôles : soit celui d’une intervention policière et du profilage psychologique. Soutenu par une écriture rendue complexe par l’abus des appositions, des participiales, des parenthèses et des tirets, le roman évoque un passé qui a ses échos dans l’actualité sous la forme du taxage (extorsion) et du bizutage dans les universités. Bref, c’est un polar psychologique unique en son genre, qui peut figurer à côté des Désarrois de l'élève Törless de Robert Musil, un roman apparenté à celui de Guy Lalancette.

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