Ha Long de Linda Amyot
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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La mère biologique et la mère d'adoption
Ce court roman, écrit par Linda Amyot, nous raconte le cheminement de deux femmes devant la maternité, en alternant leur voix. Ai Van, Vietnamienne, mère biologique de Lan et Élise, Québecoise, mère de Laura, future mère d’adoption.
Une grossesse hors mariage attire, à Ai Van, la honte et le mépris de tout un village. À l’accouchement, sa mère et ses tantes lui ont arraché son enfant, qu’elle n’a même pas vu. Elle enfouit le nom de Lan au fond de son cœur (p.10) en se jurant de retrouver sa fille un jour. Lorsque sa mère lui a appris que son bébé est à l’orphelinat de Hon Gai, dans la Baie de Ha Long, secrètement, elle décide qu’un jour elle ira vivre là, avec son frère qui y travaille déjà, afin de retrouver Lan, et Hang Phuc, le père de Lan. (p.59) À son arrivée à Hon Gai, sous la mauvaise raison de chercher du travail, elle se met à la recherche de l’orphelinat, puis y trouve la nourrice avec Lan dans les bras. Elle la trouve encore plus belle qu’elle ne s’était imaginée.
Élise ne peut enfanter, devenue stérile à la suite d’une chirurgie due au cancer. Elle devra s’adresser à l’adoption internationale. Elle n’aura même pas droit au regard attendri qu’ont les gens pour les femmes enceintes (p.32). Commence une longue attente, avec doute, pour le couple. Comment réagit-on à son intégration forcée? Quand elle me demandera : qui est ma mère? pourquoi m’a-t-elle abandonnée? (p.44) ce sera comme un deuxième abandon pour Laura. Puis, la voilà rassurée, lorsque le messager apporte la photo de Laura qu’elle adoptera. Enfin, sa fille existe ailleurs que dans son cœur.
Un jour, Ai Van bifurque vers le marché pour acheter des ingrédients manquants, quand elle a vu le père de Lan. Elle a vite su qui était la jeune femme au ventre arrondi qui l’accompagnait. Lui, l’avait reconnue (92). Ai Van, stupéfaite, lui tourna le dos et marcha jusqu’à la maison de son frère. Il ne lui reste plus qu’à enterrer le passé, oublié (103). Lorsque Ai Van retourne à l’orphelinat pour revoir Lan, elle croise Élise à qui les autorités remettent l’enfant. Un instant, leurs regards se sont accrochés l’un à l’autre. La jeune Vietnamienne, abandonnée par son fiancé, sait qu’elle ne pourra jamais reprendre sa fille.
Élise, qui tient maintenant sa fille dans les bras, admire son petit nez, ses joues bien rondes, sa bouche en cœur, bien que préparée matériellement et psychologiquement, lui reviennent les tourments d’une mère adoptive, elle songe au déchirement qu’a dû éprouver la mère biologique à la séparation d’avec son enfant. Bien heureuse d’avoir sa petite Laura bien à elle, mais consciente que son bonheur se teintera d’une détresse qui laissera toujours une trace.
Dans une écriture simple, Linda Amyot arrive à nous émouvoir dans cette touchante histoire d’un bébé nouveau-né et de deux mères. Celle qui veut goûter au plaisir de la maternité, et l’autre, qu’on oblige à abandonner son enfant issu d’un amour interdit. L’auteure a bien réussi à faire ressortir l’angoisse et l’inquiétude de Élise, de même que la détresse et le déchirement de Ai Van.
Les éditions
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Ha Long de Linda Amyot
de Amyot, Linda
Leméac
ISBN : 9782760932593 ; CDN$ 14.95 ; 01/09/2004 ; 122 p. ; Paperback
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Adopter une petite Vietnamienne
Critique de Libris québécis (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans) - 10 octobre 2012
C’est la trame qui a servi à la novella écrite par Linda Amyot. Une Québécoise, devenue stérile à la suite d’une chirurgie, s’adresse à un organisme d’adoption internationale afin de devenir la mère d’une petite Asiatique. Ai Van, la mère biologique, perd en un instant son amoureux et sa fille, qui, dès son arrivée en ce monde, est abandonnée de façon anonyme dans un couloir de l’orphelinat de Hon Gai, une ville du Vietnam sise dans la baie de Ha Long.
L’auteur suit en parallèle le cheminement de ces deux femmes. En alternant leur voix, elle fait ressortir d’abord les tourments d’une mère adoptive qui trouve le temps bien long avant que les ententes soient conclues. Le pire, c’est le questionnement qui taraude celle qui veut goûter au plaisir de la maternité via l’adoption. Tôt ou tard, cette option ressurgira sur l’enfant du couple. Comment réagira-t-il à son intégration forcée? Le dilemme est d’autant plus épineux qu’on lui rappellera sans cesse que ses yeux bridés ne cadrent pas avec la rondeur de ceux des Occidentaux. Dans un tel contexte, la problématique de l’adoption complique la découverte des repères de sa filiation.
Quant à la mère biologique, les moyens à sa disposition pour garder sa fille sont risibles. C’est un véritable déchirement quand Ai Van réussit à la voir quelques instants le jour de son départ. Après que la nourrice eut déposé son enfant dans les bras de la Québécoise, elle se colle à l’autocar pour lui jeter un dernier regard, qui s’accroche au passage à celui d’une femme heureuse. En bonne Vietnamienne, elle se résigne pour réparer son affront aux ancêtres.
Pour écrire ce court roman, Linda Amyot a choisi la forme du témoignage. Ses héroïnes racontent à tour de rôle les sentiments qui les habitent à l’égard d’une naissance qui enrichira l’une au détriment de l’autre. Même si c’est succinct, l’œuvre n’en est pas moins dense grâce à une écriture épurée, capable de drainer à la fois la culture du Vietnam et le cœur de deux femmes présentées dans toute leur authenticité.
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