La place de Annie Ernaux

La place de Annie Ernaux

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Darius, le 5 octobre 2001 (Bruxelles, Inscrite le 16 mars 2001, - ans)
La note : 5 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 24 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (1 970ème position).
Visites : 16 764  (depuis Novembre 2007)

Hommage à un père

Vous avalerez ce petit livre de 113 pages en une courte soirée..
J'ai découvert Annie Ernaux, professeur de lettres, par le biais d’un de ses derniers livres "Se perdre" dans lequel elle nous conte ses amours tumultueuses avec un Gorbi-boy, nettement plus jeune qu'elle...
Attirée par le sujet de "La place", ne rejetant pas l’idée qui germe dans mon esprit, de rédiger l'histoire de mon père,j’ai voulu m'en inspirer..
Je dois avouer ma déception, face à ce récit qui a obtenu le prix Renaudot 1984. Lorsque je pense que Gallimard qui publie Annie Ernaux ait refusé la publication de la première œuvre d'Amélie Nothomb, "Hygiène de l'assassin", on ne peut que rester pantois..
Qu’est ce qui a motivé le jury du prix Renaudot ?
Les membres du jury étaient-ils tous issus de la bourgeoisie et ont-il été touchés par les origines ouvrières d’Annie Ernaux ?
Ces origines non démenties mais portées comme un étendard dont elle est fière, lui ont-elles ouvert la porte du succès ?
C’est vrai qu’il est difficile de modifier une réalité plate, une existence morose, une vie monotone, une enfance où il ne se passe pas grand chose.. mais l'écriture n’est-elle pas là pour agrémenter le quotidien ?
Ne peut-on faire danser les mots ? Les accoler les uns aux autres pour les rendre époustouflants, incongrus, humoristiques, amusants, ironiques, tristes, accrocheurs, déplacés, cyniques... bref, les obliger à s’incruster dans votre tête, à devenir le prolongement de votre cerveau jusqu’à votre main qui se saisit du stylo qui verra s’immortaliser pour un instant ces mots mis bout à bout qui vous ont tant fait vibrer..
Bref, une oeuvre documentaire, autobiographique, écrite sans grand talent de conteur, sans surprise, avec peu de rebondissements et qui nous conte une existence campagnarde d'une famille issue de la classe ouvrière.

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L'inconnu qui fut mon père

7 étoiles

Critique de Monocle (tournai, Inscrit le 19 février 2010, 64 ans) - 24 mai 2022

Une plume légère relate un hommage à un père disparu.
Il est vrai que enfant, ado et même adulte, on s'interroge peu sur la vie du père. Une notion (le père c'est la loi) demeure. J'ai beau me creuser les souvenirs, je me dis que je n'ai eu que peu de moments intimes avec lui. Il représentait l'autorité tranquille et à sa mort je me suis rendu compte qu'il était un étranger.
Annie Ernaux fait finalement un constat analogue. Son texte épuré décrit un être simple mais qui fut un guerrier de la vie. Ses choix furent ceux d'un homme qui voulait le mieux pour sa famille.

Je ne suis pas fan de ces textes nombrilistes qui relatent un vécu personnel mais je reconnais que le style parfait de l'auteure invite à un apaisement délicat.
Mon premier contact Madame Ernaux est prometteur.
Merci.

Mon vieux !

10 étoiles

Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 58 ans) - 19 juillet 2020

Annie Ernaux (1940- ) est une femme de lettres française. Son œuvre littéraire, pour l'essentiel autobiographique, entretient des liens étroits avec la sociologie et sa vie.
"La Place" paraît en 1984 et est salué par le Prix Renaudot.

Est-il possible de pratiquer une "écriture du contact " comme le revendique l'auteure lorsque l'on écrit sur son père ? N'être que factuelle et ne pas exprimer ses sentiments ? Difficile challenge !
Un court et sensible hommage au père, métayer dans des fermes de 12 à 18 ans, le service militaire, l'expérience difficile du métier de commerçant où il faut - pour subsister - occuper un poste d'ouvrier à mi-temps. La guerre de 1940 comme une parenthèse pour reprendre une épicerie/café avec son épouse et enfin pouvoir en vivre.
En parallèle, la jeune Annie réussit un parcours scolaire exemplaire qui l'éloigne tous les jours un peu plus des valeurs et du quotidien de ses parents. C'est un "écartement de classe " auquel nous assistons, avec la fierté gênée du père qui comprend mal que l'on puisse "travailler du chapeau" (activité intellectuelle) et en vivre.
Un fossé se creuse, des incompréhensions ... mais un fort respect, tendre et pudique se devine au travers les lignes de l'auteure.

On peut penser à la chanson "Mon vieux " (Daniel Guichard) et au sublissime roman d'Yves Simon "Un homme ordinaire".
Je pense que le pari d'Annie Ernaux est raté, mais j'en suis heureux car ce court roman transpire le respect et l'amour pudique envers ce père qui l'a quittée.
Un superbe moment de lecture.

Une époque, une classe sociale, une famille, une échappée

10 étoiles

Critique de Falgo (Lentilly, Inscrit le 30 mai 2008, 84 ans) - 12 juillet 2020

En peu de pages, Annie Ernaux restitue toute une époque, une classe sociale à laquelle appartenaient ses parents et dont elle est sortie en utilisant l'ascenseur social de la formation universitaire et du mariage. Son livre raconte les faits et gestes de ses parents et plus particulièrement de son père. Mais, à mon sens, son père est décrit comme un idéal-type de la classe sociale à laquelle ils appartiennent, ces paysans venus à la ville sans éducation ni formation tentant d'y trouver leur place, bien misérable au fond. Elle raconte donc les efforts, les limites de ce cheminement et les écarts qui les séparent de cette bourgeoisie urbaine qui représente une sorte d'idéal, inatteignable pour des raisons culturelles et financières. Leurs comportements sont finement décrits avec les mots et les expressions utilisés, les manières de vivre. A cet égard les passages consacrés à la mort du père sont criants de vérité. Il me semble alors qu'Annie Ernaux parle des mêmes personnes et des mêmes comportements de classe que Pierre Michon dans "Vies Minuscules", mais avec un parti pris esthétique opposé. Michon dit bien qu'il lui fallait donner à ces "petites gens" l'écrin d'une langue riche et sophistiquée pour leur rendre hommage, tellement il pensait qu'il leur était dû. Annie Ernaux choisit au contraire de fonder son récit sur une langue pauvre et l'absence de tout artifice littéraire pour mieux restituer la pauvreté de ces vies. Et elle y réussit magnifiquement, ce à quoi les jurés du Prix Renaudot ont, je l'espère, été sensibles. Pour moi, j'ai presque envie de crier au chef d'oeuvre tant ce qui est rapporté me permet de me rappeler des personnes, des familles, des rites sociaux, des manières de vivre qui ont existé dans notre pays dans ces années-là.

La place de son père et d'elle-même

8 étoiles

Critique de Ddh (Mouscron, Inscrit le 16 octobre 2005, 82 ans) - 21 mai 2017

La place prépondérante dans ce récit est celle du père d'Annie Ernaux ; mais la narratrice se révèle également.
Le père d'Annie Ernaux n'est pas facile à vivre. Il faut ajouter qu'il n'a pas été gâté : petite extrasse, valet de ferme avant de devenir ouvrier ; puis indépendant tenant un bar-épicerie. Les relations père-mère sont souvent tendues. Annie, elle, est brillante : elle réussit avec panache ses études. On décèle une grande tendresse pour ses parents tout en gardant beaucoup de retenue. L'auteure souligne comment la vie a évolué autour d'elle : une belle page sociologique.
Un petit bijou d'écriture : Annie Ernaux commence par la mort tragique de son père pour revenir sur ses grands-parents, son enfance, ses années ados, sa vie d'adulte.

Je m'y suis retrouvé

10 étoiles

Critique de Cyclo (Bordeaux, Inscrit le 18 avril 2008, 78 ans) - 25 mars 2016

J'ai relu "La place", le magnifique livre d'Annie Ernaux, consacré à son père, où, cette fois, elle ne se masque plus sous l'apparence d'un roman. C'est assez étonnant, quand on lit ses différents livres à la suite, on est bien dans la lecture d'une vie, d'une classe sociale et d'un déclassement, vers le haut : "transfuge de classe", écrit-elle. Elle a souhaité ici "écrire au sujet de mon père, sa vie, et cette distance venue à l'adolescence entre lui et moi. Une distance de classe, mais particulière, qui n'a pas de nom. Comme de l'amour séparé." Et un peu plus loin, cette constatation (que j'ai pu faire moi aussi) : "Peut-être sa plus grande fierté, ou même, la justification de son existence : que j'appartienne au monde qui l'avait dédaigné."
Quant à ceux qui parlent ici de banalité du style, je renvoie à ce qu'écrit l'auteur elle-même : "Pour rendre compte d'une vie soumise à la nécessité, je n'ai pas le droit de prendre d'abord le parti de l'art, ni de chercher à faire quelque chose de « passionnant », ou « d'émouvant »." Et c'est sociologiquement très juste : "Voie étroite, en écrivant, entre la réhabilitation d'un mode de vie considéré comme inférieur, et la dénonciation de l'aliénation qui l'accompagne. Parce que ces façons de vivre étaient à nous, un bonheur même, mais aussi les barrières humiliantes de notre condition..."
Il y a là, pour les gens de cette époque, qui ont vécu le passage par l'ascenseur social, une manière de dire, d'être, qui touche au plus près de la réalité : c'est, au contraire, du grand art. Et Annie Ernaux rééditera l'exploit avec "Une femme", consacré à sa mère.
Peut-être que ce n'est plus compréhensible pour les "jeunes" nés après 1960 ou 70...
Ce qui explique les avis très mitigés sur le site.

Intéressant mais trop court !

7 étoiles

Critique de Ussopu3000 (, Inscrit le 6 décembre 2015, 23 ans) - 6 décembre 2015

Un livre sympathique, bien écrit, qui retrace le parcours d'un père après sa mort. Pas de quoi faire une épopée, mais le style simple et rapide de Annie Ernaux parvient à rendre le tout intéressant. On a parfois l'impression d'être un témoin des événements, et non pas un lecteur, cependant, le livre est trop court pour qu'on s'immerge complètement.

Annie Ernaux écrit "La place", un court roman en forme d’autobiographie où le « je » apporte une vision admirative, d’une fille à son père, sans réelle conviction. Dommage !

6 étoiles

Critique de Anonyme3 (, Inscrit le 6 septembre 2011, - ans) - 24 novembre 2013

Biographie de l'auteur:

Voir onglet biographie.

Quatrième de couverture:

«Enfant, quand je m'efforçais de m'exprimer dans un langage châtié, j'avais l'impression de me jeter dans le vide. Une de mes frayeurs imaginaires, avoir un père instituteur qui m'aurait obligée à bien parler sans arrêt en détachant les mots. On parlait avec toute la bouche.
Puisque la maîtresse me "reprenait", plus tard j'ai voulu reprendre mon père, lui annoncer que "se parterrer" ou "quart moins d'onze heures" n'existaient pas. Il est entré dans une violente colère. Une autre fois : "Comment voulez-vous que je ne me fasse pas reprendre, si vous parlez mal tout le temps !" Je pleurais. Il était malheureux. Tout ce qui touche au langage est dans mon souvenir motif de rancœur et de chicanes douloureuses, bien plus que l'argent.»

Mon avis:

+ : Roman facile à lire, en forme d’autobiographie où le « je » est de mise. Écriture sobre, aérée, simple d'accès, sans prétention et nullement racoleuse. Histoire de patriarche, bien construite avec des blancs d’écriture, qui rendent plus agréable la lecture du roman. Belle quatrième de couverture.

- : Roman trop court/long (Voir selon les visions de lecture), sans réel but où le lecteur ne comprend pas le but final de l’auteur (Annie Ernaux) d’employer le « Je » à tout bout de champ. Flash back et blanc utilisés de façon trop aléatoire et mal employés (Peut-être dû à la version poche de chez folio). Le fait de ne pas nommer son père, sa mère, le lieu d’habitation (Y…) et de ne pas dater les moments clefs du roman, peut gêner le lecteur. Fin bancale. Roman qui a eu le prix Renaudot et qui de surcroit, parait difficile à lire, ce qui est une idée reçue, la preuve avec « La place ».

En conclusion:

Avec La place, primé du Renaudot, Annie Ernaux écrit un court roman en forme d’autobiographie où le « je », apporte une vision admirative, d’une fille a son père, mort un dimanche en fin d’après-midi.

L’auteur (Annie Ernaux), d’écrit l’histoire de son père, de sa rencontre avec sa mère, de la création de leur café-épicerie, à Y…, jusqu’à la mort du père, au travers de sa propre biographie où de nombreux Flash back et blancs, qui au fil des pages apportent une certaine aération au texte et luis permet de passé d’une période de sa vie/ou/ de celle de ces parents à une autre.

Roman qui au fil des pages, devient de plus en plus brouillon, de part ces nombreux Flash back et blanc utilisé de façon trop aléatoire et mal employés a certain moment (Peut-être du à la version poche de chez folio).

Roman agréable a lire où le platonique, ressort aux fil des pages pour aboutir à une fin bancal et sans réel but, dommage.

"Les fils succédaient aux pères"

8 étoiles

Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans) - 12 avril 2013

Annie Ernaux a perdu son père l’année où elle a obtenu son CAPES, l’année où elle devenue professeur de lettres, entrant ainsi dans classe de la bourgeoisie administrative. C’est à ce moment qu’elle a pensé très fort à ses parents et grands-parents, à ceux qui ont fait d’elle ce qu’elle était et ce qu’elle est devenue : ce grand-père illettré qui travaillait, vers 1900, comme charretier chez un fermier dans le Pays de Caux, ce père placé comme vacher, dès douze ans, qui s’est évadé de l’étable pour devenir ouvrier puis contremaître et enfin commerçant, perdant ses dernières ambitions face à la grande distribution, les changement de modes de consommation et quelques aléas de conjoncture.

Un véritable portrait social, sur trois générations, de la France du XX° siècle. Un portrait où chaque génération lutte pour améliorer le statut social qu’elle a reçu en héritage, sans jamais parvenir à faire oublier d’où elle vient, la terre colle éternellement aux semelles, le vieux complexe du paysan, du fils de paysan, etc.…, n’est pas facile à évacuer, il colle lui aussi obstinément à la peau. Les stigmates de sa condition sont trop apparents : la démarche, l’allure, le langage,… tout dénonce l’homme de la terre, le rustre, l’inculte…

Chaque génération lutte pour gravir quelques échelons de l’échelle sociale mais, souvent, elle en grimpe moins qu’elle le souhaiterait et transfère ses ambitions à la génération suivante qui a fait un peu plus d’études et qui doit donc « réussir ». Je me souviens d’avoir eu à étudier un texte ancien, de Tibulle je crois, qui, pour évoquer une période de paix dans les campagnes romaines, écrivait que « les enfants succédaient aux parents » ce qui voulait dire qu’ils n’y avait pas de guerres pour emporter prématurément les hommes dans la force de l’âge et que les enfants enterraient leurs parents comme la loi du temps le demande. C’est ce temps qu’évoque Annie Ernaux, ce temps qui voudrait éluder les guerres pour que les enfants puissent apprendre assez longtemps et pouvoir grimper plus haut que leurs parents.

Avec son écriture minimaliste, sans relief, sèche, brève - « l’écriture plate me vient naturellement » - mais remplie de tendresse et peut-être même de la nostalgie de ce temps des choses simples, sans artifices, Annie Ernaux peint le portrait de la France des petites gens qui ont lutté au quotidien pour gagner leur pain, améliorer leur statut social, faire en sorte que leurs enfants aient une meilleure vie que la leur. Un portrait de la France populaire mal protégée contre les maladies et les accidents de la vie, de la France toujours en premières lignes pour défendre la patrie, de la France en liste sur les monuments aux morts.

Ce petit monde que j’ai connu dans mon enfance, ce monde où l’argent n’existe que pour payer les dettes, où l’on n’a rien mais où on peut-être heureux avec moins que rien.

Vague à l'âme

7 étoiles

Critique de Tim (Limas, Inscrit le 3 août 2011, 29 ans) - 27 avril 2012

La place est de ces livres qu'on aborde avec une espèce de condescendance, un certain mépris. Une histoire simple, quelques mots et un père. Finalement ce n'est pas bien plus mais c'en est profondément touchant. Honteux encore d'avoir pu penser ça, honteux de pouvoir nourrir des sentiments si méprisables.

C'est un peu mon père que j'ai retrouvé et qu'il est dur de parler d'un père. On ne peut le faire que légèrement et rapidement. Oui on n'éprouve aucun besoin de s'apitoyer sur notre sort, on s'attache déjà à autre chose. Fuite en avant, je regarde le passé, rien, j'avance.

Encore un sentiment dérangeant, un sentiment de vérité, de clairvoyance et de lucidité, voilà ce que j'ai ressenti. Un moment délicat et intimiste. Non, il ne faut pas le lire quand on ne peut pas le comprendre. Il n'est pas à la portée de tous, mais pour moi il était sous ma peau.

autobiographie sincère

5 étoiles

Critique de Emira17 (/, Inscrite le 9 juillet 2010, 27 ans) - 20 octobre 2011

Annie Ernaux a voulu rendre un hommage posthume à son père par le biais de ce livre simple, sans description et avec les mots que lui venaient du coeur. Ce père qu'elle n'a pas su aimer à sa juste valeur et dont elle s'est écartée à cause de son entrée dans le monde bourgeois.
Elle écrit d'une écriture plate, certes, mais je n'ai pas décelé la moindre émotion dans ces 113 pages qui se lisent d'un trait. A trop vouloir concentrer son écriture sur la vie de son père en oubliant de décrire un minimum, cela donne une écriture fluide oui mais complètement ennuyeuse. Pour moi, le récit est trop banal.

L'ascenseur social

6 étoiles

Critique de Isis (Chaville, Inscrite le 7 novembre 2010, 79 ans) - 11 octobre 2011

C’est l’histoire d’une vie toute simple et laborieuse d’un homme dont l’ambition sociale fut réduite à l’acquisition d’un petit café épicerie, afin d’échapper pour toujours au statut d’ouvrier qu’il avait occupé dans sa prime jeunesse.
Plus tard, il n’eut d’autre but que d’assurer aux siens une subsistance, certes, correcte, mais dépourvue de tout luxe.
Les études de sa fille ne furent pour lui qu’une «souffrance obligée pour obtenir une bonne situation et ne pas prendre un ouvrier». Heureusement, disait-il, «elle apprenait bien» et non «elle travaillait bien» ; car, pour lui «travailler, c’était seulement travailler de ses mains»…
Ce père est mort deux mois, jour pour jour, après la titularisation de sa fille Annie qui, dans ce livre, lui rend cet hommage écrit, faute d’avoir pu dialoguer avec lui autant qu’elle l’aurait voulu ; le fossé culturel qui existait entre eux se creusait en effet de plus en plus, à mesure qu’elle gravissait les échelons de la hiérarchie ; d’où parfois ce sentiment de honte et de culpabilité qu’elle a pu éprouver à son égard dans ses relations professionnelles ou par rapport à sa belle-famille ; elle utilise volontairement une écriture «plate»et dépouillée, qui lui permet, certes, d'être plus en phase avec le souvenir de cet homme peu instruit, mais elle désarçonne aussi parfois le lecteur par la banalité et l’apparente facilité de ses propos, comme le mentionnent ici certaines critiques.
Ceux qui ont vécu les années 50 retrouveront également avec plaisir les expressions populaires de l’époque. Un témoignage honnête et criant de sincérité. De là à légitimer l'attribution du prix Renaudot...

Pudeur des sentiments.

7 étoiles

Critique de Hexagone (, Inscrit le 22 juillet 2006, 53 ans) - 20 octobre 2010

Annie Ernaux avec beaucoup de pudeur, de retenue et de délicatesse évoque son père. Ce père disparu. Au travers de la biographie de celui-ci, elle évoque à mots couverts la place de l'homme dans la vie. Cette place est-elle celle du mort dont il ne reste que la trace sur l'oreiller? La place à prendre dans la société, la place que l'auteur semble avoir du mal à prendre entre deux catégories socioprofessionnelles ? Il plane une vacuité dans l'écriture de Ernaux, un vide que rien ne comble. Le style est froid, plat, on dirait presque un rapport d'un médecin légiste ou d'un entomologiste disséquant un insecte. C'est cela, Ernaux dissèque froidement la vie d'un homme. Sans sentimentalisme elle donne à éprouver des émotions. Sans doute l'ouvrage est-il un exercice de style assez réussi. Méritait-il de remporter le prix Renaudot ? Je l'ignore. Un livre court, rapide qui semble aussi intéressant qu'une posologie de médicaments, mais qui se révèle adapté à ce que l'auteur a voulu transmettre, un témoignage direct d'une vie passée ici bas.

Sincère, mais finalement trop simple?

7 étoiles

Critique de Perledelarme (Garges-lès-Gonesse, Inscrite le 6 avril 2010, 32 ans) - 6 avril 2010

Ce qui marque dans un premier temps, c'est l'écriture, simplissime, sans fioriture, et qui s'accorde parfaitement au thème évoqué, à savoir la figure paternelle de l'écrivain. Elle rend le récit attachant, émouvant par moment (surtout dans les dernières pages, quand on voit arriver la mort du père, prédite dès le début de l'ouvrage). Le livre est très court, ce qui accentue cette impression de clarté et finalement, de profonde sincérité.

Le roman ne prétend pas être d'une grande originalité dans son thème. Ce que je reproche finalement au récit, très modestement, est de ne pas avoir su me surprendre, me triturer, me faire réfléchir. J'ai lu le livre d'un bout à l'autre, j'ai apprécié la lecture, mais finalement, je n'ai pas l'impression d'avoir appris du livre. Peut-être n'ai-je pas abordé le roman de la manière qui convenait?

Un hommage sobre et émouvant

9 étoiles

Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 12 février 2010

Ce que j’ai aimé dans ce récit, c’est précisément ce que Annie Ernaux appelle « l’écriture plate » et qu’elle justifie par l’interdiction qu’elle s’est imposée « de prendre le parti de l’art, de chercher à faire quelque chose de passionnant, ou d’émouvant » , de s’en tenir à des « signes objectifs » de l’existence de son père , se privant ainsi d’un succès auprès de lecteurs amateurs de romanesque et de « belle écriture » . Elle manifeste une volonté de restituer fidèlement la façon dont son père s’exprimait, les mots et tournures dont il était familier, ce qui confère à l’ouvrage une dimension linguistique interessante .

Une telle écriture par laquelle elle bride ses sentiments , n’impose rien au lecteur et fait de lui seul le créateur de sa propre émotion

En plaçant en tête de son récit une phrase de Jean Genêt « Je hasarde une explication : écrire, c’est le dernier recours quand on a trahi »elle en légitime la rédaction et montre qu‘elle reste hantée par le remords d’avoir renié , par ce qu’elle est devenue , les valeurs de ce père aimant .

Un bel hommage d’une fille à son père , dans une langue qui restitue « les limites et la couleur du monde »où celui-ci a vécu .

Oui mais

7 étoiles

Critique de Vero911 (, Inscrite le 23 janvier 2010, 37 ans) - 30 janvier 2010

Dans ce roman autobiographique, Annie Ernaux nous narre la relation qu'elle entretenait avec son père. De son enfance à son adolescence, jusqu'à son entrée dans le « grand monde » ce petit roman ce lit avec plaisir. On en apprend un peu plus sur qui est Annie Ernaux.
Cependant le manque d'émotion de la narratrice dans ce livre pourrait en dérouter plus d'un. Elle raconte sa vie de manière linéaire, sans s'attarder sur les petites émotions qui auraient certainement apporté au livre un peu plus d'humanité.

Je conseille ce livre, pour celles et ceux qui souhaitent lire un roman sans fioriture.

tout en pudeur

9 étoiles

Critique de Dudule (Orléans, Inscrite le 11 mars 2005, - ans) - 16 avril 2008

Ce témoignage d'une fille à son père est plein de pudeur, de sincérité, d’émotion.
J'ai bien ressenti cette distance entre eux du fait de la progression « sociale » de sa fille d’abord dans les études, puis avec son mariage. Cela est toujours difficile pour les deux parties même si le père en l’occurrence est très heureux pour sa fille, mais on ne s’adapte pas toujours facilement, chaque classe sociale a ses codes. D’ailleurs l’auteur les décrit très bien, d’abord les petits paysans comme son grand-père paternel, puis les ouvriers que ses parents redoutaient de redevenir s’ils faisaient faillite .
Elle exprime aussi très bien la souffrance, la honte de ses parents, quel enfant n’a pas eu honte un jour !!!
Un petit livre d’une écriture neutre, simple, qui pour moi est très adaptée, elle laisse la place à l’hommage fait au père.

Un père et sa fille

8 étoiles

Critique de Gabri (, Inscrite le 28 juillet 2006, 37 ans) - 8 mai 2007

Fille d’un paysan complexé par sa condition sociale, Annie Ernaux retrace dans ce roman sa relation avec son père à la fois fier et jaloux de sa réussite professionnelle. En une centaine de pages, elle nous dévoile son enfance, son adolescence et son entrée dans le monde bourgeois grâce à une bourse obtenue au collège. Elle y raconte aussi la vie de son père et nous dresse le juste portrait d’un homme ayant vécu toute sa vie dans l’obsession des apparences. L’histoire est touchante mais contraste avec le ton que j’ai trouvé étrangement plat et distant. En effet, avec la mort de son père au début du récit et le thème autour duquel le livre se construit, on pourrait s’attendre à une écriture plus poignante, mais il n’en est rien. Je reste donc avec l’impression qu’Annie Ernaux tente de faire croire à un innocent retour sur ses origines, mais qu’elle le fait avec tant de détachement qu’elle paraît plutôt devenue une véritable bourgeoise fière de dire que rien ne lui a été donné. Néanmoins, la lecture est agréable et l’histoire est émouvante par endroits. Une belle soirée !

Un amour filial au delà du temps

8 étoiles

Critique de Ichampas (Saint-Gille, Inscrite le 4 mars 2005, 60 ans) - 27 septembre 2005

Annie Ernaux décrit merveilleusement une relation entre ce père issu d’un milieu modeste et sa fille ayant suivi le parcours dont il rêvait pour elle. Ce rêve pour sa fille l’a éloigné de lui en apparence mais malgré tout reste cet amour filial qui les unit.

sans fioriture

7 étoiles

Critique de Amour-des-livres (, Inscrit le 16 septembre 2005, 39 ans) - 26 septembre 2005

un petit roman autobiographique que j'ai beaucoup apprécié ou Annie Ernaux, avec un ton proche de l'analyse sociologique, ou du moins comme un "cliché", "un instantané" d'une classe sociale, à une période...
le style est très épuré, sans fioriture, et chacun y trouvera bon compte

le style est simple, l'auteur en vient au fait directement, sans fioriture ni baratin inutile

Platitude historique

3 étoiles

Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 8 mai 2005

C'est l'oeuvre la moins mauvaise de l'auteur, justement parce qu'elle fait part de ses souvenirs historiques.
Sinon, comme d'habitude, quelle banalité ! Quelle platitude de style ! Et quelle idée de se prendre pour le centre du monde !
Justement, qu'a bien pu piquer le jury Renaudot ?

Un roman pudique

6 étoiles

Critique de Jemangeleslivres (, Inscrite le 25 mai 2004, 50 ans) - 12 janvier 2005

" La Place" est un livre déconcertant. Déconcertant par sa simplicité, par la banalité de ce qu'il narre, par son absence -apparente- d'émotion. En parcourant les premières pages, je me suis dit que ça allait m'ennuyer à mourir mais j'ai décidé malgré tout d'aller au bout de ma courte lecture. En réalité, c'est un récit extrêmement poignant, qui prend de l'ampleur au fil des pages. L'émotion naît, paradoxalement, de la neutralité affichée par l'auteur, une émotion très contenue, mais bien réelle."La Place"est un livre fort et pudique. A découvrir! Précisons qu'il est précédé des "Armoires Vides", à liré également pour mieux cerner l'histoire de cet écrivain complexe.

Médiocre

3 étoiles

Critique de Don_Quichotte (Metz, Inscrit le 31 mai 2004, 36 ans) - 25 octobre 2004

J'ai trouvé ce livre d'une banalité affligeante, alors d'accord c'était le but de l'auteur, mais tout le monde s'en fout de cette histoire écrite sans style, j'ai d'ailleurs baillé plusieurs fois pendant la lecture...

Sincérité, grande pudeur et émotion

6 étoiles

Critique de Clarabel (, Inscrite le 25 février 2004, 48 ans) - 1 septembre 2004

Bref, Annie Ernaux, suite à la mort de son père, avait tenté d'inclure son personnage dans un de ses romans. Vaines tentatives. Et puis finalement, c'est en décidant de parler de lui crûment, sans pathos, "d'une écriture plate" pour dire les nouvelles essentielles. Rassembler les paroles, les gestes, les goûts du père, les faits marquants de sa vie. "Aucune poésie du souvenir, pas de dérision jubilante." Le pari est moitié réussi : Annie Ernaux parvient à retracer les traits d'un père très honnêtement, avec une pudeur non affectée. Pour parler d'un homme qui savait à peine lire et écrire, devenu ouvrier avant de s'élever au rang de commerçant, toute la fierté des gens de peu, avec leur mode de vie et leurs expressions de tous les jours. Annie Ernaux les copie en fille modèle dans son livre, un peu honteuse d'avoir tourné le dos à ce monde où elle a grandi heureuse, et puis rejeté lors de son entrée dans le monde bourgeois. Le résultat est juste, touchant. Car l'auteur a manqué à produire un texte plat, dans son état brut : l'émotion est présente du début à la fin, poignante, et vous noue l'estomac devant le récit de la mort du père. La disparition de cet être cher, bourru dans son genre, mais aimant et aimé pour ce qu'il était. "La place" lui en délivre un terrible et bouleversant hommage. Un très beau témoignage d'une fille pour son père. A lire, le mouchoir à portée de main.

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