Génération X de Douglas Coupland

Génération X de Douglas Coupland
(Generation X: Tales for an Accelerated Culture)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par B1p, le 14 décembre 2008 (Inscrit le 4 janvier 2004, 51 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (12 807ème position).
Visites : 4 290 

Eloge de l'entre-deux

Voilà un roman qui ne ressemble pas à un roman. Déroutant par bien des aspects, je me suis demandé jusqu’à la fin s’il valait vraiment le coup d’être lu. L’histoire ne m’a pas véritablement passionné, mais pas déplu non plus. Elle ne m’a pas emporté, mais pas laissé indifférent. Une impression en demi-teinte jusqu’au bout qui rendait un peu incertain le côté où la balance de mon intérêt allait pencher. Et pourtant...

Sur le quatrième de couverture, Beigbeder (toujours lui quand il s’agit de se prononcer sur le post-modernisme ?) en arrive à le comparer à « l’Attrape-Cœur ». Il y a de ça, incontestablement, dans la façon de décrire un état correspondant à un moment donné de la vie.
Coupland, lui, s’attache à évoquer la « Génération X », celle qui avait 25 ans en 1990 (au moment de l’écriture du roman, donc). Mais il est assez évident que ça s’applique tout aussi bien (voire mieux ?) à celle qui avait 18 ans cette année-là (ma génération, donc).

Dag, Andy et Claire habitent dans leur bungalow à Palm Springs et vivent de quelques menus travaux, banals mais sociologiquement instructifs. Tous fuient quelque chose, d’une certaine manière. Aucune catastrophe, non, mais plutôt une vie qu’ils avaient imaginée intéressante, mais qui s’est avérée juste morne et stéréotypée. Aux idéaux, ils ne croient pas. L’Humanité non plus, d’ailleurs, après toutes les désillusions qui sont immanquablement venues en contrepoint, chaque fois, des énormes espoirs. Mais il faut bien garder un but en tête pour avoir envie d’avancer. Alors, au lieu de faire semblant comme les autres, les trois amis se racontent des histoires de gens qui ont entrevu à un moment, à leur manière, leur destin ou qui ont pu capter quelques instants d’éternité, ou de quelque chose qui s'en rapproche.

Et c’est ce à quoi Coupland nous convie : arriver à saisir quelque chose qui pourrait nous sembler éternel, dans cet amas de biftons, d’illusions et d’idéaux rapiécés. Ceci fait sans heurts, sans effets de manche, sans ostentation, sans rebondissement, presque sans récit. Juste à la manière de la Génération X, celle qui rechercherait au hasard les bribes de quelque chose qui pourrait donner envie d’exister EN GRAND. Ou peut-être celle qui y a définitivement renoncé.

Si « Génération X » se complaît autant dans l’entre-deux, si « Génération X » refuse autant les ressorts des récits classiques, c’est la preuve que le récit atteint son but avec brio : parler de la résignation mais en faisant sentir que quelque part l'enchantement, même fugace, est possible. Et c'est finalement un but que bien peu de romans peuvent se targuer d'atteindre : rendre cohérents la forme et le fond.

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ENCHANTEE, GLAMOUR, ET NOMADE

8 étoiles

Critique de Antihuman (Paris, Inscrit le 5 octobre 2011, 41 ans) - 17 octobre 2011

Génération X, LE livre culte s'il en est, qui contient de vraies choses - A notre époque aseptisée il y en a de toute façon peu. Principalement autobiographique de cet écrivain, Douglas Coupland; encore un faisant fantasmer sûrement bien des mémères qui le dénigrent un maximum (et en achetant bien sûr la totalité de ses oeuvres...)

En effet, il y a des gens qui ont une écriture plutôt précieuse et faussement distinguée, d'autres qui usent de ce jargon grossier, compliqué et inepte, d'autres encore qui prétendent l'avoir cool et smart et qui sont les premiers à ronfler, mais quant à lui, n'en déplaise à ses ennemis, Douglas Coupland écrit comme un démon et c'est comme ça.
Utilisant d'ailleurs un genre dont il se moque par la suite , à la narration explosée et logique, riche en particularités; à travers ces protagonistes sinon cette galeries d'artistes à la noix (la carrière d'actrice que Claire a abandonné du fait de plusieurs "refus"), de Mc Jobs bidons, d'ordinateurs IBM, de motos cross à la casse, de starts-ups faussement équitables en fait c'est d'un peu tout le monde dont il se moque; Y compris sans doute ces trois héros vivant dans un bungalow et qui se défoulent pathétiquement contre ce solitaire et yuppie Tobias (plus beau, plus musclé qu'eux ?)

Enfin quant à cette génération particulière ayant connu la transition entre les guerres et l'âge de paix, et dont il est vrai qu'elle sera de toute façon la dernière à connaître en chair et en os des survivants de la seconde guerre mondiale il y a peut-être malgré tout quelque chose à dire de valable... Donc un volume intéressant, car même si le tout a un goût très primesautier, de temps en temps glauque et un peu fade, on se prend finalement de compassion pour ces trois personnes vivant en une sorte de club sottement fermé, et même si Coupland et ces grandes bringues parfois un peu mollassonnes comme Dag n'évitent pas les clichés, tous perdent à la fin du livre un peu de leur superbe de leur statut de "beautiful loser"; car au fond qu'ont-ils vraiment de plus que tout médiocre employé urbain, qui tente simplement de gagner sa croûte quant à lui ?

Et puis comment résister aux piques de l'auteur contre l'ultralibéralisme tout à fait hypocrite et amoral, le jeunisme et l'atavisme (bien souvent la même chose), l'idéal perdu des masses, la prétention d'une époque et de ses portables ayant connu en fin de compte peu d'inventions, et ces fausses insurrections et fallacieuses désobéissances qu'on nous impose ?

Enfin il y a ses aphorismes, dont en voici quelques uns:

Nos parents s'en sortaient mieux (pourquoi c'est pas vrai ?) Autodéfense de clique: besoin qu'a toute génération de considérer comme débile celle qui la suit, dans le but de consolider son ego collectif.

Il est dommage que les drive-ins aient disparu. Le travail à domicile, c'est bidon. Culte de la solitude: besoin d'autonomie à tout prix, aux dépends le plus souvent des relations à long terme; naît généralement d'illusions excessives sur les autres et de générosité en trop. N'importe quel match est truqué de toute façon.

Terrorisme consensuel: le processus régissant les comportements à l'intérieur de l'entreprise ou surtout, les livres de Douglas Coupland. Ne fais rien, si cela n'amène pas la gloire. LE SOLEIL EST TON ENNEMI.

"Le succès c'est l'échec, l'échec c'est le succès"

10 étoiles

Critique de Sami-mi (, Inscrit le 9 mai 2004, 42 ans) - 23 mai 2010

Peut-être qu'il est inscrit dans notre nature d'humains, qu'au commencement de notre vie d'adultes, nous souhaitions "devenir quelqu'un", ou "réussir" notre vie. Mais comment alors, définissons-nous ce "quelqu'un" que nous souhaitons devenir, cette vie "réussie" dont nous souhaitons profiter ?

Les séries télévisées, les films, les images publicitaires, les talks shows, etc... véhiculent diverses idées de ce qu'est un humain qui a réussi. Un beau gosse qui fait du surf sur la plage, un brillant professeur de littérature dans une université prestigieuse, un riche business man dans sa decapotable, etc... Choisissez votre modèle de réussite, et devenez ainsi quelqu'un qui n'est plus rien sans son job, sa beauté physique, ou sa voiture et ses autres possessions.

Coupland met en scène trois personnages, Dag, Andy et Claire, qui parfois sont tombes dans ce panneau pendant une bonne partie de leur jeunesse, mais qui parfois se sont casses la figure, et qui en tout cas ne veulent pas a l'avenir, tomber encore dans ce panneau. Ambiance crépusculaire, car c'est la fin de la jeunesse, le temps presse. Univers mental, et style, nourris des images, des objets, des idées, et du parler d'aujourd'hui. Sentiment de désabusement, mais de meilleure compréhension du monde, comme après l'effondrement d'une illusion, sentiment de liberté, comme devant un nouveau monde qui s'ouvre. Tout est fragile, tout est précaire. Avec seulement de l'amitié, de l'humour, et de l'imagination, les trois héros reussiront-ils a se reinventer une vie ?

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