Carnets de guerre : De Moscou à Berlin, 1941-1945 de Antony Beevor, Collectif, Vassili Grossman, Luba Vinogradova

Carnets de guerre : De Moscou à Berlin, 1941-1945 de Antony Beevor, Collectif, Vassili Grossman, Luba Vinogradova
( A writer at war)

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances

Critiqué par Tanneguy, le 22 mars 2010 (Paris, Inscrit le 21 septembre 2006, 85 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 293ème position).
Visites : 5 747 

Un témoignage précieux et émouvant...

On connaît le roman exceptionnel de Vassili Grossman "Vie et Destin" mis à l'index et détruit par les autorités soviétiques en 1960, mais dont le manuscrit fut sauvé par Andreï Sakharov (?) avant d'être édité à l'Ouest en 1980, bien après la mort de l'auteur en 1964, et de connaître un succès mondial, y compris en Russie après 1988. L'ambition de Grossman était de faire pendant au "Guerre et Paix" de Tolstoï. Ce fut une réussite !

Le présent ouvrage a été réalisé à partir des carnets personnels de Grossman, son journal de bord de correspondant de guerre officiel de 1941 à 1945. Ceux-ci ont été confiés dans les années 2000 par les enfants de Vassili Grossman à Antony Beevor, historien britannique renommé (né en 1946), auteur lui-même d'ouvrages consacrés à la seconde guerre mondiale ( dont "Stalingrad").

Les écrits de Grossman, qui lui ont servi à composer "Vie et Drestin", ont été choisis par Beevor pour s'insérer dans une relation documentée des parcours de Grossman su tous les champs de bataille de Moscou à Berlin. Le résultat est remarquable et le travail de l'historien vient compléter le témoignage irremplaçable du journaliste chroniqueur. Il met en valeur les qualités exceptionnelles de l'homme confronté à la tragédie de la guerre mondiale : on notera par exemple le témoignage de la découverte de Treblinka, insoutenable relation visuelle utilisée lors du procès de Nuremberg.

N'oublions pas Vassili Grossman !

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A lire, en attendant une vraie publication de ses carnets

8 étoiles

Critique de Romur (Viroflay, Inscrit le 9 février 2008, 51 ans) - 23 mars 2014

La lecture de Vassili Grossman, et en particulier de ce monument qu’est Vie et Destin, a été pour moi un choc littéraire et émotionnel. J’attendais beaucoup de ses carnets de guerre.

Ecrivain du régime et inapte à l’enrôlement, il s’est engagé comme journaliste pour suivre les combats dès les premiers jours. Le souffle de la défaite de 1941, le coup d’arrêt permis par l’arrivée de l’hiver russe aux portes de Moscou, puis la bataille de Stalingrad qui est au cœur de « Vie et Destin », le retour à l’offensive à travers les territoires dévastés par l’occupation, la découverte des camps de concentration en Pologne, la marche sur Berlin et les exactions commises par l’Armée Rouge en Allemagne, les premiers signes de la montée de l’antisémitisme soviétique qui culminera quelques années après avec la déportation de juifs en Sibérie...
Tout est retracé, les extraits des carnets étant accompagnés de nombreuses explications sur les événements et l’époque, et mis en parallèle avec les articles publiés par Grossman et parfois des témoignages d’autres journalistes ou militaires. On retrouve sa plume pour rendre de façon sensible la violence des combats, la souffrance des peuples, l’horreur de Treblinka. La force de ses mots avait fait de lui un journaliste reconnu, dont les soldats lisaient les articles avec reconnaissance et enthousiasme.

Cet ouvrage permet aussi de mieux connaitre l’homme. Il n’était en rien préparé à la guerre, mais il va courageusement et sans relâche suivre les troupes, aller au plus près du front, parfois faire le coup de feu. Les qualités humaines qu’on pressent en lisant ses romans lui ont permis de faire parler en confiance et de recueillir des témoignages précieux, du soldat au général et du russe à l’allemand. Les lettres adressées à sa famille dévoilent sa vie privée et on le suit dans l’inquiétude puis la souffrance lorsqu’il découvre le destin de sa mère massacrée avec les juifs de Berditchev.

Malgré tout ce qu’il contient, ce livre me laisse sur ma faim. Car tous les thèmes que j’ai cités ne sont évoqués parfois que rapidement. Les commentaires et les interpolations de A Beevor et L Vinogradova sont indispensables, mais me semblent prendre trop de place par rapport aux écrits de Grossman. Certains des carnets ont été perdus et tout ne méritait sans doute pas d’être publié, mais je soupçonne qu’il y en avait bien plus que ce qui a été retenu pour ce petit opus. Ses écrits avaient déjà dû subir la censure communiste à l’époque, et aucune explication ou justification n’est apportée sur les choix effectués aujourd’hui.

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