Le labyrinthe de Panos Karnezis

Le labyrinthe de Panos Karnezis
( The maze)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Débézed, le 12 janvier 2009 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans)
La note : 8 étoiles
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L'odyssée du Général Nestor

La présentation du livre « évoque, bien sûr, le Désert des Tartares de Dino Buzzati » et son armée vaine et puérile mais aussi, et surtout, « un formidable roman épique où résonne l’écho d’une geste plus ancienne ». Le labyrinthe est en fait l’épopée tragique et grotesque d’une brigade grecque défaite en 1919 dans la guerre contre la Turquie, en Anatolie, et qui erre dans le désert pour chercher une issue vers la mer et vers la mère patrie. Cette épopée est retracée à travers quelques personnages qui constituent la théogonie de cette troupe en déroute : le général morphinomane écrasé par l’humiliation de la défaite et le décès de sa femme, le colonel, homme de guerre, qui a perdu sa motivation militaire et qui ne croit plus en sa hiérarchie et en le pouvoir en place, le prêtre qui a perdu ses ouailles et qui persiste à garder la foi, le médecin militaire qui croit fermement en la science mais qui peu à peu désespère des homme et un caporal, candide au milieu de ceux qui ont le pouvoir, qui ne croit plus qu’en l’amour d’une belle bien hypothétique là-bas au pays. Et cette petite troupe défaite, accablée par la malédiction et les éléments traîne sa misère sous un soleil de plomb avec un vilain secret dans ses bagages qui pèse aussi lourd sur les consciences que sur le moral de ces soldats en déroute.

Ce récit serait trop improbable si Karnézis ne nous invitait pas, par des allusions régulières, à lire cette histoire comme une épopée antique avec ses héros et ses traîtres, ses exploits et ses viles bassesses et tous ces preux guerriers en quête d’une gloire quelconque militaire, religieuse, scientifique ou plus simplement populaire. Et, même l’aviateur qui aurait pu sauver la troupe qu’il a repérée dans le désert se brûle les ailes en tombant du ciel comme un Icare, mais en sens inverse, brûlant les siennes en voulant s’évader lui aussi de son labyrinthe. Et le général reste convaincu qu’« Il est regrettable de ne pas connaître l’histoire de son propre peuple. Mais presque criminel d’ignorer sa mythologie… Car la mythologie est plus que de l’histoire, … , C’est aussi de la science. »

En ressuscitant l’épopée des dieux de l’Olympe, Karnézis a aussi voulu montrer toute la puérilité des guerres qui régulièrement enflamment ce qu’on appelait encore le « Levant » à l’époque où l’auteur fixe son récit, mais aussi tous les travers de l’humanité où l’homme confronté aux limites de son existence retrouve tous les instincts et les vices qui le rapprochent du monde animal aux abois. Caleb, le chien du prêtre semble avoir plus d’humanité que les hommes qui l’entourent. Et, il ressort de cette épopée comme une fatalité qui rend toutes les bonnes volontés vaines et inutiles devant le l’impitoyable destinée de chacun.

Et, quand l’armée après avoir retrouvé la ville et l’espoir prend le chemin de la mère patrie et bien que la défaite et le remord assomment toujours un peu plus le général, la presse pourrait construire avec cette retraite salvatrice une légende où cette « équipée et celle des Dix Mille de Xénophon ? » auraient certaines analogies.

A l’aube de cette nouvelle légende, dans cette armée fuyant Smyrne avec sa population chrétienne, on croit voir parmi les civils qui ont choisi le chemin de l’exil, les ancêtres grecs que Jeffrey Eugenides a fait revivre dans Milddlesex.

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