Le train pour Samarcande de Danielle Trussart

Le train pour Samarcande de Danielle Trussart

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Dirlandaise, le 31 décembre 2008 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 70 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (26 276ème position).
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Blanche fait ses adieux

Blanche Bouchard est parvenue à la fin de sa vie. Elle est très âgée et sent la mort approcher à grands pas. La vieille dame habite le joli village de Baie-Saint-Paul dans la région de Charlevoix, au Québec. Elle y a passé toute sa vie et y connaît tout le monde. Blanche fait ses adieux à la vie en jetant un regard rempli de nostalgie et de tendresse sur les gens qui lui ont été les plus proches : Florent son mari, Louis-Jonas son fils adoré, Jeanne-D’arc son amie de toujours qui a été son soutien et sa confidente dans les épreuves. Blanche a donc décidé de faire ses adieux. Elle range sa maison, remplit des boîtes avec ses livres, ses précieux compagnons grâce auxquels elle parvenait à s’évader du quotidien souvent routinier de sa vie et observe sa nouvelle voisine, une peintre abstraite dont les toiles colorées l’intriguent au plus haut point. Blanche a toujours aimé l’art, la géographie et les pays lointains. Elle a une carte du monde épinglée sur le mur de son salon et la redessine lorsque les frontières changent ainsi que les noms. Elle rêve de prendre le train pour l’incomparable Samarcande et de visiter cette ville ocre et rose, admirer les coupoles bleues des mosquées, les minarets, les fontaines, les palais…

Danielle Trussart est née à Montréal et vit maintenant à Baie-Saint-Paul. Elle signe ici son premier roman qui a reçu le prix Robert-Cliche 2008. Par le biais du personnage de Blanche, c’est une belle réflexion philosophique sur la vie, la vieillesse et la mort que nous livre ici l’auteure. Blanche est une femme volontaire qui n’accepte pas de finir ses jours dans un centre d’accueil et qui désire rester dans sa maison. Elle est cultivée, ouverte sur la misère du monde et aide beaucoup ses voisins dans la mesure de ses moyens, entre autres une jeune fille aux prises avec une vie familiale perturbée et une mère dépressive.

C’est une écriture toute simple mais très belle qui nous décrit la vie d’un petit village qui voit le temps passer et qui doit s’adapter aux changements qui viennent bouleverser la vie de ses habitants. Blanche jette un regard désabusé sur tout ça et s’interroge sur le sens de la vie et de la mort d’une façon tout à fait touchante. J’ai beaucoup aimé pour la finesse de l’analyse des relations entre Blanche et ses proches ainsi que pour les nombreux personnages truculents qui composent la population oisive du village et que Blanche renomme à sa fantaisie : Brouillard, Litanie, Zizanie, Bidou, Bozo, Tit-Homme, La Sainte… Savoureux mais un tantinet déprimant.

« Chaque jour fournit son nouvel arrivage d’existence bousillées, son lot de chair à canon, de corps affamés, écrasés, violés, troués, mutilés, irréparables, bons à jeter aux poubelles de l’histoire. Dans la macabre cargaison d’aujourd’hui, a déclaré la journaliste, il se trouvait un jeune garçon dont le corps était criblé de trous de perceuse électrique. Les yeux aussi. Quel est donc le commencement du récit qui peut aboutir là ? Quel est cet écrivain fou ? »

« — Blanche, reste avec moi du côté des vivants. Toutes les deux, on va faire face ensemble. Pourquoi aller au-devant de la mort ? Laisse-la nous courir après. Ne la regarde pas dans les yeux, au moins. Fais ton indifférente, comme si tu ne la voyais pas. Aie l’air occupé, n’attire pas son attention sur toi. Ne demeure pas immobile, tu deviens une cible trop facile. Défends-toi donc, au lieu de lever la main pour te porter volontaire ! »

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Les éditions

  • Le train pour Samarcande [Texte imprimé], roman Danielle Trussart
    de Trussart, Danielle
    VLB / Collection Roman (Montréal)
    ISBN : 9782896490479 ; 20,00 € ; 01/11/2008 ; 229 p. Broché
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Le train de Samarcande de Danielle Trussart

8 étoiles

Critique de Micka (, Inscrite le 20 mars 2004, 81 ans) - 14 mai 2009

Résumé :
Blanche vieille dame de Baie St Paul, qui vit seule depuis la mort de son mari Florent. Dame très cultivée, elle voit sa mort imminente, or elle fait le ménage de ses affaires et ce tout en parlant à Florent à qui elle donne des nouvelles du monde autour d’elle. Blanche est maintenant rendue au bout de son avenir comme elle le dit. Elle refuse qu’on la place dans un centre d’hébergement.
Nous faisons connaissance avec Jeanne D’Arc, sa grande amie, Mélodie, sa petite protégée, et Ariane, la femme au pinceau.

Points positifs :
Dès les premières pages nous sommes subjugués par l’écriture si savoureuse de l’histoire de cette Blanche et de ses amis. Nous l’accompagnons dans toutes les pièces de sa maison, l’écoutons tout oreille. Nous regardons aussi comme elle par la fenêtre les gens du voisinage qui déambulent. Nous lisons son registre qui décrit si bien les personnages qu’elle aime, qu’elle a surnommé à sa guise avec beaucoup de tendresse : Brouillard, Litanie, Zizanie, Bidou, Tit-Homme, la Sainte. Ce sont des personnes qui débordent des cadres à cause de l’hôpital qui les a poussés hors des murs.
Il y a de l’humour dans sa façon de dire de décrire les situations.
Elle répond à qui veut la faire entrer en centre d’accueil à cause de son état: " Qu’est-ce qu’elle en sait de mon état ? En quoi il la regarde mon état ? C’est un état indépendant après tout. Il n’a pas encore été annexé, que je sache. Est-ce que j’ai une date de péremption sur le front ? Savoureuse!

Elle décrit la maladie d’une personne suicidaire comme suit : Un petit rien s’était mis à aller de travers dans sa vie. Un petit rien insidieux qui creusait des tunnels dans son âme et migrait d’un point à l’autre comme une métastase. Tellement beau.

Points négatifs :
Je déteste me faire raconter des rêves, ce que l’auteur fait quelquefois
Le chapitre de la femme au pinceau : dialogue trop long entre Ariane et Blanche sur la peinture abstraite.
L’insertion de Gabrielle Roy, Jean-Paul Lemieux et Philippe Noiret à mon sens était pas superflu

Appréciation globale :
Un beau, beau roman, beaucoup d’émotions, d’une grande lucidité, aux images fortes, écrit avec poésie. Même si on aborde le thème de la mort, ce n’est ni triste, ni déprimant.

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