Meilleur souvenir de Robert Olen Butler

Meilleur souvenir de Robert Olen Butler
( Had a good time)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Tistou, le 30 octobre 2008 (Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans)
La note : 6 étoiles
Visites : 3 746 

15 nouvelles

Robert Olen Butler a pris un parti original : celui d’écrire des nouvelles à partir de quelques lignes, quelques mots, inscrits au verso d’une carte postale. A partir de vieilles cartes postales. Egalement insérées entre chaque nouvelle, un extrait, ancien, d’un journal américain, faisant état d’une anecdote, d’un fait divers, drôle le plus souvent. Personnellement je n’ai pas fait le lien avec l’article ainsi cité et la carte postale-nouvelle qui suit, mais ce n’est pas grave.
Pour donner un exemple –des plus sobre ! – la seconde nouvelle : « une mère dans les tranchées », est introduite par une carte postale où l’on voit une photo jaunie d’une femme d’âge mûr, avec casque, dans une tranchée et qui regarde l’objectif, avec la mention manuscrite, dessous : « mother in the tranchee » (c’est traduit par ailleurs en sous-titre des nouvelles). Et de fait, Robert Olen Butler se prend à imaginer ce qui a pu amener une mère à venir se faire photographier dans une tranchée … C’est original – une mère américaine ( ?, anglaise ?) dont le seul fils encore en vie est parti et se bat dans les tranchées, part sur un coup de tête pour le voir et pour … à vrai dire elle ne sait pas trop quoi … Elle se démène tant et bien qu’elle arrive jusqu’à lui … la suite n’est pas forcément ce qu’on pourrait en attendre mais illustre bien comment des conditions de guerre peuvent changer des hommes. Très belle nouvelle.

« Ils mangent des rats. On me l’a raconté. Ils vivent dans de l’eau croupie et leurs pieds gonflent et pourrissent. Ils ne peuvent pas dormir par crainte des canons. Ils s’entretuent. On a emmené mon fils vivre cette vie-là. Alors j’ai préparé un sac parce que Jack, mon mari, était mort de la grippe et ne pouvait plus m’en empêcher, je me suis embarquée sur un bateau, je suis allée à Paris où j’ai engagé un homme qui avait déja payé le prix de toute cette folie d’autres hommes – un de ses bras n’était plus qu’un moignon, récolté au début de cette guerre - … »

Alors forcément, sur un mode pareil, il n’y a pas d’unité, de relation entre les nouvelles. Et donc il y a beaucoup d’inégalités, il faut bien reconnaître qu’elles sont de forces dissemblables. Certaines sont tirées par les cheveux mais d’autres touchantes et pleines d’humour, telle « La virée des ouvriers métallurgistes en chariot à foin ».
C’est toujours bien écrit, et on connait le penchant de Robert Olen Butler pour les situations extrêmes, issues de la guerre notamment. Il parvient toutefois à exploiter des non-histoires et à jouer simplement sur la description et l’interprétation de petites réactions humaines. C’est plaisant et on a l’impression de changer de livre d’une nouvelle à l’autre.
Moi, de toutes façons, j’aime Robert Olen Butler …

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