Bogaert vs time

Dans l’attente du chaland, l’antiquaire Frans Bogaert et son assistante Lauren discutent à bâtons rompus d’un de ces objets bizarroïdes dont regorge l’Arcamonde. Voilà qu’un autre antiquaire pousse les portes de la caverne d’Ali Baba, non pour acheter mais pour vendre une curiosité à Bogaert. Il s’agit d’une pendule du XVIII° siècle dont on se demande à quoi elle peut bien servir… Pas à donner l’heure, en tout cas : des fleurs se sont substituées aux chiffres et … elle ne compte que 11 heures… En outre, son tic-tac semble définitivement muselé : aucun point d’entrée pour la remonter… Il n’en faut pas davantage pour titiller Bogaert qui achète l’objet séance tenante.

Ce quatrième tome d’une série qui en comptera douze est d’une richesse peu commune et est donc, jusqu’à présent, mon préféré. C’est vous dire si je piaffe : encore huit mois de patience avant la sortie du cinquième (novembre 2010)… En vrac, je commencerais par la relation Bogaert - Lauren qui s’étoffe dans l’ambigu. Il est vrai que le patron et son assistante passent leurs journées confinés dans l’espace restreint de l’Arcamonde… Et ne voilà-t-il pas qu’à l’occasion de cette quatrième enquête, ils s’enferment volontairement une semaine entière dans les caves d’un château, luxueusement aménagées, sans aucune vue sur l’extérieur ? La promiscuité mâtinée de mystère entraînera de facto un regard neuf sur l’autre…

Un point fort de « La pendule endormie » est bien sûr l’énigme présentée par l’objet et l’Expérience, tentée par d’autres avant eux, que Frans et Lauren vont revivre. Comme je l’ai dit, c’est dans un espace complètement coupé du monde que Frans et Lauren décident de s’isoler une semaine durant. Des phénomènes plus qu’étranges et angoissants ne tardent pas à les intriguer… Picart tente ici une légère incursion dans le fantastique, davantage réussie quant au suspense qu’à l’explication…

Et puis il y a Laura, la femme envolée de Frans. Le père de Laura, constamment sur ses traces, finit par la repérer, mais trop tard. La traque vire à l’échec, comme les autres fois. Cependant Laura réserve des surprises à Frans et Picart instille dans ce volume une nouvelle énigme, alléchant encore le lecteur : mais où est-elle ? Pourquoi avoir ainsi disparu ? Que trame-t-elle ? Est-elle en danger ? Et surtout, la consonnance des prénoms Laura / Lauren est-elle innocente ? Ah, décidément, vivement le cinquième tome !

Enfin, le style n’est pas le dernier atout de Picart. Il nous avait déjà habitués à beaucoup d’humour dans les réparties et les descriptions de personnages, il confirme ici ce talent : j’ai, par exemple, adoré la manière drôlatique dont Picart plante le personnage du second antiquaire. En outre, sa prose fait la part belle au langage imagé, aux néologismes (parfois répétitifs, petite fausse note dans l’harmonie), aux références, … Bref, que du plaisir !

• 

  La pendule endormie [Texte imprimé] Hervé Picart

  de Picart, Hervé
  le Castor astral
  ISBN : 9782859208141 ; 13,20 € ; 18/03/2010 ; 234 p. ; Broché

  Go Amazon