Le Bout du rouleau de Richard Ford

Le Bout du rouleau de Richard Ford
( The ultimate good luck)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Tistou, le 8 avril 2009 (Inscrit le 10 mai 2004, 67 ans)
La note : 7 étoiles
Visites : 3 868 

La poisse à Oaxaca

« Le bout du rouleau » est le second roman de Richard Ford. Difficile de trancher entre la qualification de roman ou de polar. Allez ! On dira roman noir … ?
Oaxaca est une petite ville mexicaine où Harry Quinn, américain, vient d’arriver. Genre bled pourri de chez pourri, mais il a un but pour cela, et une bonne raison derrière le but …
Le but, c’est de faire en sorte que son copain, ou plutôt le frère de sa copine, Sonny, soit libéré de la prison – mexicaine, et bonjour l’ambiance – où il est incarcéré au motif de trafic de drogue.
La bonne raison, c’est que Sonny est le frère de Rae, sa copine un peu perdue de vue ces derniers temps, et que répondre au SOS de cette dernière pour libérer le frérot semble à Quinn un acte à même de contribuer à la réconquête de ladite Rae.
Il ne s’agit pas de le faire évader, ou autre plan style série B. Non. Il s’agit de mener les tractations, via un avocat mexicain, avec l’argent nécessaire amené par Rae, pour obtenir sa libération. Mais voilà. On est au Mexique. Et à Oaxaca, ce qui commence à ressembler au pays profond. Et entre les relations opaques avec l’avocat, la corruption des autorités et de la police, les terroristes et leurs homologues ; soldats des forces spéciales, les trafiquants de drogue avec qui fricotait Sonny, ça fait du monde et pas que du beau. Plutôt le genre panier de crabes.
Et Richard Ford traite le sujet à hauteur de Harry Quinn, c’est à dire à hauteur de quelqu’un qui est balloté par les évènements, qui ne maîtrise rien. On est donc balloté avec lui, on subit avec lui, et cette ambiance d’incompréhension glacée qui nous étreint est furieusement en décalage avec la nature de soleil et de lumière du Mexique, et d’Oaxaca en particulier. Très étonnant comme sensation que ce décalage.
Quelque part j’ai irrésistiblement pensé à Jean-Patrick Manchette, et notamment son « La princesse du sang », pour la similitude de lieu certainement, mais aussi cette impression de lecture sur « papier glacé » dûe à ces décalages. Et des dialogues déconcertants de ce tonneau par exemple :

« Il entendit des pas sur les dalles du couloir. Rae se retourna et leva les yeux vers le globe du plafond.
Est-ce que je te plais simplement parce que je suis plus jolie que les autres ? demanda-t-elle. Escuse-moi de te poser cette question, mais c’est plus fort que moi.
Il écoutait les bruits de pas qui approchaient.
Oui, il y a de ça, fit-il.
Alors ça me va, dit Rae. Je n’aimerais vraiment pas que tu me largues pour quelqu’un qui te plairait moins que moi.
Personne ne pourrait me plaire moins que toi, dit-il, et personne ne pourrait me plaire davantage. J’ai appris ça quand j’étais gosse.
Elle se tourna vers Quinn pour lui demander :
Tu as cru pouvoir vivre sans moi, n’est-ce pas ?
Je l’ai cru un moment, dit-il.
Mais tu ne peux pas ?
Non. Je ne peux pas.
Elle se rallongea sur le dos et réfléchit.
Sais-tu quel jour nous sommes ? dit-elle doucement. »

Au bilan une lecture très agréable, un peu plus consistante qu’un pur polar, une lecture sur papier glacé.

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