Les neiges bleues de Piotr Bednarski
( Błekitne Śniegi)
Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone
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Enfant en Sibérie
Pieta est un jeune garçon né d’une famille de Polonais blancs, à la mère juive, au père fougueux et fidèle à sa Pologne, peu d’éléments qui puissent plaire au NKVD soviétique quand la Pologne est annexée et où l’éducation des masses passe par une adoration sans bornes et sans réflexion à Staline et à son communisme. Le père au goulag, la famille de cet indomptable et notre jeune héros sont déplacés en Sibérie où ils côtoient les mêmes inadaptés de tous les pays où le communisme règne.
C’est cette histoire largement autobiographique que nous conte l’auteur avec son regard d’enfant sur les délateurs et autres zélateurs du régime stalinien.
C’est aussi avec une force, parfois terrifiante, qu’une certaine naïveté enfantine nous délivre un message sur la mort au caractère inéluctable mais en ceci particulière qu’elle dépend pour l’essentiel du bon vouloir d’un seul et qu’elle est parfaitement assimilée comme telle.
Piotr Champagnevitch se bat avec ses armes à lui, l’humour, la dérision parfois, le forfait, mais découvre aussi le rôle de la religion, de l’amour et de la poésie.
Beauté, sa mère, est un personnage central à l’oecuménisme quelque peu étonnant mais fait figure d’icône à laquelle l’adulte Bednarski se sera sans doute toujours accroché.
Un livre court et puissant qui donne à lire, en poésie, une des plus sombres pages de l’histoire du monde.
Les éditions
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Les neiges bleues [Texte imprimé] Piotr Bednarski trad. du polonais par Jacques Burko et alii
de Bednarski, Piotr
Éd. Autrement / Littératures (Paris. 1993)
ISBN : 9782746704534 ; 1,77 € ; 17/01/2008 ; 150 p. ; Broché -
Les neiges bleues [Texte imprimé] Piotr Bednarski traduit du polonais par Jacques Burko et alii
de Bednarski, Piotr
le Livre de poche / Le Livre de poche.
ISBN : 9782253083870 ; 5,90 € ; 06/02/2008 ; 192 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (6)
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un enfant aux portes du Goulag
Critique de Cyclo (Bordeaux, Inscrit le 18 avril 2008, 78 ans) - 25 avril 2023
On trouvera dans ce « roman » autobiographique la vie quotidienne d'un enfant polonais en Sibérie, au cœur du système répressif soviétique. Petia, 8 ans, a vu son père (un petit aristocrate) expédié au goulag en 1939, lors du partage de la Pologne entre l’Allemagne nazie et la Russie soviétique. Lui-même est relégué dans un village en Sibérie avec sa sa grand-mère et sa mère (surnommée "Beauté"). Celle-ci est désirée par tous les hommes, particulièrement les chefs, communistes purs et durs, qui se croient tout permis, mais elle leur résiste et leur tient tête : "elle ne pouvait aimer que des hommes bons. Or, un homme bon, ici-bas, c’est plutôt un être raté, une sorte de merle blanc". Petia souffre quotidiennement et continûment de la faim, du froid, parmi tous ces déportés, considérés comme hostiles au régime et assignés à résidence. Ces Polonais étaient sans doute partisans de la Pologne libre et de son chef le maréchal Pilsudski.
Ils subissent aussi les humiliations et l’arbitraire des petits chefs. Et la mort rôde en permanence : un enfant ami, un garde-chiourme (qui se suicide), la grand-mère du narrateur, des soldats, des déportés. On peut vite être déporté au goulag dès qu’une parole contre les gardiens ou contre Staline est perçue, ou même abattu par ces gardes. La vie a l’air d’être fugitive dans ce climat glacial où la neige finit par devenir bleue. Heureusement il y a "Beauté", qui a trouvé un emploi d’infirmière et qui veille sur son fils et le choie autant qu’elle peut. "Beauté" aide le petit garçon à survivre, lui fait connaître la Bible et découvrir ceci : "Je savais seulement qu’il y avait des hommes bons et des mauvais, et que le pouvoir était l’apanage des psychopathes et des mégalomanes".
Et il y a aussi l’école et la bande de copains, et les petits plaisirs malgré le dénuement : un de ses copains, sans doute d’origine asiatique, lui dit : "Je me ferai moine bouddhiste. Vous, vous volerez, et moi, je prierai". Les enfants gardent la malice de leur âge pour tenter de survivre. Et Petia observe et s’efforce de retenir ce qui est beau (l’amitié, par exemple avec son petit groupe d’écoliers ou avec le déporte surnomme Bienheureux, l’amour de sa mère et de sa grand-mère, la compassion, la lecture de la Bible, la poésie qu’il découvre aussi, l’attente du retour du père), de ne pas perdre l’espoir et de devenir humain dans cet univers inhumain et mortifère. Et d’oublier l'horreur des dénonciations, la misère, le froid, la faim.
C’est évidemment une description du système répressif soviétique. Mais sans appuyer. Simplement, les détails font comprendre le surcroît de douleur qui domine chez bon nombre de personnages. Et pour Petia, le "temps est le meilleur allié de l’homme. Et le plus fidèle. Que nous le voulions ou non, il nous guide toujours vers notre but ; s’il nous précipite dans la tourmente, il nous en sort aussi ; sans cesse il nous blesse et soigne nos blessures".
Un des meilleurs livres sur le goulag, que j’ai trouvé sublime. Et on comprend pourquoi les Polonais n’aiment pas les Russes.
Une leçon d'espérance
Critique de MAPAL (, Inscrit le 19 janvier 2011, 78 ans) - 12 septembre 2019
Vaut certes par la sobre mais vibrante évocation du drame vécu par les victimes du stalinisme et du communisme soviétique. Mais il ne s’agirait que d’une dénonciation de plus si l’essentiel n’était ailleurs :
• ce mélange d’innocence et de sagesse chez le narrateur, enfant dont on comprend que l’accumulation d’épreuves et de douleurs a forgé sa maturité,
• cette leçon d’espérance ; une espérance authentique et profonde, car passée sans doute par le filtre du désespoir et puisée à la source la plus intime et la plus intérieure, donc dépourvue de toute trace d’illusion,
• un foisonnement de personnages secondaires attachants,
• des éclats d’une grande poésie, qui nous fait vivre le monde – un monde - sans viser à nous en dispenser,
• une forme originale : une série d’épisodes, traités comme comme autant de nouvelles, mais conduisant inexorablement à une tragédie dont ils n’auront été que le présage.
La force de l'enfance
Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 27 décembre 2013
L'auteur nous fait partager son enfance d'une incroyable dureté avec un formidable talent. Ce petit garçon qui arrive à nous faire sourire, qui arrive à grandir au milieu de ses copains malgré la faim, malgré le froid.
Les neiges bleues, c'est quand la température descend sous les 40°.
Les dernières pages sont insoutenables mais l'enfant continue avec une force résignée, un instinct de survie phénoménal tout en gardant intacte sa part d'humanité.
"Comment des mortels pouvaient-ils condamner ainsi d'autres mortels ? Je n'arrivais pas à comprendre."
J'ai pris le livre, lu l'avant-propos du traducteur Jacques Burko (par ailleurs excellent),... puis l'ai refermé ! Est-ce que c'est parce qu'il s'agit d'un récit autobiographique qu'il se permet de nous résumer en deux pages toutes les épreuves que l'enfant va affronter ?
J'ai donc oublié cet avant-propos et découvert quelques jours plus tard, un livre bouleversant, fort, qui nous rappelle, s'il en était besoin la barbarie des dictatures et la force de l'enfance.
Enfant et poète
Critique de Paofaia (Moorea, Inscrite le 14 mai 2010, - ans) - 4 décembre 2013
Le personnage de la mère est magnifique. Et dans ce contexte continue la vie, tout va mal dit Beauté, mais nous sommes vivants. Oui, mais au fur et à mesure, les vivants se font de plus en plus rares..
Bref, c'est bouleversant , peut-être encore plus car Piotr Bednarski a réussi à réécrire son enfance, et à nous livrer un témoignage historique sur la Sibérie des années 40 en gardant la simplicité -très travaillée- de la vision d'un enfant. Enfin, d'un enfant qui en a déjà vu beaucoup.. Et qui a décidé d'être poète , depuis l'éblouissement provoqué par Le Démon ,le poème de Lermontov.
http://www.artrusse.ca/Tailes/Demon.htm
Comme toujours le malheur, le gel arriva sans prévenir. Une seule nuit lui suffit pour ouvrir son portail d'argent et semer soigneusement partout ses graines mortifères. Une oreille sensible pouvait percevoir un chuchotis comme celui du blé qui glisse dans la goulotte d'un moulin. Cela signifiait que la température était tombée en dessous de moins quarante degrés. La neige se fit bleue et la limite entre terre et ciel s'estompa. Le soleil, dépouillé de sa splendeur et rivé de son éclat, végétait désormais dans une misère prolétarienne. Le froid vif buvait toute sa chaude et vivifiante liqueur - désormais seuls le feu de bois, l'amour et trois cents grammes quotidiens d'un pain mêlé de cellulose et d'arêtes de poisson devaient nous défendre contre la mort. Or n'est-ce pas justement quand la mort est sur le seuil, quand elle fait déjà son nid en nous, à l'intérieur, que le désir de vivre s'exalte et que l'on devient capable d'abattre des montagnes et de ressusciter d'entre les morts ?
BEAUTÉ ET PETIA
Critique de Septularisen (, Inscrit le 7 août 2004, - ans) - 3 décembre 2013
Les neiges bleues sont les mémoires romancées de l’auteur Piotr BEDNARSKI quand il avait huit ans. D’origine polonaise Petia a été déporté, en exil intérieur avec toute sa famille. Il vit en Sibérie, dans la tristement célèbre région de Kolyma, « envoyé » là-bas par le système répressif de Staline, parce-que son père, officier dans l’armée polonaise s’est battu contre les troupes soviétiques.
Petia nous raconte simplement sa vie, ou devrais-je dire sa survie de tous les jours. En effet les «assignés à résidence » souffrent du froid, de la faim, des maladies, de la douleur, des humiliations du régime et surtout de l’angoisse permanente d’être définitivement déportés au goulag pour un oui ou pour un non !...
Il nous raconte sa philosophie de la vie, ses lectures, l’écriture de poésie, ses amours de jeunesse, les petits moments de joie, les grandes peines, notamment lorsque tout ceux qu’il aime autour de lui disparaissent de manière plus ou moins tragique. C’est la vie d’un enfant de huit ans, curieux de tout, révolté, intelligent, espiègle, rusé, insolent, sensible, écorché vif…
S’il survit à cet « enfer sur terre » c’est surtout grâce à Beauté, sa mère dont la bonté n’a d’égal que sa beauté radieuse, qui illumine tous ceux qui l’approchent. Femme forte et résignée sur son sort en même temps, sorte de juive mystique elle puise sa force dans la bible et fait tout pour protéger son fils de l’enfer dans lequel ils vivent.
Beauté a bien sûr de nombreux prétendants, surtout depuis qu’elle a appris qu’elle est veuve, les plus assidus sont ses propres geôliers, les sbires du NKVD, véritables suppôts de Staline…
18 chapitres, 18 petits chapitres seulement, mais tous de pure merveille, et un peu moins de 200 pages, si j’ai un seul reproche à faire à ce livre… c’est pourquoi est-il aussi court ? On voudrait qu’il fasse 600 pages de plus !... Une écriture dépouillée et simple, toute en finesse et en beauté. Des personnages forts et inoubliables, une histoire prenante, poignante et qui ne peut que vous émouvoir…
"Scotché"! Je suis resté littéralement "scotché" par la beauté et par l’écriture de ce livre, longtemps qu’un livre ne m’avait pas fait cet effet-là… Mon coup de cœur absolu pour l’année 2013 !... Je voudrais pouvoir trouver et lire plus souvent des livres de cette force et de cette beauté, je pense que ma vie en serait changée !...
Tout à la fin du livre je me suis surpris à ralentir mon rythme de lecture, je ne voulais pas que ce livre s’arrête, je ne voulais pas qu’il finisse… je ne lisais plus qu’un chapitre par jour !... Vous qui n’avez pas encore lu ce livre, vous avez bien de la chance et... je vous envie… Vous vous apprêtez à faire la connaissance de Beauté et Petia !...
En conclusion, vous l’aurez compris, j’ai aimé, j’ai aimé beaucoup, j’ai aimé infiniment, j’ai aimé à la folie !... Si je n’ai qu’un livre à vous recommander cette année…
froid chaleur bleu rouge
Critique de Printemps (, Inscrite le 30 avril 2005, 66 ans) - 29 septembre 2009
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