Natasha et autres histoires de David Bezmozgis

Natasha et autres histoires de David Bezmozgis
( Natasha and other stories)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Aaro-Benjamin G., le 24 janvier 2008 (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 54 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (39 864ème position).
Visites : 3 270 

Le plus bel héritage

Le premier livre de ce jeune auteur canadien, né en Russie mais habitant Toronto depuis l’enfance, est finaliste pour 6 prix prestigieux en 2005. Il n’en remporte aucun, en dépit de son apparition dans toutes les listes de fin d’année des meilleurs bouquins.

Peut-être parce qu’il s’agit d’un recueil de nouvelles? Pourtant, les 7 textes sont presque ficelés comme un roman, car il s’agit de l’histoire de sa famille qu’il est question, admirablement racontée, de sa jeunesse jusqu’à 16 ans. Pas étonnant que Bezmozgis ait dédié son travail à ses parents.

Il emploie une écriture minimaliste mais classique attendue des écrivains élevés dans la rigueur des traditions juives. On le compare à Tchekov. En réalité son humour coincé et sa manière de synthétiser pour en arriver à des conclusions ironiques est très moderne. Contrairement à l’autofiction racoleuse que l’on nous sert généreusement ces dernières années, il ne se vautre pas le nombrilisme adoratif. Il aime les membres de sa famille et plus souvent qu’autrement les place à l’avant plan à son détriment. Chacun d’eux est dépeint avec dignité, même dans leurs faiblesses.

Du groupe, 3 textes sont exceptionnels. ‘Tapka’ relatant l’attachement émotionnel maladif de sa tante pour un petit chien dont il aura la responsabilité. Une magnifique fable démontant que les petits drames sont parfois grands en conséquence. ‘Choynski’ sur le cancer de sa grand-mère et notre aversion de la mort jusqu’à ce qu’elle nous soit inévitable. Et bien sûr, la nouvelle titre ‘Natasha’, une délirante évocation de la dérive adolescente. Drogue, sexualité, collision entre l’enfance et le monde adulte.

Une belle collection, authentique et brillante par moment. Un talent prometteur.


(lu en version originale)

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Exil letton au canada

6 étoiles

Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans) - 28 janvier 2011

Ce petit recueil de nouvelles ressemble étrangement à l’ébauche d’un roman autobiographique racontant l’arrivée d’une famille juive lettonne au Canada, au début des années quatre-vingt, avec tous les avatars que cela comporte. Le narrateur, l’enfant de la famille émigrée, devient progressivement adulte à travers les épreuves racontées, comme autant de rites de passages vers la maturité, dans les sept nouvelles qui constituent ce recueil : la honte et la culpabilité qu’il découvre lorsque le chien qu’on leur a confié se fait renverser par une voiture ; le désenchantement au contact des juifs intégrés qui ne voient en eux que des spécimens de la maltraitance faite aux juifs en Europe de l’Est ; la déchéance programmée des champions soviétiques qu’ils avaient côtoyés à Riga ; la difficulté de conserver la mémoire du sacrifice du peuple juif ; la découverte de la sexualité, de l’amour et de la trahison, le passage à l’âge adulte ; le besoin d’avoir une identité, de se rattacher à une communauté, de ne pas renier ses racines ; le risque de voir la pratique religieuse s’essouffler quand les structures temporelles s’affaiblissent progressivement.

Un recueil qui met en évidence tout ce qu’Axionov (« Un petit sourire, s‘il vous plait », « Paysage de papiers»), et d’autres bien sûr, nous avaient déjà raconté sur le sort de ceux qui n’avaient pas les faveurs du régime en URSS et sur les difficultés rencontrées en terre d’asile : le dépaysement, le manque de repères, la solitude, l’isolement, la perte de son statut et de sa culture, la pauvreté, …, par ceux qui ont choisi la fuite. Etonnant que ces sujets fassent encore l’objet de publication au XXI° siècle (en 2005, par un écrivain né en 1973) alors que nous les connaissons bien maintenant que les barrières sont tombées depuis deux décennies au moins.

Une œuvre un peu désenchantée mais totalement désespérée qui reste cependant agréable à lire et qui n’est pas, pour la forme au moins, sans rappeler dans les récits d’Odessa d’Isaac Babel.

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