La fenêtre panoramique de Richard Yates
( Revolutionary road)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Autopsie du rêve américain
Franck et April Wheeler sont jeunes et beaux. Bien plus que vous, bien plus que moi, et surtout bien plus que tous les gens qui ont l'opportunité de les rencontrer. S'ils vivent dans un modeste quartier pavillonnaire, comme la plupart de ceux qu'ils fréquentent, c'est uniquement parce que la vie ne leur a pas encore offert leur chance. Ils en ont, bien évidemment, pleinement conscience. Aussi s'efforcent-ils jour après jour de faire bonne figure devant tous ces hommes et ces femmes qu'ils croisent, devant tous ces êtres si pathétiques que peuvent être leurs voisins, leurs amis, ou bien encore les collègues de bureau de Franck.
Les semaines, les mois, les années passent, et rien ne change. Les Wheelers, pourtant si différents, s'enlisent dans une routine et une médiocrité qu'ils pensaient réservées aux autres, à tous ceux qu'ils méprisent sans jamais le leur avoir avoué.
Jusqu'au jour où ils finiront par ouvrir les yeux sur ce qu'ils pensent être devenus, et auront en fait toujours été.
Un roman d'un cynisme et d'une noirceur extrême, et au travers duquel l'excellent Richard Yates dresse un portrait sans appel, celui d'une classe moyenne étasunienne trahie par ses rêves de grandeurs.
Les éditions
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La fenêtre panoramique [Texte imprimé] Richard Yates trad. de l'anglais (États-Unis) par Robert Latour
de Yates, Richard Latour, Robert (Traducteur)
R. Laffont / Bibliothèque Pavillons
ISBN : 9782221102084 ; 17,00 € ; 03/03/2005 ; 532 p. ; Poche -
La Fenêtre panoramique
de Yates, Richard Kennedy, Douglas (Préfacier) Latour, Robert (Traducteur)
R. Laffont / Pavillons poche
ISBN : 9782221215920 ; 11,50 € ; 06/10/2017 ; 544 p. ; Broché
Les livres liés
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Les critiques éclairs (5)
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Des fantômes vides évoluant dans un brouillard
Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 11 mai 2013
Roman très fort, dur, cruel mais oh combien réaliste. Sous des dehors d’harmonie et de savoir-vivre se cache un mal de vivre aiguë qui ne trouve son exutoire que dans l’alcool et les sorties du samedi soir. Difficile d’échapper au conformisme qui domine la petite société du Mont de la Révolution. Les Wheeler comme bien d’autres sont piégés par leurs obligations sociales et familiales. Leur vie conjugale est une prison dorée, une succession de rituels quotidiens immuables, une vie basée sur les apparences et non sur l’essentiel. Un récit qui rappelle la série « Mad Men », j’avais d’ailleurs constamment l’image de Don Draper en tête lorsque je lisais des scènes mettant en vedette Frank Wheeler pendant toute la durée de la seconde moitié du livre. Un tel récit ne peut se terminer sur un note optimiste mais est destiné à sombrer inévitablement dans la tragédie.
L’écriture de Richard Yates est souvent renversante. Certains de ses personnages semblent détachés de tout ce qui les entoure. Ils ne subsistent d’eux que des enveloppes vides, des sortes de fantômes programmés se mouvant dans une sorte de brouillard lumineux comme April. D’autres sont si détachés qu’ils se concentrent sur des détails insignifiants tout en faisant semblant d’écouter attentivement leur interlocuteur.
La fin est hallucinante. Un excellent roman qui instille une sorte d’angoisse, de malaise tout au long de la lecture et dont le souvenir me hantera pendant longtemps.
« Le Domaine du Mont de la Révolution n’avait pas été conçu pour abriter une tragédie. Même pendant la nuit, comme à dessein, les lotissements n’étaient fréquentés ni par des ombres furtives ni par des silhouettes décharnées. L’ambiance était invinciblement riante : celle d’un univers-joujou de maisons blanches et pastel dont les fenêtres éclairées, sans rideaux, clignaient aimablement de l’œil à travers un écran tacheté de feuilles vertes et jaunes. Fièrement, quelques projecteurs se braquaient sur des jardins, sur de belles portes de façade et sur les flancs de voitures couleurs de crème glacée. Un homme courant dans ces rues avec le chagrin du désespoir constituait un spectacle indécent. »
Autopsie d'un couple
Critique de Heyrike (Eure, Inscrit le 19 septembre 2002, 57 ans) - 4 janvier 2013
April croit avoir trouvé la solution en préparant leur fuite vers l'Europe, où elle pense que Frank pourra découvrir sa véritable vocation et échapper ainsi à ce travail insipide de vendeur de machines électroniques. Frank est un peu bousculé par l'idée de sa femme, mais petit à petit il va s'efforcer d'y croire.
Les égarements de deux personnages vont s'amplifier graduellement jusqu'à atteindre le paroxysme le plus violent. Frank va continuer à entretenir le mensonge qu'il cultive sur ses relations avec sa femme et son entourage, incapable de faire la part des choses (même s'il est convaincu du contraire), il décide de s'emparer de la raison de sa femme afin de la fouler au pied. Puisque sa vie ressemble de plus en plus à un champ de ruine autant en être le maître.
Grâce à une écriture très fine et magistrale, l'auteur dissèque la chair et l'âme des personnages, il met à nu, dans une lumière blafarde, les relations au sein d'un couple défait par les espoirs jamais concrétisés. Les faux-semblants et les fuites en avant sont les ingrédients qui parsèment cette histoire empreinte d'un profond désespoir. L'introduction du personnage de John, sujet à de sérieux troubles psychiatriques, prend la forme d'une parabole pour mieux affirmer que la folie ne réside pas forcément là où on la croit ancrée a priori.
Déployant ses ailes sur cette société informe, devenue incapable de transfigurer les aspirations les plus légitimes, le rêve américain crucifie les proies perdues dans la vacuité des promesses avortées.
La vraie vie des Desperate Housewives
Critique de Sanchan (, Inscrite le 28 avril 2009, 41 ans) - 7 décembre 2010
Les Wheeler, Franck et April, sont un couple de la Middle Class américaine, qui vivent non loin de New York, où Franck travaille. Il n'aime pas son job, se sent coincé par la vie de banlieue avec enfants, mais il est très amoureux de sa femme, pour qui son admiration est grande.
April est femme au foyer, elle s'occupe de la gentille maison que le couple a achetée, de leurs deux enfants, et fait un peu de théâtre en amateur.
Lui est un orateur, il aime parler et être écouté, mais ne sait pas ce qu'il veut faire de sa vie.
Elle voulait être actrice, et ne semble pas très heureuse de la vie qu'ils mènent.
Mais si fuir, changer de vie en partant en Europe, pouvait sauver ce couple et leur permettre de s'épanouir?
J'aime le personnage de Franck, hypocrite, qui se ment à lui même. Il se complait à croire que sa vie n'est pas comme il voulait qu'elle soit, car il veut se sentir différent de la masse des américains des années 50 à laquelle il appartient pourtant plus qu'il ne le croit. Il est ce qu'il fait semblant de détester, il aime ce qu'il se plait à critiquer.
Voici la vraie vision des Desperate Housewives. Voici les petits drames de la vie quotidienne, les malheurs d'une vie qui n'est pas aussi parfaite qu'on l'avait espérée et imaginée. Voici les tous petits grains de sable qui font que le couple déraille.
Comment s'épanouir lorsque l'on doit vivre, devenir adulte, avoir des responsabilités, être soi sans paraître marginal ou fou? La folie d'ailleurs est abordée dans ce roman. Et le plus fou est-il vraiment celui qui est jugé comme tel par la société?
Un livre pas du tout optimiste, qui ouvre les yeux sur les compromis que tout un chacun nous sommes dans l'obligation de faire pour vivre dans la société qui est la nôtre.
Richard Yates nous offre un roman magnifique de justesse, de réflexion sur le couple, et écrit avec beaucoup de délicatesse.
Splendide.
l'enfer au paradis
Critique de Jfp (La Selle en Hermoy (Loiret), Inscrit le 21 juin 2009, 76 ans) - 6 décembre 2009
Banlieue amère
Critique de CptNemo (Paris, Inscrit le 18 juin 2001, 50 ans) - 8 septembre 2009
Mais petit à petit la vérité se fait jour en eux : ils sont bien des banlieusard moyens qui mènent une petite vie moyenne. Et April a beaucoup de mal à accepter cette idée.
Voila un très beau et très sobre roman, ironique voir cynique écrit dans un style plutôt dépouillé mais pas simpliste. La peinture de la vie morne dans une banlieue américaine est magnifiquement réussie.
L'auteur dresse un portrait pas très flatteur de l'american way of life à travers l'histoire de ce couple qui, confronté à la chute de ses rêves se déchire jusqu'au drame. Le portrait psychologique de ce couple en crise est très réussi et avec une grande habileté l'auteur fait monter doucement la tension dramatique jusqu'au dénouement final.
Les deux protagonistes principaux sont tour à tour grotesques et bouleversants dans leurs échecs, touchants de justesse.
Au final, un très beau roman sur la dissolution d'un couple et sur l'immaturité qui aborde des questions universelles : comment vivre quand on sait qu'on ne réalisera pas ses rêves ? Comment se comporter face à ses propres échecs ?
Lecture vivement recommandée.
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