Leurs enfants de Edith Wharton
( The Children)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Un soupçon de modernité?
Depuis longtemps, Edith me faisait de l'oeil. J'ai entrepris sa lecture au hasard, en commençant par le premier livre qui m'est tombé sous la main: Leurs enfants. Une extrait de la quatrième de couverture donne une franche impression de modernité:
"Dans Leurs enfants, [Edith Wharton] crée un groupe d'enfants hétéroclites, mal élevés et tout à fait délicieux et complètement dépourvus d'idéalisation sentimentale, qui parlent sans contrainte des sujets les plus interdits."
Effectivement, voici le récit d'une famille re-re-recomposée, dont les enfants cherchent un peu de stabilité auprès de Martin Boyne, aventurier célibataire rencontré par hasard. La petite famille est composée d'une Judy presqu'adulte (15 ans et mère officieuse de tous les poussins), Blanca et Terry les jumeaux, les "B" - Buns et Becchy (officiellement Astorre et Beatrice) - "ajouts" d'un remariage italien, Zinnie - petite effrontée rousse, fille des amours de son père avec une acrobate, et enfin Chip, seul mâle héritier en bonne santé, fruit du remariage du couple originel, et sur qui son père fonde tous ses espoirs. Une bande de gamin ballottés d'hôtels en bateaux, et livrés à eux-mêmes sous la bonne garde des nounous et de l'institutrice Scopy. Après avoir été séparés au cours des remariages, ils ont juré de rester ensemble pour toujours, et Judith est là pour mener à bien ce grand projet.
Ce n'est que par hasard sur un bateau que la famille va trouver sur son chemin Martin Boyne, ancienne connaissance des parents Weather... le voilà qui deviendra l'allié des enfants dans leur quête de stabilité, lorsqu'un nouvel orage conjugal viendra à mettre la famille recomposée en danger. Martin trouvera-t-il le moyen de satisfaire les voeux des petits Weather?
[C'est ici qu'il faut lire le livre pour le savoir, je m'en voudrais de tout dévoiler]
Au final, la lecture est plutôt agréable, mais qu'en est-il de la modernité que j'avais cru un instant déceler? En fait, mis à part le thème de la gestion d'une famille re-re-recomposée, j'ai trouvé le livre terriblement vieillot et désuet. Pour un livre de 1928, il fait très 19e... Pudeur et hypocrisie dans les relations sociales, convenances et bon goût de la bonne société dans toute sa discrétion (représenté par Rose, l'amie et future-ex-fiancée de Martin), etc. Même Madame Bovary me semble plus moderne!
Bref, une déception pour cette première lecture, en espérant avoir été seulement victime d'un choix hasardeux...
Les éditions
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Leurs enfants [Texte imprimé] par Edith Wharton traduit de l'anglais par Louis Gillet
de Wharton, Edith Gillet, Louis (Autre)
10-18 / 10-18
ISBN : 9782264005519 ; 7,00 € ; 01/08/1997 ; 313 p. ; Poche
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Le génie de Wharton
Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 59 ans) - 18 janvier 2012
Martin apprécie Rose, mais il est surtout un amoureux à distance. Il n'est jamais autant amoureux que Rose que solitairement dans ses pensées: à ce moment elle a la grâce d'un fantôme. Quant à Rose, veuve amène et très lisse, presque trop parfaite, elle attend patiemment. En arrière-plan de ces deux êtres fait pour se marier, comme à leur insu, et, suprême don de l'écrivain ?, à l'insu de l'auteur même (on a l'impression que ses personnages lui échappent), on sent une indécision s'immiscer, et une incapacité de passer à l'acte, c'est comme une ombre en arrière plan qui menace leur bonheur.
Peut-être Rose a-t-elle attendu trop longtemps, incapable de saisir le bonheur ? Wharton dit d'elle "Elle s'était exercée à attendre, pendant des mois et des années, comme on guette une proie". Et Martin, un aventureux, homme intègre, qui chérit sa fiancée à distance, est incapable de voir ce qui lui arrive alors que la compagnie de la jeune Judith l'amène au bord du gouffre d'un amour impossible car inacceptable.
Je trouve du génie dans la plume de Wharton. Personne ne parle comme elle du désastre d'un amour qui, insidieusement, ne parvient pas à s'exprimer, soit qu'il doit être réfréné, soit qu'une ombre (la peur ? l'incapacité affective ?) vienne petit à petit le casser (et briser une vie en même temps). On est bien dans la tragédie même si Wharton est souvent très drôle avec son ironie mordante. La tragédie d'une vie passée à attendre, à refuser de vivre, par peur ou incapacité affective ? Mais il n'y a pas de jugement ici: à l'opposé de ces êtres touchants et sobres, Wharton décrit avec son ironie mordante habituelle les noceurs égoïstes qui abandonnent leur enfant pour vivre leur vie de pacotille. Et on retrouve bien la l'opposition entre les fous, inconscients, ceux qui dansent dans la maison de Liesse, et les sages, incapables de croquer la vie égoïstement, et qui vivent les affres d'une vie brisée.
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