Mon évasion : Autobiographie de Benoîte Groult
Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances
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Une admirable écrivaine
Les hasards de la lecture m'ont fait rencontrer ce dernier livre de Benoîte Groult, quelques semaines après celui de Simone de Beauvoir "Mémoires d'une jeune fille rangée".
On retrouve de nombreux points communs dans ces deux autobiographies et ce même combat pour une égalité homme/femme. D'ailleurs, Benoîte Groult fait souvent allusion à son illustre précédente. (Je voulais écrire "précurseur", mais je n'ai pas trouvé le féminin!! Il y a encore du travail, Madame Groult!))
Dans cette autobiographie, Benoîte Groult nous, raconte "sa vraie vie", avec "la franchise et l'insouciance que seul l'âge peut conférer."
Elle retrace donc les grands moments de sa vie avec son humour omniprésent et une grande lucidité par rapport à la femme qu'elle était, ses choix, ses erreurs.
Viennent ensuite les chapitres que j'ai trouvés les plus émouvants, les moins connus peut-être; ses vacances avec ses petites filles, la tristesse et la révolte de voir ses propres enfants vieillir et surtout le poignant "Plic et Ploc septuagénaires vont à la pêche". Benoîte Groult relate avec une authenticité émouvante les sorties en mer, les trahisons des corps qui vieillissent. "Vient un âge, où autour de soi, tout le monde il est mort, tout le monde il est malade. Difficile de ne pas en vouloir à tout le monde."
En alternance, quelques chapitres sous forme d'entretien avec Josyane Savigneau (journaliste et écrivaine) où elle nous rappelle les remous qui ont accompagné la sortie de son roman "Les vaisseaux du coeur", sa présidence de 1984 à 1986 de la Commission de terminologie pour la féminisation des noms de métiers, de grades et de fonctions.
Et puis les dernières pages sur la mort de son époux et compagnon pendant tant d'années mais sur lequel elle se pose, même après son départ, encore des questions.
Les dernières lignes sur la mort, bien sûr, son inscription à l' Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité et l'envie de continuer "à jouir de la beauté du monde, du bonheur d'écrire et du plaisir de se réveiller chaque matin".
"..... tant que mes enfants me ramèneront aux racines de l'amour, la mort ne pourra que se taire. Moi vivante, elle ne parviendra pas à m'atteindre."
Un livre superbe écrit par une presque nonagénaire impressionnante
Les éditions
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Mon évasion [Texte imprimé], autobiographie Benoîte Groult
de Groult, Benoîte
B. Grasset
ISBN : 9782246534822 ; 18,49 € ; 24/09/2008 ; 333 p. ; Broché -
Mon évasion [Texte imprimé], autobiographie Benoîte Groult
de Groult, Benoîte
le Livre de poche / Le Livre de poche
ISBN : 9782253128045 ; 7,70 € ; 02/06/2010 ; 352 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (7)
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Des difficultés perceptibles au XXème siècle
Critique de Meuhriel (, Inscrite le 11 septembre 2015, 31 ans) - 29 août 2017
Une prise d'expérience de cette femme
On découvre également, et de manière appréciable par une écriture fluide, l’ensemble de la vie de cette auteure, de manière assez chronologique. Petit à petit nous découvrons une femme qui s’assume, qui prend ses rêves en main – même s’ils peuvent apparaître comme tardifs – et qui évolue indéniablement avec la prise des années, mais également avec l’avancée des droits comme des mentalités au cours du siècle. J’ai apprécié de découvrir ses sensations face à sa propre vie, qui nous sont décrites par le biais de cet écrit. La maturité et l’expérience de Benoîte Groult y sont perceptibles tout au long du récit ; la romancière nous fait ressentir sa propre évolution tout en nous décrivant sa vie, son vécu.
Une belle découverte en somme, que je vous recommande.
https://lectriceassidueendevenir.wordpress.com/201…
C'est beau, la vie!
Critique de Provisette1 (, Inscrite le 7 mai 2013, 12 ans) - 1 novembre 2013
Un parcours féminin
Critique de Paofaia (Moorea, Inscrite le 14 mai 2010, - ans) - 31 octobre 2013
" Quel philtre avais-je donc bu, se demande-t-elle, pour être restée le quart de ma vie en léthargie tandis que le monde civilisé s'effondrait autour de moi ? "écrit-elle en racontant une anecdote assez terrible sur la conduite de sa famille devant une petite fille juive venant leur demander de l’aide.
" Il allait me falloir encore vingt ans et trois mariages pour me rendre compte que je jouais avec des dés pipés. »
Et aussi: L'inégalité s'apprend dès l'enfance. Je l'avais ingurgitée sans grimaces en doses quotidiennes pendant vingt ans et je l'avais totalement assimilée."
C’est ainsi que dans ce livre dans lequel elle raconte sa vie avec pas mal d’humour et une honnêteté assez rare, elle explique quel a été son cheminement, et surtout quelles ont été ses difficultés pour parvenir à simplement prendre conscience d’inégalités flagrantes. Sur quels exemples se baser, que ce soit dans l’histoire, la religion , ou la littérature ?
Il faut, je crois, que l’un des deux en se mariant renonce entièrement à soi-même et fasse abnégation non seulement de sa volonté mais même de son opinion; qu’il prenne le parti de voir par les yeux de l’autre, d’aimer ce qu’il aime. Mais aussi quelle source inépuisable de bonheur quand on obéit ainsi à ce que l’on aime! L’on fait à la fois son devoir et son bonheur". Ben voyons…
C’est un extrait d’une lettre d’Aurore Dupin à une amie lors de son mariage avec Casimir Dudevant, citée par Benoite Groult disant que 100 ans après, elle aurait pu écrire la même chose, elle qui comme la future George Sand , a reçu une claque lors d’un dîner d’amis, de la part de son mari Georges de Caunes , pour avoir exprimé un avis différent du sien …
C’est un livre bien construit, fait à la fois de récit et d’entretiens avec Josyane Savigneau. Un livre très vivant, un beau portrait de femme qui n’a pas peur d’affronter ses (et nos..) propres contradictions et de se moquer d'elle-même. Une femme qui nous fait un inventaire assez drôle des héroïnes féminines et de tout ce qui leur arrive comme malheurs , une femme qui aime la mer, la pêche, les jardins, les livres et tellement de choses, et une femme qui parle avec beaucoup de sincérité du vieillissement , sujet qui n’est pas si souvent abordé.
De la mort aussi, mais…
Tant que je saurai où demeurer, tant que je serai accueillie en arrivant par le sourire de mes jardins, tant que j’éprouverai si fort le goût de revenir et non celui de fuir; tant que la terre n’aura perdu aucune de ses couleurs, ni la mer de sa chère amertume,ni les hommes de leur étrangeté, ni l’écriture et la lecture de leurs attraits; tant que mes enfants me ramèneront aux racines de l’amour, la mort ne pourra que se taire.
Moi vivante, elle ne parviendra pas à m’atteindre.
C’est joli..
Un magnifique cadeau, d'une grande générosité...
Critique de FranBlan (Montréal, Québec, Inscrite le 28 août 2004, 82 ans) - 10 mai 2011
Un magnifique cadeau que cette autobiographie vigoureuse et remplie d'humour retraçant les étapes qui ont marqué presqu'un siècle de vie.
Tout y est de cette vie bien remplie: une enfance privilégiée mais sage et bien encadrée, des études classiques dans une institution catholique, sa jeunesse sous l'Occupation, l’entrée tardive mais définitive en féminisme, le succès spectaculaire d'Ainsi soit-elle en 1975, puis des Vaisseaux du cœur, la création de F Magazine avec Claude Servan-Schreiber.
Benoîte Groult raconte sa longue marche vers l'autonomie, sans complaisance, avec la distance que donne l'âge...
J'ai lu avec émotion les passages sur sa relation avec son compagnie de vie pour plus de cinquante ans, leur passion commune pour la pêche, sa douleur et son impuissance de voir vieillir ses filles, son bonheur et ses joies de grand-mère et d'arrière-grand-mère...
Portant un regard lucide sur son parcours, elle conclut: «Je ne suis pas devenue une grande prêtresse du féminisme, je n’ai jamais eu envie d’entrer dans une chapelle. Je voulais me garder libre; alors, je me suis battue dans mes livres».
Allez les filles !
Critique de Bolcho (Bruxelles, Inscrit le 20 octobre 2001, 76 ans) - 10 avril 2011
Bien sûr, ce livre laisse aussi comme une impression morose : le féminisme est plus ou moins mis au placard, les jeunes générations de femmes ont presque abandonné la lutte qui est pourtant bien loin d’avoir abouti. Puissent-elles lire cette autobiographie de Benoîte Groult pour reprendre goût au combat.
En 1801, le Jacobin Sylvain Maréchal propose son Projet de loi portant défense d’apprendre à lire aux femmes. Le Code Civil de Napoléon, lui, fera des femmes des incapables civiles et des mineures leur vie durant.
Les hommes qui ont affirmé l’égalité des sexes sont restés isolés : Condorcet, Guyomar, Fourier…
La psychanalyse naissante aurait pu changer les choses, mais non, les femmes sont devenues des « mâles manqués, des hommes castrés, des êtres déficients de corps et d’âme ». Marie Bonaparte est allée jusqu’à se faire opérer du clitoris pour jouir selon le diktat de Freud !
Beauvoir pensait qu’avec l’avènement du socialisme l’égalité homme/femme serait automatique. Moi aussi à l’époque, mais on a raté le socialisme et je ne pense même plus qu’il aurait résolu cette question-là.
Lors de sa réception à l’Académie française, en 1997, on a obligé Hector Bianciotti à commencer son discours par « Messieurs » alors qu’il y avait deux académiciennes devant lui.
Aujourd’hui encore, des sociologues continuent à prétendre que « l’initiation aide l’enfant à franchir les stades de son évolution sans heurts et sans refoulements » (Robert Arnaud). L’ « initiation » en question, c’est la clitoridectomie… Avec l’infibulation, « on a là une fixation masculine démentielle sur le sexe féminin qu’il importe de réduire à sa plus simple expression. »
Il reste deux bastions aujourd’hui que les hommes défendent férocement : l’Eglise et le pouvoir politique. La misogynie a compté dans la non-élection de Ségolène Royal.
En politique : « Selon des études (…) c’est à partir de 30% que les femmes peuvent exercer une influence (…). « En dessous, elles ne servent à rien, sinon à fournir des modèles d’identification à d’autres femmes, ce qui n’est pas rien d’ailleurs. Mais elles sont des alibis, des otages, qui ne pourront modifier en aucune façon l’ordre normalisateur ».
A propos de la féminisation des noms de fonctions :
« Rendre invisible dans le vocabulaire l’accession des femmes à de nouvelles fonctions, c’est une façon de la nier ».
« L’acceptation du féminin est inversement proportionnelle au prestige de la formation ».
« L’anomalie dans le langage souligne l’anomalie dans la société. Le langage forge l’identité de ceux ou celles qui le parlent, que cette identité soit nationale, culturelle ou sexuelle ».
Dans la littérature « Les femmes sont systématiquement punies pour avoir trop aimé » : Emma Bovary, Anna Karénine, Madame de Merteuil, Justine de Sade, Madame de Rênal, Marguerite Gautier…
Z’avaient qu’à rester chastes sans doute…
Une vie bien remplie
Critique de Saumar (Montréal, Inscrite le 15 août 2009, 91 ans) - 13 décembre 2010
Elle nous raconte, sans sensiblerie, ses réelles expériences vécues : son enfance privilégiée, mais bien encadrée, son adolescence et ses études classiques, puis sa jeunesse sous l’Occupation et, devenue adulte, ses succès d’écriture. Elle a aussi connu des déboires. Confrontée à l’explosion de misogynie grivoise dans le milieu intellectuel, s’ajoutent les avortements clandestins, puis dans ses écrits, la lutte continuelle pour le féminisme, souvent critiquée. Lorsqu’elle est devenue arrière-grand-mère, elle rappelle qu’il reste beaucoup à faire pour la cause des femmes, tout en considérant le chemin parcouru, "dont les jeunes femmes d’aujourd’hui n’ont aucune idée ». Très intéressant l’entretien entre elle et la journaliste Josyane Savigneau abordant les sujets, homme/femme, tabous d’alors, dans «Les vaisseaux du cœur» et «Ainsi soit-elle ». Et ce, sans que l’écrivaine doute, au moment de l’écriture, qu’ils deviendraient des « manifestes féministes ».
L’âge avançant fait subir plus de deuils : Conjoints, parents, amis, ou voisins disparaissent. En parlant de la mort, elle écrit dans son dernier paragraphe «Tant que mes enfants me ramèneront aux racines de l’amour, le mort ne pourra que se taire. Moi vivante, elle ne parviendra pas à m’atteindre ».
J’ai bien aimé l’autobiographie de Benoîte Groult. Malgré le récit de la dure réalité des personnes âgées, elle m’inspire. Tout comme elle, j’aimerais garder ce dynamisme jusqu’au moment où je serai prête à appuyer sur « la touche étoile ». Non pas pour quitter plus tôt ce monde, mais pour éviter les atroces souffrances de fin de vie. Merci à cette talentueuse écrivaine, ce livre ne laisse pas indifférent.
Etre féministe sans être anti-hommes
Critique de Cathybaie (, Inscrite le 5 août 2010, 44 ans) - 15 octobre 2010
Bien écrit, drôle, réfléchi, ce livre me donne envie de lui dire merci!
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