De l'inégalité parmi les sociétés : Essai sur l'homme et l'environnement dans l'histoire de Jared Diamond
Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Economie, politique, sociologie et actualités , Sciences humaines et exactes => Essais
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pourquoi est-ce que ce sont les européens qui ont colonisé les autres peuples et non l'inverse ?
A partir de la « question de Yali » (pourquoi est-ce que ce sont les européens qui ont colonisé les autres peuples et non l'inverse ?), l'auteur retrace l'histoire des sociétés humaines depuis -13 000 ans c'est-à-dire le Néolithique en Eurasie.
L'auteur identifie les facteurs qui ont contribué directement puis indirectement à la suprématie de certaines sociétés parmi toutes celles qui existaient il y a 15 000 ans.
Difficile de résumer ce livre très riche de presque 700 pages sans simplifier à l'extrème la théorie de l'auteur. Mais que cette richesse ne vous fasse pas peur, l'auteur est un très bon écrivain, son propos est d'une portée fantastiquement importante et ses convictions très contagieuses.
Je le recommande à tous les curieux qui veulent en savoir plus sur le grand "tournoi" des civilisations.
Les éditions
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De l'inégalité parmi les sociétés : Essai sur l'homme et l'environnement dans l'histoire de Jared Diamond
de Diamond, Jared Dauzat, Pierre-Emmanuel (Traducteur)
Gallimard
ISBN : 9782070347506 ; 13,50 € ; 27/09/2007 ; 695 p. ; Poche -
De l'inégalité parmi les sociétés [Texte imprimé], essai sur l'homme et l'environnement dans l'histoire Jared Diamond trad. de l'anglais par Pierre-Emmanuel Dauzat
de Diamond, Jared Dauzat, Pierre-Emmanuel (Traducteur)
Gallimard / NRF essais.
ISBN : 9782070753512 ; 35,50 € ; 22/11/2000 ; 484 p. ; Broché
Les livres liés
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Fresque mondiale des origines
Critique de Colen8 (, Inscrite le 9 décembre 2014, 83 ans) - 2 février 2016
Partis en avance dès la fin de l’âge glaciaire il y a environ 13 000 ans, grâce tantôt à la maîtrise de l’agriculture, tantôt à la domestication d’animaux sauvages ou aux deux combinées, les successeurs d’homo sapiens établis dans le Croissant fertile au Moyen-Orient ont laissé migrer leurs savoirs à l’Est jusqu’à la vallée de l’Indus, à l’Ouest en Bulgarie puis dans les îles grecques et ensuite la Grèce continentale. Longtemps après ont émergé les Européens qui se sont détachés des autres populations à l’époque des grandes découvertes. Forts de leurs richesses accumulées, de leurs progrès culturels et techniques, de leurs cavaleries, de leurs armes à feu, ils se sont crus supérieurs et destinés à dominer le reste du monde. Sous couvert d’esprit missionnaire ils n’ont pas manqué de le faire tout en se justifiant par ailleurs des massacres et pillages associés. A leur décharge les invasions suivies de colonisations ont été facilitées par une mortalité inattendue des indigènes. Sans le savoir les Européens ont transporté avec eux et propagé quantités de maladies infectieuses auxquelles eux-mêmes étaient devenus résistants.
Toutes ces observations amènent Jared Diamond à penser que les peuples sans écriture restés au stade de chasseurs-cueilleurs ou seulement d’agriculteurs sans structure hiérarchique ni centralisée ont les mêmes aptitudes intellectuelles, souvent même une intelligence plus vive que les brillants cerveaux formés dans de prestigieuses universités. Les inégalités existantes entre sociétés ont plus à voir avec un certain déterminisme qu’avec la génétique. Elles résultent d’abord de conditions climatiques, géographiques ou écologiques auxquelles sont venues s’ajouter par la suite d’innombrables effets cumulatifs : croissance démographique, disponibilité de ressources alimentaires domesticables, capacités de production et de stockage, sédentarisation, séparation des tâches justifiant de fil en aiguille la création d’une hiérarchie et d’une caste dominante de prêtres, de rois appuyés par des scribes et des guerriers bref d’une organisation politique.
indispensable
Critique de Gtpsan (Le François, Inscrite le 15 février 2013, 49 ans) - 15 février 2013
Avec une écriture simple et accessible, l’auteur, Jared DIAMOND, nous livre des clefs évidentes pour comprendre l’évolution des hommes et des cultures.
Où l'influence de la géographie sur les cultures et pourquoi aucune culture ne peut se prévaloir supérieure à une autre, ni une ethnie sur une autre. Comment les richesses sont liées aux différences de milieux et non aux différences génétiques. Du rôle de la répartition des plantes et des animaux sur les continents et de leurs influences sur l’évolution et la complexité des sociétés. Comment un continent comme l’Eurasie facilite l’expansion des idées, des techniques par sa configuration horizontale avec des changements de latitudes minime et inversement pour les Amériques et le continent Africain. Où l’intelligence ne se mesure pas à la quantité de biens, d’innovations ou de richesses, mais à sa faculté à vivre dans un milieu donné. Comment les colonisations ont eu lieu à travers l’histoire et pourquoi certaines ont réussi et d’autres échoué. Pourquoi aucun homme ne peut se prévaloir d’être supérieur à un autre et comment vaincre les idées préconçues.
Magnifique panoramique!
Critique de Donatien (vilvorde, Inscrit le 14 août 2004, 81 ans) - 20 juillet 2010
Mais je ne peux m'empêcher de faire part du bonheur de découvrir un travail aussi profond et panoramique sur la condition humaine et la "biologie de l'évolution" comme le dit Diamond.
Il pose surtout les bonnes questions, pour ensuite tenter de fournir les réponses. Sa démonstration est aussi très efficace par l'organisation des chapitres et de leur contenu.
Il y a par exemple un bref condensé à chaque fin de chapitre afin d'en résumer les éléments principaux.
Découverte grâce aux cliens et principalement Oburoni.
A lire par tous les curieux de l'essentiel.
A+
Racisme ? Foutaises.
Critique de Oburoni (Waltham Cross, Inscrit le 14 septembre 2008, 41 ans) - 16 mai 2010
On a déjà pas mal d'indices pour répondre : parce qu'ils étaient plus avancés sur le plan technologique, parce qu'ils étaient plus résistants à des germes qui ont facilement décimé des peuples plus fragiles génétiquement et, aussi, parce qu'ils étaient à la tête de civilisations faites d'Etats centralisés très puissants là où la plupart des autres continents n'étaient peuplés que par des tribus de chasseurs-cueilleurs plus ou moins organisés.
Technologie, germes et sociétés : ne sont-ce pas la les preuves que les Blancs, tout simplement, sont une race supérieure que les lois de l'évolution ne pouvaient que favoriser et placer au sommet ?
Non. Certainement pas.
Sauter à une telle conclusion revient à mélanger causes et conséquences ce que Jared Diamond, décidément fichtrement doué pour conter l'histoire humaine, nous montre ici en faisant appel entre autres à la géographie, la préhistoire, l'histoire, la linguistique, la génétique et la biologie évolutionniste.
Pour lui la notion clé qui permet d'expliquer les inégalités entre sociétés, inégalités ayant forgé l'histoire que l'on sait avec les conséquences que l'on sait, tient en un seul mot : environnement. C'est en effet ce dernier qui façonne les peuples qui doivent s'y adapter.
Explications :
Certains continents, certaines parties du mondes, sont bénis par des climats et des conditions climatiques tels qu'ils constituent un avantage considérable pour les individus qui les peuplent.
La fracture s'opère il y a 13 000 ans, a la fin de la dernière période glaciaire.
Tout les continents sont alors habités, sauf que là où certains sont coincés dans des territoires hostiles, trop froids ou trop chauds, de déserts arides à de denses forêts tropicales qui ne permettent rien sinon un mode de vie rudimentaire, d'autres ont la chance de vivre sur des continents qui permettent l'agriculture.
En effet, regardez une carte du monde et pensez "environnement" : si cette dernière est apparue dans le Croissant Fertile, d'où elle s'est répandue en Europe, et en Chine il y a 10 000 ans c'est tout sauf une coïncidence. Climats, topographies, faune et flore y expliquent son émergence; ces mêmes facteurs expliquent aussi son absence ailleurs.
Pourquoi tant insister sur l'apparition de l'agriculture ? Pour deux raisons.
D'abord parce qu'elle entraine la domestication d'espèces d'animaux faciles à domestiquer, et que c'est suite au contact avec ces animaux que, génétiquement, les peuples en question évoluèrent pour être immunisés contre des germes aussi sympathiques que la vérole ou la grippe -d'autres peuples, qui n'ont pas eu la chance d'avoir de telles espèces à domestiquer, et donc de tels germes contre lesquels s'immuniser, seront décimés à leur simple contact ( ne vous êtes-vous jamais demandé pourquoi les Blancs rendaient les Indiens fatalement malades alors que ces Indiens, eux, ne rendaient pas malade les Blancs ?... )
Ensuite parce qu'elle fut un tournant qui transforma des sociétés de chasseurs- cueilleurs nomades en sédentaires. Les conséquences seront en effet immenses pour l'organisation de sociétés. Là ou des chasseurs-cueilleurs vivent en petites tribus qui se battent contre des environnements hostiles pour survivre, les sédentaires eux ont un avantage énorme : ils peuvent stocker les produits de leurs récoltes. Cela peut paraitre anodin, sauf que partout où l'agriculture a émergé elle a engendré des sociétés hiérarchisées qui s'organisent autour de ce stockage -son accès, sa redistribution. Par effet domino l'agriculture est donc ce qui donna naissance à des civilisations complexes, faites de hiérarchies très structurées regroupant des tribus formant parfois des Empires, en tous cas des Etats centralisés très puissants. Rien à voir avec les chasseurs-cueilleurs et leurs petites sociétés tribales perdues au fond de territoires isolés !
Mieux : l'organisation même de telles sociétés, leurs Etats vastes, puissants, en contact les uns avec les autres, facilite le progrès technique. Encore une fois pensez à de telles sociétés ( Croissant Fertile, Europe, Chine ) et demandez-vous d'où ont émergé les inventions qui transformèrent l'humanité ( roue, écriture, papier, imprimerie, poudre etc... ). De tels progrès sont impossibles dans des sociétés de chasseurs-cueilleurs, trop petites, trop isolées, qui restent alors prisonnières de modes de vie primitifs; non pas parce que les individus qui les composent sont inférieurs en quoi que ce soit aux Blancs ou aux Chinois, mais parce qu'ils sont défavorisés par leurs environnement.
La suite est de l'histoire : si certaines parties du monde sont favorisées, avec des peuples qui donnent naissance, via l'agriculture, à des Empires puissants reposant sur des technologies avancées, seuls les Blancs ont tiré la queue du Mickey. Parce qu'ils sont supérieurs aux autres ? Non. Parce qu'ils ont eu une histoire plus chanceuse. Ils n'ont pas commis de suicide écologique ( Croissant Fertile ), ils n'ont pas non plus fait des choix sociétaux conservateurs qui les ont rejetés en arrière ( Chine ). Les Blancs ont conquis le monde, cela aurait très bien pu être les Chinois. Mettez les préjugés racistes à la poubelle.
Embrassant une foule de disciplines, dense, riche, éclairant comme à son habitude, Jared Diamond balaye les âneries qui circulent sur la question raciale. Il change surtout notre regard sur l'histoire, qu'il rend indissociable de la géographie quand il s'agit de notre passé lointain.
Un autre chef-d'oeuvre, incontournable, par un auteur à connaitre de toute urgence.
Une tentative pour écrire une histoire de l'humanité fondée scientifiquement
Critique de Falgo (Lentilly, Inscrit le 30 mai 2008, 85 ans) - 30 octobre 2009
Partant de millions d'années en arrière et surtout de -13000ans avant J.C., Jared Diamond écrit une histoire des sociétés du monde jusqu'à la Révolution Industrielle. Il n'est pas question dans ce récit de grands hommes, de querelles dynastiques, de batailles, de luttes pour le pouvoir, mais des grands mouvements de fond qui ont sous-tendu l'histoire évènementielle et permis ou freiné le développement des sociétés.
Pour passer de l'état, peu favorable, de chasseurs - cueilleurs à celui, favorable, d'agriculteurs puis de sociétés technologiquement développées, un processus systémique est nécessaire, fondé sur:
- la disposition d'aliments sauvages en abondance
- parmi ces aliments la disponibilité accrue de plantes sauvages domesticables
- donc la possibilité de développer une production alimentaire excédentaire et stockable
- en conséquence un accroissement de la densité de la population conduisant à une spécialisation des tâches (scribes, artisans, politiques, soldats), à une organisation politique (chefferies, états) et à l'invention de l'écriture
- la présence d'animaux sauvages domesticables accroissant la force de travail (roue, charrue, engrenages, etc.) et facilitant l'innovation technique (en particulier le travail des métaux).
La disponibilité de ces facteurs est liée aux conditions climatiques de base et à leurs évolutions ainsi qu'aux facilités de communication entre les sociétés. Sous cet angle les territoires orientés Est-Ouest (Eurasie, Chine) bénéficient de conditions climatiques proches facilitant échanges et découvertes. Tandis que les territoires orientés Nord - Sud (Amériques, Afrique, Australie) présentent des barrières climatiques considérables (déserts, régime des pluies hivernales - régime des pluies estivales) bloquant le développement.
En dernier ressort Jared Diamond, au delà des sciences qui lui permettent de fonder son récit (archéologie, climatologie, biologie, etc.) prend en compte les processus de décision dans les sociétés qui favorisent ou bloquent (Chine) le développement.
Particulièrement remarquable est le cas de la société Viking du Groenland dans lequel on voit que les Scandinaves ont tenté de transporter dans un autre pays leurs modalités initiales de vie. Celles-ci, inadaptées aux nouvelles conditions, les ont conduits à la mort alors que d'autres hommes (Inuits) ont trouvé dans les mêmes conditions de base les modes de vie permettant la survie.
La théorie historique de Jared Diamond sert de socle à "Effondrement" dont le propos est de montrer la voie d'une survie de notre humanité et de notre terre. Je reste persuadé qu'il est préférable de commencer la lecture de Diamond par ce dernier livre, pour passer ensuite aux autres.
De toute façons, cet auteur ouvre des perspectives inédites, passionnantes et fondamentales pour la compréhension du monde dans lequel nous vivons. ESSENTIEL.
Intelligent, brillant, rare, vital, ....
Critique de NQuint (Charbonnieres les Bains, Inscrit le 8 septembre 2009, 52 ans) - 27 octobre 2009
Passons ce détail. Pourquoi m'être lancé dans ce livre (à part mon coup de foudre pour l'auteur) ? D'abord l'histoire des civilisations me passionne. Mais aussi, j'ai toujours ressenti un manque dans mon éducation historique. Il y a toujours eu pour moi un chaînon manquant entre les hommes du néolithique et les civilisations égyptiennes et romaines. Peut-être ai-je dormi pendant ces cours en classe ? Qui sait ...
Mais l'ambition du livre va bien au-delà. La question fondamentale qui est posée ici est de savoir pourquoi et comment les inégalités criantes qui sont celles d'aujourd'hui entre les pays/civilisations sont nées ? Pourquoi l'Afrique, où sont nés les Homo Erectus (Toumaï et ses frangins) est-elle à la traîne du développement et dominée par les nations occidentales (sur l'arriération, évidemment, il y a une autre question qui est celle de savoir si nos nations prétendument avancées sont réellement plus heureuses et ont suivi une supposée flèche du progrès) ? Pourquoi les aborigènes d'Australie et les Indiens d'Amérique ont-ils été exterminés (passivement ou activement) par les troupes Européennes (ou leur avatars des antipodes) et pas l'inverse ?
La réponse tacite à cette réponse est, à notre corps défendant, souvent celle d'une thèse plus ou moins raciste, qui est que ces hommes ont été moins "intelligents" ou plus passifs. Réponse immédiate et séduisante certes, mais vraie ? On peut se dire tout simplement que l'évolution (Darwinienne) a fait en sorte que l'homme occidental soit plus adapté à son environnement que l'homme africain. Mais Jared Diamond désamorce cette tentation en reprenant un argument sur lequel je m'interroge depuis quelques années : après tout, l'évolution darwinienne suppose la disparition (ou du moins la non-reproduction) des plus "faibles" ou des "moins adaptés". Or, nos civilisations modernes s'enorgueillissent (à raison) de protéger les plus faibles, et de permettre à ceux qui ne peuvent procréer de le faire (FIV, mères porteuses, ...). Un processus de dévolution ne serait-il pas à l'oeuvre en Occident ? Diamond n'apporte pas de réponse à mon interrogation mais fait remarquer que les conditions de vie en Afrique ou en Nouvelle-Guinée sont probablement plus favorables à une évolution darwinienne que nos sociétés occidentales surprotégées.
Donc si ces civilisations ne sont pas constituées d'êtres plus faibles intellectuellement que nous, pourquoi ont-ils été dominés ? Les raisons immédiates sautent aux yeux : "nous" possédions les armes, le fer, et les germes (la variole et autres maladies ayant exterminé beaucoup plus d'indiens ou d'aborigènes que les armes ...). D'où le titre original "Guns, Germs and Steel".
La thèse de Diamond repose sur un certain déterminisme géographique. Mais il convoque également de nombreuses sciences pour étayer son analyse : archéologie bien sur, mais aussi étude des évolutions génétiques des hommes, animaux ou plantes, évolution des langues (étude des racines et divergences, apparition des mots désignant un animal montrant que celui-ci était apparu dans une civilisation donnée).
Il est attesté que les premiers foyers de développement forts humains ont été le "Croissant Fertile" (nord de l'Irak actuel, Syrie, Israël/Palestine) et la Chine aux environs de 7500 av JC. Le développement s'est fondé sur la domestication des plantes (transformation par évolution génétique progressive de plantes sauvages en plantes domesticables) et des animaux. Ceci a permis à des civilisations de chasseurs-cueilleurs de se sédentariser et de former des villes. Les mêmes villes ont alors permis une concentration propice à l'invention et au développement, d'autant plus que les surplus alimentaires ont à leur tour permis le développement de castes d'artisans ou de fonctionnaires, dévoués à l'évolution de la société plutôt qu'à sa subsistance. Cette même concentration a abouti à transformer les sociétés en bandes de quelques douzaines d'individus en chefferies puis en vrai Etats avec des lois, des règles, une caste dominante entretenant, grâce à l'impôt, des fonctionnaires, des scribes (d'où invention de l'écriture) mais aussi des religieux/mystiques capables de justifier l'existence des chefs comme étant supérieurs au commun des mortels. Bref, le cercle vertueux du développement (simplifié à l'extrême ...).
Pourquoi dans ces régions et pas dans d'autres ? La théorie de Diamond repose sur le fait que ces régions présentaient des dispositions de départ (stocks de plantes et d'animaux domesticables) incomparablement meilleurs qu'en Afrique par exemple. Les ancêtres des boeufs ou chevaux étaient domesticables, le zèbre n'a pas été domestiqué (même de nos jours) ... idem de l'éléphant, du rhinocéros, du tigre, ... Il y avait donc une inégalité de départ qui explique grandement les inégalités d'aujourd'hui ...
Et ça n'est pas tout. En effet, ce qui a permis à Cortes ou Pizarro d'abattre les civilisations Incas et Aztèque, c'était leurs avantages technologiques bien sûr mais pas seulement : ils combattaient à 500 contre 1.000.000 ! Le fait est que les germes étaient également de leur côté ... Les germes exportés d'Europe tuaient les indigènes mais pas l'inverse. Pourquoi ? La proximité des Eurasiens avec les animaux avaient permis aux maladies de passer la barrière animal / humain et de se propager aux humains (cf grippe porcine). Les européens en ont certes grandement souffert (peste de 1346 à 1352 qui a tué 25% de la population européenne) mais leur gènes se sont adaptés et ils sont devenus résistants. Par contre, les peuples conquis tombaient comme des mouches (jusqu'à 95% de mortalité en 3 ans ...).
Vous allez me dire : n'en jetez plus, la coupe est pleine ! Et non ... en effet, l'orientation des continents était également inégale. L'orientation du continent Eurasien est essentiellement Est-Ouest, ce qui favorise la diffusion des cultures et/ou animaux domestiqués. En effet, une plante poussant à une latitude donnée en Inde a de bonnes chances de se répandre facilement à la même latitude vers l'Ouest (Italie ...). Par contre, les Amériques et l'Afrique sont Nord/Sud et les barrières écologiques (Sahel, barrières tropicales, ...) ont grandement retardé la diffusion des cultures et animaux et avec elles les avancées technologiques et civilisationnelles.
Encore un exemple ? Le fait que les peuples Eurasiens étaient interconnectés a favorisé la diffusion des technologies (L'Europe dominante du XVIIIème n'avait quasiment encore rien inventé avant 1500 ...) mais aussi leur non-abandon. En effet, l'acquisition du progrès technologique est loin d'être linéaire. Et Diamond montre que l'idée reçue que le besoin crée l'innovation est une chimère ... l'innovation crée souvent le besoin (Le peuple avait-il besoin d'IPhone ? non ... en a-t-il besoin maintenant qu'il est créé ? oui ...). Des peuples isolés peuvent renoncer à des technologies. Ainsi le Japon, isolé, a décidé de renoncer aux armes à feu après les avoir acquises pour préserver le prestige des samouraïs ! Un peuple aux voisins belliqueux n'aurait pu faire de même ... Diamond donne également d'autres démonstrations du caractère difficilement prévisible de la diffusion de l'innovation. Par exemple, le clavier QWERTY que certains d'entre vous ont sous les doigts a été inventé en ... 1873. Et il a été créé pour ralentir au maximum la frappe (lettres apparentées dans les mots séparées sur le clavier, lettres courantes ("e") main gauche, ...) pour éviter aux machines à écrire de l'époque de se bloquer. Les machines ont évolué ... le clavier est resté !
Ou encore, l'auteur explique que la division chronique de l'Europe (oh combien encore vraie) a été paradoxalement une chance historique de développement. Le long endormissement de la Chine qui était pourtant en pole position pour être la nation dominante est due à une forte unification politique. Des dynasties rétives aux progrès ont pu ainsi sortir leur pays de la compétition ... ce qui n'a pu arriver à une Europe en perpétuelle compétition.
Ainsi démontré, on voit que les Indiens d'Amérique n'avaient aucune chance face aux émigrants européens même si leur nombre était très important (20 millions, loin du million évoqué dans les livres d'histoire américain pour accréditer le mythe fondateur du peuplement pionnier d'un espace vide). Idem pour les aborigènes d'Australie dont le développement était resté extrêmement en retrait du fait de l'isolement de leur île et de son climat très favorable.
Ajoutons à cela à la description par Diamond de pages historiques totalement inconnues (de moi en tout cas) comme par exemple la colonisation austronésienne (peuples du Sud-Est Asiatique) qui entre quelques centenaires d'années avant et après JC, se sont diffusés sur une aire allant des iles du Pacifique à l'Est et à ... Madagascar à l'Ouest, ce qui fait que les langues parlées à Madagascar (et les caractéristiques génétiques des habitants) sont plus proches de celles de l'Asie du Sud-Est que de l'Afrique, et vous obtenez, en 600 pages, une somme d'une intelligence totale, un livre rare et précieux qui devrait être enseigné dans les écoles.
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