La vie devant moi de Soukaïna Oufkir

La vie devant moi de Soukaïna Oufkir

Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances , Littérature => Arabe

Critiqué par Pascale Ew., le 3 novembre 2008 (Inscrite le 8 septembre 2006, 57 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 6 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (50 716ème position).
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Le prix de la liberté

Il est intéressant de lire ce livre après ceux de sa sœur Malika et de constater la différence de caractère. Soukaïna a vécu le même enfer/enfermement que sa famille, mais elle fait montre d’un caractère bien trempé, qui refuse de se laisser dompter. Elle est très attachante.
J’avais oublié les détails sordides de l’emprisonnement des Oufkir et la durée (19 ans !).
Le style de Soukaïna est très particulier, haché, laconique et ne facilite pas toujours la compréhension. Il traduit par contre bien le désir de l’auteur de ne pas se plaindre (les faits suffisent à exprimer l’horreur) et de se battre pour survivre. Quel gâchis que ces vies disparues et quel courage !

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5 étoiles

Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 9 novembre 2009

« J’écris ces pages parce que je suis à mi-parcours avant même d’avoir commencé à vivre. » Soukaïna, dernière fille du Général Oufkir, a passé près de vingt-cinq ans en prison parce que son cher papa a fomenté un complot contre le roi du Maroc, Hassan II. Le 23 décembre 1972, après le deuil rituel imposé par la loi coranique, la famille Oufkir est placée sous la protection du roi qui a fait exécuter le Général rebelle qui a manqué son coup de force contre le pouvoir.

Commence alors une longue détention de plus en plus dure, de plus en plus cruelle et de plus en plus humiliante pour punir cette famille qui a le tort d’être celle du renégat qui s’est opposé au roi. Ainsi, Soukaïna, gamine de neuf ans et demi va partager avec sa famille et deux femmes qui étaient au mauvais endroit, au mauvais moment, une longue, longue, vie de réclusion, de privation, de souffrance, d’humiliation mais jamais de soumission, d’acceptation ou d’abaissement. Dignité et fierté a toujours été la devise de cette famille insoumise qui a toujours voulu croire à l’impossible, au miracle avec l’aide du Coran et de la Vierge Marie unis dans une même mission. La lutte prendra même des formes extrêmes qui auraient pu mettre leurs jours en danger mais pour triompher, il faut risquer même sa peau.

Soukaïna raconte avec ses mots, ses phrases courtes, percutantes, violentes, harcèle le roi, ne le laisse jamais en paix, même après sa mort, pour lui rappeler sa veulerie, sa lâcheté, de s’en prendre à des enfants innocents et inoffensifs. La route était étroite cependant car Gilles Perrault avec « Notre ami le roi » et sa sœur Malika, avec la collaboration de Michèle Fitoussi, dans « La prisonnière » et « L’étrangère », avaient déjà largement défloré le sujet. Soukaïna a su parler d’elle, de son enfance en prison, de son éducation, de son instruction, de son adolescence volée, de son impossibilité de se construire dans de telles conditions. A dix-huit ans, « Je n’étais plus rien et je devenais un tout du même coup. Un rien qui recommençait de rien. Un rien qui démarrait de rien. Un rien qui se régénérait de lui-même. Un tout que pour lui-même. Un nombril. Une victime. »

Elle nous raconte aussi l’après, sans avant, difficile, erratique, errant. Mais comment ne pas avoir envie de se gaver ce qu’on a jamais eu, de ce dont on a été privé, de ce qu’on a tant désiré… Un témoignage fort, émouvant, jamais larmoyant, jamais pathétique, pas forcément littéraire mais vrai et sincère. La vie d’une femme et d’enfants qui ont payé le choix d’un autre car souvent, trop souvent, surtout dans ce Maroc « l’homme agit et décide de sa vie. La femme subit, colmate les dégâts, assume les conséquences. »

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