La délivrance dans les contes de fées de Marie-Louise von Franz

La délivrance dans les contes de fées de Marie-Louise von Franz
( Erlösungsmotive im Märchen)

Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Critiques et histoire littéraire , Sciences humaines et exactes => Psychologie

Critiqué par Pétoman, le 20 novembre 2001 (Tournai, Inscrit le 12 mars 2001, 49 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 9 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 491ème position).
Visites : 6 467  (depuis Novembre 2007)

Jung nous libère

ML von Frantz est une psychanalyste, disciple de Jung, qui en fonction de la psychanalyse de ce dernier, a passé une bonne partie de sa vie à analyser les contes de fée en fonction de notions jungiennes telles que anima, animus et archétype.
Dans cet ouvrage, elle analyse quelques contes populaires et analyse les objets magiques en fonction de leur symbolysme. Par exemple, l'eau symbolise plusieurs choses, la fleur aussi etc. Dans tout cet ouvrage, nous aurons ainsi droit à l'analyse de diffrents symbolismes. Une critique à cet ouvrage: sans doute une vision trop typée des choses, trop jungienne...mais c'est aussi son but. A conseiller aux fans de Jung et des contes de fée.

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  Marie-Louise von Franz.
  • La délivrance dans les contes de fées

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Un prise de conscience pour se délivrer de soi-même ?

8 étoiles

Critique de Fee carabine (, Inscrite le 5 juin 2004, 50 ans) - 21 novembre 2005

Les motifs de la délivrance dans les contes de fées... Voilà qui nécessite peut-être un mot d'explication, surtout dans la version originale anglaise "redemption motifs" qui pourrait suggérer une réflexion religieuse alors qu'il n'en est rien. Non, la délivrance dans un conte de fées, c'est tout bêtement ce moment à la fin du conte où le héros vient à bout du dragon qui retenait la pauvre princesse prisonnière ou encore le moment où la grenouille se métamorphose miraculeusement en prince charmant sous l'effet du baiser de la princesse... Mais nous savons depuis longtemps que les héros pourfendeurs de dragons n'existent pas plus que le prince charmant, et alors, me direz-vous, quel est l'intérêt de ce livre?

Elève et assistante de Carl-Gustav Jung, Marie-Luise von Franz s’est beaucoup intéressée aux contes de fées et à leur interprétation en termes psychologiques, un sujet auquel elle a d’ailleurs consacré plusieurs ouvrages, dont “La voie de l’individuation dans les contes de fées” déjà critiqué sur ce site. Dans le livre dont je souhaite vous parler aujourd’hui, elle s’attarde assez longuement sur les raisons de cet intérêt, un intérêt qui est motivé par l’hypothèse que les contes sont à l’inconscient collectif d’une société ou d’un groupe ce que les rêves sont à l’inconscient de l’individu. La lecture et l’analyse des contes de fées nous donneraient donc accès à tout un savoir accumulé par l’inconscient collectif concernant par exemple le processus de l’individuation (cfr “La voie de l’individuation dans les contes de fées”), le traitement de certains troubles psychologiques (contamination entre deux complexes autonomes, conflit entre l’anima et la “Weltanschauung” consciente) ou des problèmes très concrets de la vie quotidienne (que faire lorsqu’on se trouve sous l’emprise d’une émotion violente)... Le principe de l’analyse peut paraître à première vue relativement simple : chaque personnage du conte peut être associé à un complexe autonome ou à un archétype, par exemple, le héros, celui qui sait ce qu’il faut faire dans la situation décrite par le conte, sera associé au “Soi”. Mais en fait, cette première analyse se révèle simpliste et doit être affinée : le héros, par exemple, sera finalement associé à un aspect particulier du complexe du “Soi”, celui qui joue le rôle de modèle et de guide dans le développement du complexe de l’“Ego”. Ceci simplement pour donner un exemple des principes de l’analyse d’un conte, car il faut dire que certains contes se révèlent tellement riches qu’ils se prêtent à plusieurs jeux d’associations, et donc à plusieurs lectures différentes... Et puis, tout cela sera sans doute beaucoup plus clair si l’on en vient à quelques cas pratiques...

Un premier cas, relativement simple, est celui de contes dans lesquels l’héroïne s’efforce de délivrer ses frères ensorcelés et transformés en animaux. Ce canevas apparaît en fait sous plusieurs variantes (dont une très célèbre due à la plume d’Hans Christian Andersen) qui diffèrent essentiellement par le nombre des frères, la nature de l’animal dans lequel ils sont transformés et la personne qui est à l’origine de la transformation. La condition de leur délivrance est en revanche toujours la même : l’héroïne doit filer, tisser et coudre pour chacun de ses frères une chemise, à partir des fibres d’une plante sauvage. Elle doit en outre observer un silence absolu pendant tout le temps qu’il lui faudra pour réaliser ces chemises. Marie-Luise von Franz s’attarde longuement sur ce motif de la transformation en animal, qui est un motif très fréquent se prêtant à de mutiples interprétations selon le type d’animal, les conditions de la transformation... Un premier niveau de lecture consiste à reconnaître dans l’animal un contenu inconscient, ou bien une émotion, qui après avoir été réprimé pendant une longue période a commencé à accumuler de l’énergie tout en se “déshumanisant”. L’épreuve imposée à l’héroïne pour obtenir la délivrance de ses frères tombe alors sous le sens : il faut donner au contenu réprimé une expression appropriée, c’est à dire une chemise... Bon, il y en a beaucoup plus à dire, notamment sur ce que révèle le motif de la chemise, et je simplifie énormément l’analyse de Marie-Luise von Franz, mais celle-ci n’en reste pas moins toujours parfaitement accessible et compréhensible.

Le motif de la chemise, justement, apparaît aussi dans le conte du Roi Lindworm. Il s’agit là d’un conte particulièrement impressionnant dans lequel une reine met au monde un enfant-dragon qui s’empresse aussitôt de mettre le royaume de ses parents à feu et à sang et de recourir aux pires menaces pour obtenir la satisfaction de ses moindres caprices... Dans le symbolisme des alchimistes, le dragon est communément associé à la notion d’hermaphrodyte ou à l’“indifférencié”, ce qui conduit Marie-Luise von Franz à proposer une lecture de ce conte en termes d’une contamination des complexes de l’“Ego” et du “Soi”, un problème très sérieux qui s’accompagne généralement chez une personne atteinte d’un sens moral déficient – voire inexistant -, si bien que cette personne peut représenter un danger réel pour ses proches, en plus d’avoir un comportement destructeur pour elle-même (Adolf Hitler aurait souffert de cette forme de névrose...). Dans le cas du conte du Roi Lindworm, une analyse détaillée du processus par lequel celui-ci a pu être délivré, et enfin devenir un être humain normal, se révèle donc particulièrement intéressant pour un thérapeute qui serait confronté à ce problème chez un de ses patients (et c’est là que l’on voir réapparaître le symbole de la chemise).

C’est le deuxième livre de Marie-Luise von Franz que je lis, et je trouve décidément passionnante la façon dont elle parvient à redonner vie aux contes de fées et au symbolisme dont ils sont porteurs. Et j’apprécie aussi son approche “no non-sense” et “gardons les pieds sur terre” s’agissant d’un sujet - la psychologie jungienne – qui se prête malheureusement à de grandes envolées un peu fumeuses. Par exemple, on ne trouvera pas chez Marie-Luise von Franz les excès d’enthousiasme du profane fraîchement converti, cherchant dans l’inconscient la solution de tous ses problèmes, mais bien au contraire des conseils de prudence et beaucoup de bon sens, ce qui est tout à son crédit. En fin de compte, je n’ai qu’une réserve minime au sujet de “La délivrance dans les contes de fées”. C’est que ce livre est en fait basé sur une série de conférences, et que le découpage d’origine a été conservé alors même qu’il ne correspond pas aux thèmes discutés, ce qui nuit un peu à la fluidité de la lecture (sinon à la compréhension). Mais cela n’est qu’une réserve minime au regard de la richesse de ce livre dont je n’ai pu vous donner ici qu’une toute petite idée !


PS: C'est pas souvent que je m'énerve, mais ce serait quand même bien si Amazon pouvait s'abstenir d'estropier les noms des auteurs!!! "La délivrance dans les contes de fées" est donc bien un ouvrage de Marie-Luise von Franz, pas Marie-Louise von Frantz!

réponse à Pendragon

6 étoiles

Critique de Persée (La Louvière, Inscrit le 29 juin 2001, 73 ans) - 1 décembre 2001

Je ne suis pas certain que l'Eglise ait été le pire ennemi des alchimistes. Ces derniers ont rarement été inquiétés. L'alchimie était une tentative d'explication de l'homme et du monde avec les moyens du bord de l'époque. Dans "La légende du graal" (Albin Michel 1988), Emma Jung et Marie-Louise Von Franz expliquent, à travers l'analyse du Perceval de chrétien de Troyes et de celui, plus explicite encore d'un point de vue alchimique, de Wolfram von Eschenbach, comment l'idée du Christ a été "digéréeé par l'inconscient collectif, grâce à l'alchimie.
Selon elles, historiquement, l'image de Dieu s'impose comme métaphysique, transcendante, donc inhumaine. Il s'agit donc de la rendre plus humaine tout en gardant son caractère transcendant. Les mythologies auront recours à des "hommes-dieu". L'étape suivante sera l'incarnation de Dieu dans un individu (Jésus). Mais cette image du Christ, personnage inscrit dans l'histoire, se serait perdue avec le temps si l'on ne s'était atttelé à la graver au plus profond de l'être humain, c-à-d au sein même de son inconscient. (On me suit toujours ?) C'est, selon Jung, l'alchimie qui aurait réussi ce tour de force. La pierre signifie en alchimie "l'homme intérieur". par ses attributs divins, elle est un dieu caché dans la nature, tout comme le Christ descend sur terre dans un corps d'homme. Mais cette pierre "divine" est en même temps "commune", vile (exillis) : elle se retrouve en chacun. L'immanence rejoint ainsi la transcendance, le spirituel pénètre la matière. pour les alchilmistes, "transsubstantiation" et "transmutation" voulait dire la même chose. Dixit Von franz. Moi, je dis ça, je dis rien, comme dirait ma belle-mère...

Persée, dis-moi...

8 étoiles

Critique de Pendragon (Liernu, Inscrit le 26 janvier 2001, 54 ans) - 26 novembre 2001

Il semblerait que cette Von Krantz soit une érudite à lire... mais j'aimerais au préalable te poser une question, Persée : toi qui a lu son livre sur le Graal, comment parvient-elle à expliquer la pirouette qui consiste à écrire que l'alchimie (et donc le paganisme) a aidé à l'intégration du christianisme, son pire ennemi ??? Celui qui a conduit à sa perte...

Tout est symbole

6 étoiles

Critique de Persée (La Louvière, Inscrit le 29 juin 2001, 73 ans) - 23 novembre 2001

Lu Von Franz dans son gros ouvrage sur le Graal. Elle y expliquait, avec force érudition que l'alchimie avait contribué, par la symbolique de la pierre (philosophale) à intérioriser le christianisme, à le rendre accessible pour l'esprit occidental, qui n'aurait pu l'assimiler sans cet intermédiaire. C'était rudement bien charpenté. Peut-être un peu trop fascinant pour être vrai. Les théories de Jung sont souvent fascinantes : la notion d'archétype paraît toucher à une réalité tangible. Mais voilà, peut-on expliquer le monde par un système, fut-il psychanalitique ? Ces approches aident sans doute à mieux comprendre l'homme et le monde. Paul Dielh est génial à cet égard. On a de toute façon grand plaisir à lire ces jongleurs de l'inconscient. L'important, c'est de prendre son pied, pas vrai ?

franchement...

6 étoiles

Critique de Pétoman (Tournai, Inscrit le 12 mars 2001, 49 ans) - 23 novembre 2001

Si j'ai lu ce livre, c'est parce qu'il le fallait...Freud et Jung, à chacun son avis. Non je pense qu'il y a mieux à lire quand même.

Jung <> Freud

8 étoiles

Critique de Pendragon (Liernu, Inscrit le 26 janvier 2001, 54 ans) - 23 novembre 2001

Freud, malgré tout ce qu'il a apporté à la psychanalyse, est devenu un tant soit peu dépassé, tandis que Jung semble être resté plus d'actualité... Dois-je déduire de ta réponse sibylline que von Frantz vaut la peine d'être lue ?

comparons

7 étoiles

Critique de Pétoman (Tournai, Inscrit le 12 mars 2001, 49 ans) - 22 novembre 2001

La comparaison est simple: Bett est un freudien qui analyse principalement vis à vis de la psychosexualité tandis que Von Franz, elle, jungienne, est moins porté sur la chose... elle a une démarche que l'on pourrait qualifiée de plus ethnographique, voilà, plus symbolique.

et en comparaison ?

8 étoiles

Critique de Pendragon (Liernu, Inscrit le 26 janvier 2001, 54 ans) - 22 novembre 2001

Dis-moi Pétoman, pourrais-tu faire une comparaison entre ce livre-ci et la "Psychanalyse des Contes de Fées" de Bettelheim, que tu as déjà critiqué. En fait, ayant lu ce dernier, j'aimerais savoir ce que la lecture de von Frantz pourrait m'apporter... Merci.

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