Le garçon dans la lune de Kate O'Riordan

Le garçon dans la lune de Kate O'Riordan
( The boy in the moon)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Cuné, le 28 février 2008 (Inscrite le 16 février 2004, 56 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (3 577ème position).
Visites : 4 471 

Vérité vraie

Tout commence par la soirée d'une famille qui ne va pas trop bien. Julia et Brian sont mariés depuis dix ans, et leur couple subit une lente érosion; A première vue, on ne donne pas cher de sa longévité, mais bien évidemment, les choses sont plus complexes que leurs apparences. Lors de leur visite au père de Brian, en Irlande, un drame se produit, et fout en l'air jusqu'à la plus infime particule de leurs existences. Brian sombre dans un isolement maladif, et Julia, contre toute attente, débarque chez son beau-père mutique et plus que particulier, pour s'abrutir de travail manuel et tenter d'ajouter un jour après l'autre. Par petites bribes de passé et de présent, on apprend peu à peu à faire vraiment connaissance avec toute cette famille, aux secrets bien gardés et aux plaies très à vif...

Ce roman frappe bien fort comme il faut; on le débute presque dans l'allégresse, parce que le début est drôle, méchamment observateur du fonctionnement universel d'un couple ronronnant, et puis assez vite l'horreur absolue survient. La scène affreuse est décrite presque négligemment, ça tourne un peu autour mais le lecteur sait, sent, pressent, et c'est une sensation réellement physique qui vient le glacer : un vertige, un flash, l'expression de ce qu'il redoute le plus au monde et qu'il croyait être le seul à avoir osé imaginer pour l'exorciser, que ça ne lui arrive jamais, jamais, à lui ! A partir de là, on suit le reste en se distanciant de plus en plus, en saisissant toutes les occasions pour se dire qu'on ne peut absolument pas s'identifier à rien ni personne (ouf).

Peine perdue, bien sûr, on termine les yeux tout mouillés et on s'est fait bien mal. Mais quand c'est fort comme ça... Moi j'en redemande !

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A l'irlandaise

9 étoiles

Critique de Paofaia (Moorea, Inscrite le 14 mai 2010, - ans) - 20 décembre 2013

Il ne faut pas se fier à la quatrième de couverture qui, à la lire, laisse présager un mélo classique. Un couple qui ne va pas très bien, un enfant unique qui meurt accidentellement, le couple qui explose.
Ce qui est moins prévisible, c'est que la mère va aller s'engluer chez son beau-père, un tyran domestique , y devenir une esclave, et apprendre là qui est son mari. Ou du moins ce que l'on en a fait.

C'est un roman à l'irlandaise, très dur, très caustique , très désespéré, et pourtant non dénué d'espoir. Sans une once d'apitoiement pour les personnages, et pourtant ils en auraient bien besoin. C'est un roman qui parle d'amour, du pourquoi de l'amour, du manque d'amour, du trop d'amour . Dans un couple, pour un enfant, pour ses parents, entre frères. Un roman qui parle de la protection que l'on voudrait offrir à ceux qu'on aime. Et de la répétition, sous une forme ou une autre , des souffrances de l'enfance.
C'est un roman dont j'ai bien du mal à parler tant il me touche. Personnellement. Essentiellement dans l'amour que se portent ces frères maltraités, qui en sont à vouloir se tuer entre eux pour s'épargner à chacun un surplus de souffrance.

Brian ne pensait qu'à une chose, tuer son frère; Il voulait se débarrasser de la pitié continuelle, de la protection, de l'amour stupide et fou qui l'étouffait tous les soirs avant de s'endormir.


Et puis une histoire de chien maltraité lui-aussi, et qui,pourtant, revient toujours. Comme les enfants..

Julia resta un moment effondrée contre le montant de la porte. Puis elle entra voir comment allait le colley. Il avait léché ses blessures et il dormait , roulé en boule près du fauteuil de Jeremiah. Elle l'observa avec curiosité. Apparemment, peu importait la cruauté de Jeremiah envers lui, il revenait toujours comme s'il en redemandait. Elle pensa de nouveau à Brian: avait-il éprouvé la même chose envers elle? Elle l'avait parfois traité comme un chien- non, ce n'était pas tout à fait vrai, plutôt comme un enfant constamment récalcitrant. Et, comme un enfant, il venait toujours en redemander. Un étrange instant, elle comprit combien Brian l'avait aimée. Car l'amour le plus fou est l'amour d'un enfant pour un parent abusif.

On n'en sort pas indemne.

10 étoiles

Critique de Flo29 (, Inscrite le 7 octobre 2009, 51 ans) - 7 avril 2013

J'ai failli arrêter la lecture au moment du drame qui survient. Mais c'était plus fort que moi, j'ai continué. Et je ne l'ai pas regretté. Voilà un livre dont on ne sort pas indemne, on pleure beaucoup, on suit les personnages et les retours dans le passé avec l'envie de savoir quelle est cette vérité terrible qui est effleurée pendant tout le roman. Un gros choc pour moi, mais c'est tellement bien écrit qu'on arrive à supporter toutes les souffrances des personnages, et il y en a beaucoup.
A lire absolument!

Du poids de l’enfance et de l’importance de communiquer.

8 étoiles

Critique de Amanda m (, Inscrite le 10 janvier 2008, 57 ans) - 11 mars 2008

Kate O’Riordan aborde ici un thème a priori difficile mais simple : un couple marié depuis 10 ans qui commence à s’ennuyer, la mort de l’enfant unique, la séparation, la vie qui continue, branlante, dépossédée, mutilée. Mais au-delà de l’affectation que ce récit pourrait entraîner, elle utilise l'événement pour rebondir sur une histoire bien plus complexe et tragique.

La mort de Sam va bien sûr atomiser l’existence de ce couple. Julia, incapable d’assister à l’enterrement de son fils, se réfugie quelques semaines plus tard chez son beau-père. En Irlande, là où est justement enterré le petit garçon. Elle se rapproche de son fils, mais pas à pas, lentement, ramassant petit à petit ses forces pour affronter la réalité, affronter le tombeau et faire enfin face à la mort de son enfant. Elle découvre par hasard le journal de la mère de Brian et se plonge dans l’histoire de cette famille, les drames, les abominations soigneusement enterrées qui ont pulvérisé l’avenir de ses membres.

Jeremiah le maussade, monstre incapable d’aimer, rempli de certitudes quant à l’éducation qu’il convient de donner (ou plutôt d’acquérir, « donner » étant trop synonyme de « don » pour pouvoir s’appliquer à l’homme), n’élève pas ses enfants. Il les dresse. Il est craint autant que désespérément aimé, désespérément haï.

La famille sera dévastée par un drame, interdite de chagrin par un père despote ; la mère confinée à ses fonctions de reproductrice et ménagère se tuera à la tâche ; la fratrie sera broyée à tout jamais par la toute puissance tyrannique du père : des personnalités disloquées, incapables de parler, de se parler qui auront survécu avec une immense chape sur les épaules, une haine, une rancœur, un peur tapie au fond du cœur. Et cette haine, cette peur, qui finissent par resurgir, un jour. Parce que le seul moyen de laver le passé est de le faire revivre. Pour s’en disculper, pour s’en défaire.

C’est saisissant. J’ai aimé ce roman. J’ai aimé cette femme qui essaye de survivre à la mort de son enfant (est-ce seulement possible ?) j’ai aimé ce père laminé par la culpabilité. J’ai haï cet autre père implacable, révoltant, glaçant. J’ai souffert pour cette autre femme écrasée telle un insecte par le regard et l'indifférence haineuse de son mari.

Le style est simple, sans chichis aucun, mais Kate O’Riordan s’y entend pour allumer des étincelles, provoquer des émotions, susciter des frissons et des petits picotements qui remontent des profondeurs de la mémoire et surgissent en vague.

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