Autopsie d'un sans-papiers (Un vrai temps de chiens) de Olivier Las Vergnas

Autopsie d'un sans-papiers (Un vrai temps de chiens) de Olivier Las Vergnas

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Molécule, le 29 août 2009 (Inscrite le 29 août 2009, 78 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (12 424ème position).
Visites : 4 932 

Un réquisitoire implacable..

Le titre dès l’abord m’a questionnée, la première page de couverture est sans complaisance, pas souriante du tout, à quoi s’attendre ?

Sirwan et Samira sont sans-papiers, la situation qui leur est imposée leur vole leur liberté, et les place sous la coupe d‘Otto, personnage trouble et inquiétant.
Ce qui est dit de chacun d’eux retient l’attention et nous les rend proches et sensibles. Au cœur de l‘histoire, le sentiment très fort qui lie Sirwan et Samira, souvent exprimé d’une façon touchante par Sirwan, donne à nos deux héros l’énergie de se battre.

Dans ce présent aride d‘où la poésie n‘est pas absente, un accident les met en péril et l’étau se referme. L’obstination et le courage de Samira, l’intelligence de Sirwan, l’efficacité de Bono, étrange personnage si touchant qu’on veut bien y croire, et la solidarité des compagnons d’infortune de Sirwan laissent un peu espérer …un possible avenir.

Le livre oscille ainsi entre un réalisme noir et presque documentaire, une histoire sentimentale et des anticipations policières terrifiantes, telles les utilisations de ces chiens-robots et de ces puces électroniques.
Il se lit aisément, le récit s’inscrit dans une chronologie précise et un huis-clos dramatique, le montage de l‘histoire est subtil et ce n‘est qu‘à la toute fin que l’on comprend les mobiles du mystérieux Otto.

Otto dit : « Facile de dire qu’il y a des règles et que le rôle des forces de l’ordre est de les faire respecter. On peut arriver à y croire quand on regarde les choses sous un angle collectif, quantitatif. Difficile quand il s’agit d’un individu, une personne identifiée… »

C’est aussi ce que fait l’auteur quand il nous donne à suivre la vie difficile de Samira et Sirwan, à faire face à cette réalité brutale que nous préférons généralement ignorer.

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Un vrai temps de chiens...

10 étoiles

Critique de Proc (, Inscrite le 17 septembre 2012, 56 ans) - 17 septembre 2012

Histoire incroyable entre poésie,science fiction, drame et actualité...
Comme un film d'Hitchcock ça commence à peu près "normalement" et plus on avance dans l'histoire et plus on part dans un imaginaire très spécial, qui flirte avec la réalité très concrète.
Il y a beaucoup d'émotions, les personnages sont touchants sur un fond d'actualité, la condition des sans -papiers, un monde que je ne soupçonnais pas.
Je serai plus sensible au sujet dorénavant.
Première histoire que je lis où le monde des nouvelles technologies est si présent...
Surprenant, je n'ai jamais lu un truc pareil...
Et "Romanesque" premier roman de l'auteur n'est pas en reste !!
Bonne lecture !!

Un roman d'anticipation sociale particulièrement réussi

8 étoiles

Critique de Philippe HUGO (, Inscrit le 11 septembre 2012, 59 ans) - 11 septembre 2012

Connu pour son engagement en faveur de la culture scientifique et de la démocratisation de l'Astronomie (Président de l'Association Française d'Astronomie, directeur de la revue Ciel & Espace, créateur de la Nuit des Etoiles... et bien d'autres choses encore...), Olivier LAS VERGNAS nous livre ici un roman d'anticipation sociale étonnant. Edité précédemment sous le titre "Autopsie d'un sans papier", l'ouvrage bouscule le lecteur en ce sens que les faits relatés s'appuient sur des problématiques sociales et politiques très actuelles (conditions des sans papiers, évacuation des camps de sans paps') et en même temps prend place dans un futur où la cybernétique est parvenue à remplacer le meilleur ami de l'homme par des robots ! Robots qui, ceci dit en passant existent déjà à titre expérimental dans l'armée américaine... Des références régulières à l'astronomie comme moyen d’échappatoire pour le héros du roman, Sirwan, un jeune kurde qui met au point des robots canins... Passionnant ! En espérant que ce roman sera suivi de beaucoup d'autres !

Pas de liberté de circulation pour certains

6 étoiles

Critique de Isad (, Inscrite le 3 avril 2011, - ans) - 26 août 2012

Le récit est raconté par Sirwan, jeune réfugié politique kurde, 3 ans après les faits présentés de manière chirurgicale avec une chronologie précise. Il décrit comment il est tombé dans cette situation de peur perpétuelle, sans possibilité de possession durable, à la merci de la destruction imminente des quelques pauvres biens qu’il a amassés et comment il tient le coup, féru d’astronomie, en rêvant des étoiles.

Ce livre, sous couvert de l’histoire de 2 sans-papiers d’origine et de parcours différents, condense beaucoup de réflexions pour ou contre l’accueil d’étrangers poussés à fuir leur pays par les conditions économiques ou politiques.

Des éléments bien contemporains y figurent, tels la RGPP et la politique des quotas, l’obsession sécuritaire et le malaise induit par les reconduites à la frontière, parfois contre rétribution avec le trafic qui s’organise devant cet argent facile à gagner pour des passeurs. Les aspects futuristes concernent les chiens-robots ou l’implantation de puces pour localiser les clandestins récupérés.

IF-0812-3939

Poussières d’étoiles sur un ciel d’encre

9 étoiles

Critique de Jean-noel (, Inscrit le 30 août 2009, 70 ans) - 30 août 2009

Avec Autopsie d’un sans-papiers, Olivier Las Vergnas livre à ses lecteurs un deuxième roman, publié au Passager Clandestin, comme le premier, Romanesque 2.0, il y a deux ans. Entre temps, Le Passager Clandestin a vu son catalogue s’enrichir et met aujourd’hui à la disposition du public des ouvrages appartenant à des genres variés (romans, essais, photographie…) et revient aussi sur la littérature politique passée en en rééditant certains textes.

Autopsie d’un sans-papiers est, pour moi, une suite de Romanesque 2.0. On y retrouve l’ambiance tendue d’une action qui se déploie en un temps très court, les effets de suspense, les thématiques abordées dans le texte précédent : problèmes sociaux, génie informatique, amours qui se heurtent à l’âpreté d’un monde sans merci.

Mais Las Vergnas va ici plus loin. Il me semble pousser les paramètres thématiques et stylistiques jusqu’à placer le lecteur face à une œuvre marquée d’incandescence et d’étrangeté.
D’incandescence car son héros est dans une situation en tout point désespérante, exception faite des sentiments qui l’unissent aux deux seuls personnages à la fois vivants et positifs du roman, et dont l’un n’est même pas humain, puisqu’il s’agit d’un chimpanzé. En choisissant, par ailleurs, d’écrire à la première personne, l’auteur centre tout le roman sur le personnage principal et interdit au lecteur tout relâchement de tension.

Autopsie d’un sans-papiers est marqué d’étrangeté, en ce que l’auteur joue de contrastes multiples qui ébranlent le lecteur. Contraste entre réel et virtuel : le personnage principal est un as de l’informatique, au point de laisser le lecteur profane pantois devant tant de virtuosité ; mais il est aussi pétri de souffrances après un passé de malheur, plongé dans un présent qui l’écrase et face à un avenir obscur. Et les sentiments qu’il éprouve pour l’héroïne semblent souvent autant un fardeau qu’un soutien.Contraste entre vie et mort. Le héros vit en effet entouré de personnages dont la qualité d’êtres vivants est toujours incertaine, tout comme leur rapport au bien et au mal.
Contraste entre surface, où se déroule la vie de la cité, et sous-sol, où survit le héros, par peur, certes objectivement fondée, mais aussi sans amplifiée par les fantômes qui hantent ce personnage.
Contraste enfin entre une intrigue qui prend, à partir de l’acte 2, l’aspect d’un roman de science-fiction, et qui ne cesse pourtant jamais de faire référence à notre banlieue parisienne d’aujourd’hui, sous certains de ses aspects les plus conformes aux échos d’une actualité bruyante.

Et l’auteur de mêler indissociablement ces éléments contrastés, de sorte, finalement, qu’il m’est arrivé de m’interroger en cours de lecture sur la nature de ce que je lisais. Certes, vouloir à tout prix faire entrer un roman dans une catégorie est discutable et préjudiciable à la perception de son originalité. Et original, Autopsie d’un sans-papier l’est pour moi jusqu’à l’étrange.

J’évoquais plus haut les points qui rapprochent ce roman du précédent roman d’Olivier Las Vergnas. Il en est encore un qui m’a permis de me retrouver en terrain familier : le pessimisme de l’auteur, qui a écrit avec Autopsie un texte encore plus noir que Romanesque. Un texte dans lequel les sentiments humains ont la tonalité du désespoir ou du souvenir. Un texte dans lequel, dans un monde où la compassion n’a guère de place, le héros, l’héroïne et leur fidèle compagne anthropoïde ne semblent que poussières d’étoiles sur un ciel d‘encre.

Lin (alias Jean Noel)

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