Invitation au crime de Joseph Sheridan Le Fanu

Invitation au crime de Joseph Sheridan Le Fanu
( The evil guest)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Débézed, le 20 juin 2008 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (25 674ème position).
Visites : 4 131 

Sombre comme les forêts d'Erin

Le Fanu plante le drapeau noir au cœur de la verte Erin pour nous raconter la tragique histoire de l’Honorable Richard Marston propriétaire d’un vieux manoir dans les environs de Chester. Cet aristocrate quinquagénaire mène une vie paisible mais austère et dépourvue d’amour et de tendresse avec sa femme qu’il néglige et sa fille qui est chaperonnée par une étrange gouvernante française au comportement particulièrement ambigüe. La vie de cette famille va brusquement basculer dans la tension, l’angoisse et enfin l’horreur quand un ancien collègue d’études, rival en amour, va s’inviter au manoir.

Ce roman publié en 1851 est considéré, selon l’éditeur actuel, comme l’un des premiers romans policiers. Le Fanu maîtrise parfaitement tous les ressorts du roman noir et sait très bien créer une atmosphère lourde et une ambiance oppressante, dans un cadre majestueux mais triste et ténébreux. Dès les premières lignes du roman, il dresse un portrait inquiétant et un brin sinistre des lieux où vont évoluer les protagonistes : « A une vingtaine de mille de l’ancienne ville de Chester, en direction du sud, s’élevait, vers la fin du siècle dernier, une grande demeure, déjà en ce temps-là démodée. Elle était située au centre d’un domaine richement boisé d’arbres vénérables. Malgré la sombre majesté de ces futaies géantes et des vallonnements sur lesquels elles croissaient, l’endroit n’avait rien d’agréable. Il respirait la négligence et la ruine. Une indescriptible et sombre tristesse en émanait. Au clair de lune, les clairières et les combes prenaient une terrifiante allure spectrale et se vêtaient d’une sorte de solitude funèbre. Et même quand l’aurore embrasait les grands bois, le spectateur de ce baiser avait le cœur étreint de tristesse plus que de joie. » Le décor est planté, le récit est à l’avenant, malheureusement le dénouement n’est pas à la hauteur de ce qui le précède. Et malgré sa réputation un peu sulfureuse, j’ai l’impression que Le Fanu n’est pas allé au bout de la transgression et que la morale le gêne encore un peu aux entournures mais nous ne sommes qu’au milieu du XIX° siècle et le livre est bon bien qu’il soit court, ce qui prouve qu’on peut créer un monde et des personnages sans « pisser » de la copie.

A mi-chemin entre le roman gothique et le roman victorien, Le Fanu, avec son compère anglais William Wilkie Collins dont j’ai lu « Secret absolu » il y a quelques mois seulement ce qui me permet d’apprécier le parallèle évident entre les deux romanciers, a ouvert une route où de très nombreux auteurs de romans noirs se sont engouffrés.

Connectez vous pour ajouter ce livre dans une liste ou dans votre biblio.

Les éditions

  • Invitation au crime [Texte imprimé], roman Joseph Sheridan Le Fanu trad. de l'anglais par Patrick Reumaux
    de Le Fanu, Joseph Sheridan Reumaux, Patrick (Traducteur)
    Phébus / Domaine romanesque (Paris. 1985)
    ISBN : 9782859408718 ; 3,48 € ; 15/01/2003 ; 192 p. ; Broché
»Enregistrez-vous pour ajouter une édition

Les livres liés

Pas de série ou de livres liés.   Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série

Entre enquête, surnaturel et folie

8 étoiles

Critique de Pierrequiroule (Paris, Inscrite le 13 avril 2006, 43 ans) - 22 octobre 2012

Imaginez une vieille demeure mélancolique, les Hêtres Gris, située entre Angleterre et Pays de Galles, à la fin du XVIIIème siècle. Dans ce manoir envahi par les ronces vit la famille de Richard Marston, un gentleman ruiné et amer. La solitude de la maisonnée est un jour interrompue – au grand dam du maître de maison - par un invité importun : Sir Wynston Barkley, cousin et ancien camarade de Marston.

Dès lors, une atmosphère maléfique pénètre dans la maison et même les domestiques commencent à agir étrangement. Pourquoi ce pauvre Cartwright, au service des Marston depuis des années, souhaite-t-il quitter le domaine ? Quel terrible secret cache Mlle de Barras, gouvernante jusque-là exemplaire ? Et qu’est-ce qui lui donne tant de pouvoir sur le chef de famille ?

Vous l’aurez compris, un meurtre sordide se prépare. Mais le coupable n’est peut-être pas celui que tout accuse… Toujours est-il que la famille Marston va voler en éclats, ternie à jamais par ce sanglant mystère.

Ce roman utilise de nombreuses ficelles du genre policier : enquête, indices et faux coupable sont au rendez-vous. Mais le récit se trouve aussi à la lisière du fantastique. Le Fanu y traite de la folie et de la hantise diabolique, thèmes présents dans la plupart de ses romans et nouvelles. Nous ne sommes qu’en 1851 lors de la publication de ce livre ; mais ces obsessions de l’auteur deviendront encore plus prégnantes après la mort de sa femme en 1858. Dès lors l’écrivain s’enfermera dans une grande solitude et produira des chefs d’œuvre, tous plus morbides les uns que les autres.

« Invitation au crime » est donc un livre particulièrement noir et angoissant. Ses 150 pages se lisent d’un trait, tant le suspense tient en haleine. Une invitation à ne pas fermer l’œil de la nuit !

Forums: Invitation au crime

Il n'y a pas encore de discussion autour de "Invitation au crime".