Le Royaume interdit de Rose Tremain

Le Royaume interdit de Rose Tremain
( Sacred country)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Jules, le 16 novembre 2001 (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (13 295ème position).
Visites : 6 404  (depuis Novembre 2007)

Un livre d'une grande sensibilité

Le livre débute en Angleterre le 15 février 1952. Toute la nation anglaise s’arrête dans une minute de silence en l'honneur du décès du Roi George.
La famille Ward, Sonny, Estelle et leurs enfants en font de même sur leurs pauvres terres du Suffolk. Ils ont deux enfants, Tim, le petit dernier et Mary qui a déjà six ans.
La famille Ward a la vie très dure et la vie est une longue lutte pour eux.
Soudain, pendant le temps du silence, Mary, en elle-même, annonce une grande nouvelle à sa pintade adorée qu’elle appelle Marguerite : « « J’ai une nouvelle à t’annoncer, Marguerite, j’ai un secret à te révéler, ma chérie. Je suis un garçon. » Et le narrateur nous dit : « C’est alors que commença le long voyage de Mary Ward. »
Cette fille va se battre toute sa jeunesse, son adolescence et plus tard encore, d’abord pour tenter de cacher qu'elle est une fille, puis pour devenir véritablement un homme.
Son père sera odieux avec elle et ce n'est que chez son grand-père qu’elle pourra trouver de l'amour et un soutien.
Ce livre nous raconte le long et pénible chemin que Mary va devoir faire pour tenter d’arriver à ce qu’elle veut. Le chemin sera terrible sur le plan moral, mais aussi physique.
Rose Tremain, à travers Mary, nous brosse un portrait plein de sensibilité et de finesse. Cette jeune femme est d’un courage et d’une force inouïe, tout en étant fragile aussi.
La lutte d'un être pour imposer ses choix à son corps et aux autres à une époque où la société était encore bien plus conformiste.

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Superbe et merveilleux

10 étoiles

Critique de Cuné (, Inscrite le 16 février 2004, 57 ans) - 26 septembre 2007

Février 1952, le roi est mort, vive le roi. Dans un champ du Suffolk, légèrement transis, se tiennent les Ward, désireux de participer aux deux minutes de silence nationales. C’est encore une famille, à ce moment-là, portant bien sûr les germes des nombreux dysfonctionnements qui vont l’exploser en milliards de morceaux, mais ils sont ensembles, côte à côte ; et dans le froid et l’attente, la petite Mary, six ans, révèle en une illumination soudaine en secret à sa pintade domestique qu’elle est un garçon, dans ce corps de fillette...

Et puis il y a aussi les parents, le petit-frère avec des deux lignes droites, le grand-père génial et formidable, l’institutrice qu’on voudrait embrasser bien fort sur chaque joue, Irène et Pearl et leur luminosité palpable, le voisin qui aime la country, le dentiste à la sexualité refoulée, les rencontres de la vie et tous ces sentiments si forts et si vrais qu’on ressent derrière chacune des superbes pages de ce roman.
Ving-huit ans (jusqu’en 1980) de chronique villageoise d’un tout petit monde anglais, rural, frustre, étriqué et pourtant, tellement attachant. (prix Femina étranger 1994)

Il n’y a pas tout à fait quatre cent pages, mais passé les cent premières déjà on freine la cadence, on sait qu’on va atteindre beaucoup trop vite l’épilogue, on voudrait que ce soit une saga interminable sur des milliers de pages, parce que cet univers nous enveloppe et nous intègre complètement. C’est tout simple, généreux, pur. On y trouve de l’absurde et du déchirant, je ne pourrais pas mieux dire qu’Anne Walters, citée pour Marie-Claire en 4° de couv : « Ce roman est une merveille. Sa dinguerie, sa compassion, sa violence et son humour, il faudrait pouvoir les boire et s’en enivrer. On gagne une peu d’intelligence à lire Rose Tremain. Un peu, c’est énorme ».
Chouette, je compte TOUT lire d’elle…

« Je m’étais rendu compte après ma visite au médecin que parler de moi à quelqu’un d’autre n’était pas aussi difficile que je l’avais imaginé. J’avais dit quelques mots et tout avait été fini. A part que ces mots n’avaient pas été crus. J’aurais pu aussi bien dire : « Je suis la Vierge Marie . » On croyait que je souffrais d’illusions. Ma mère m’avait dit qu’elle avait une amie, à Mountview, qui croyait être une poule. Et c’était pour cela que cette personne était enfermée là-bas. Personne n’avait cherché à voir si elle avait des plumes. Personne ne lui avait proposé un ver de terre. J’avais pensé lui écrire : « Ce pays a peur de tout ce qui est inhabituel », mais je m’étais rendu compte que l’idée d’écrire à une poule ne me plaisait pas. J’avais l’esprit aussi étroit que n’importe qui d’autre. »

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